L’Inde et l’Arabie Saoudite organisent leur premier exercice naval conjoint dans le golfe Persique

Si, au Moyen-Orient, la Chine joue la carte iranienne, notamment après avoir récemment noué un partenariat stratégique avec Téhéran, l’Inde mise sur les monarchies sunnites du golfe Persique, lesquelles, par ailleurs, accueillent de nombreux expatriés indiens.

Cette politique menée par New Delhi a des conséquences au niveau militaire. Ainsi, en mars dernier, l’Indian Air Force a participé pour la première fois à l’exercice aérien Desert Flag, qui, organisé aux Émirats arabes unis, avait réuni la France, les États-Unis, l’Arabie Saoudite et Bahreïn. Pour l’occasion, des Su-30 MKI avaient été déployés sur la base aérienne d’al-Dhafra.

Au début de ce mois, le chef d’état-major de l’IAF, l’air marshal K S Bhadauria s’est rendu aux Émirats arabes unis [ainsi qu’en Israël] afin de renforcer davantage la coopération bilatérale en matière de défense. Celle avec la force aérienne émiratie est déjà relativement importante. Outre la participation indienne à l’exercice Desert Flag, rappelle India Today, ce sont des A330 MRTT émiratis qui assurent le ravitaillement en vol des Rafale au moment de leur transfert de France vers l’Inde.

Outre les Émirats arabes unis, New Delhi cherche aussi à approfondir ses liens militaires avec Riyad, en particulier dans le domaine naval. Ainsi, l’Indian Navy et la marine saoudienne vont organiser leur premier exercice conjoint, appelé « Al Mohed Al Hindi ».

À cette fin, et après avoir pris part aux manoeuvres « Zayed Talwar » organisée par la marine émiratie [voir photo ci-dessus], le « destroyer » indien INS Kochi est arrivé à Al-Jubayl [Arabie Saoudite].

Les objectifs d’Al Mohed Al Hindi n’ont pas été précisés, si ce n’est indique la Saudi Gazette, qu’il « comprend un certain nombre d’exercices à terre et en mer entre les deux marines amies ». Et d’estimer que ces manoeuvres « annoncent un nouveau chapitre dans les relations bilatérales de défense » entre l’Inde et l’Arabie Saoudite.

Pour rappel, mis en service en 2015, l’INS Kochi est le second navire de la classe Kolkata. Affichant un déplacement de 7’400 tonnes pour une longueur de 163 mètres, ce « destroyer lance-missiles furtif » de conception locale est notamment armé d’un canon Oto-Melara Compact SR de 76 mm, de quatre systèmes de défense anti-missile AK-630, de 16 cellules pour missiles de croisière supersoniques BrahMos, de 32 cellules pour missiles surface-air Barak 8 et de tubes lance-torpilles de 533 mm.

Selon le journal « Times of India« , ces manoeuvres avec l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis pourraient faciliter la commande par ces deux pays de missiles BrahMos ainsi que celle de missiles de défense aérienne Akash. En outre, poursuit-il, Riyad et Abu Dhabi seraient intéressées par des « co-entreprises d’armement » en Inde.

Cela étant, on aurait pu penser que la question du statut du Jammu et Cachemire, État indien à majorité musulmane qui a perdu en grande partie son autonomie, allait compliquer les relations de l’Inde avec l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis. Or, il n’en est manifestement rien.

« L’Arabie saoudite et les Émirats ont souligné que les questions incriminées notamment par la Turquie, l’Iran, la Malaisie – autant de rivaux des pays arabes pour le leadership du monde musulman – relevaient de la politique intérieure de l’Inde. Depuis 2015, et le refus du Pakistan d’aider Riyad militairement dans sa lutte contre les « suppôts » de l’Iran au Yémen, les Saoudiens et les Émiratis se sont éloignés d’Islamabad et rapprochés de New Delhi », expliquent Haider Abbas et Christophe Jaffrelot, dans un article publié par l’Institut Montaigne.

Et d’ajouter : « Ce changement s’explique aussi en partie par des considérations économiques, comme en témoignent les énormes investissements [dans le raffinage du pétrole notamment] annoncés par le prince saoudien Mohammed Ben Salman lors de sa visite en Inde en 2019. A noter que suite à l’arrêt de ses importations de brut iranien, l’Inde s’est tournée vers l’Arabie saoudite qui est devenu son deuxième fournisseur, derrière l’Irak, en 2019 ».

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]