Le Maroc discute de l’achat d’au moins deux frégates multimissions de plus avec l’italien Fincantieri

Au début des années 2000, la France et l’Italie lancèrent conjointement le programme FREMM [Frégate européenne multi-missions], lequel donna lieu à deux navires différents. En effet, côté français, la maîtrise d’oeuvre fut confiée à Naval Group [DCNS à l’époque] tandis que, côté italien, le consortium Orizzonte Sistemi Navali, réunissant alors Fincantieri et Finmeccanica, fut désigné pour tenir ce rôle.

Au départ, la Marine nationale devait recevoir 17 FREMM de classe Aquitaine. Seulement, cette ambition fut révisée à la baisse par la Loi de programmation militaire 2009-2014, inspirée par le Livre blanc sur la Défense et la sécurité nationale [LBDSN] de 2008. Ainsi, la cible fut réduite à seulement 11 unités.

Même chose lors de la LPM suivante, le nombre de navires commandés ayant été réduit à 8, au profit du programme de « Frégate de taille intermédiaire » [FTI, devenu depuis FDI pour Frégate de défense et d’intervention]. Résultat : selon la Cour des comptes, ces réductions de commande ont mécaniquement fait grimper le coût unitaire de ces navires [+67%].

Cela étant, la décision prise en 2015 était notamment dictée par des enjeux industriels étant donné que Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, avait expliqué qu’il s’agissait de renforcer « l’offre française à l’export », avec un navire « complémentaire du produit FREMM ». Et d’ajouter : « L’enjeu est aussi de pouvoir nous différencier au plan technologique, d’ici dix ans, d’une concurrence mondiale concentrée sur le créneau des frégates de taille intermédiaire, avec le lancement de projets similaires en Espagne, Italie, et Allemagne notamment ».

Le pari est-il gagnant? On ne peut pas le dire pour le moment… En revanche, il apparaît que la stratégie suivie par l’Italie donne des résultats. Jusqu’alors, le modèle français de FREMM s’est exporté au Maroc [premier client étranger, ndlr] et en Égypte, ces deux pays ayant chacun une unité.

Or, pour renforcer ses forces navales, Le Caire s’est tourné vers Fincantieri [par associé à Naval Group au sein de la co-entreprise Naviris, ndlr] pour acquérir deux FREMM « Carlo Bergamini ». Et comme il fallait apparemment faire vite, les deux navires ont été prélevés sur la dotation de la Marine Militare, qui doit en compte dix au total.

Et, désormais, le Maroc envisage de faire comme l’Égypte. C’est, en tout cas, ce qu’affirme la presse transalpine, qui, depuis quelques jours, évoque la commande de deux FREMM de plus auprès de Fincantieri.

« Face à toutes les menaces possibles qui peuvent venir de la terre ou de la mer, le Maroc doit être prêt à réagir. Par conséquent, le renforcement de la défense du littoral est une tâche essentielle face aux tendances hégémoniques de certains voisins », a expliqué Khalid Chiat, professeur à l’université Mohammed I d’Oujda, au magazine italien Formiche.

Aussi, citant des sources « proches du dossier, l’agence Nova relève que le royaume chérifien « s’intéresse beaucoup à la FREMM italienne, surtout après une importante commande passée par les États-Unis, ce qui représente une carte de visite phénoménale pour le groupe dans le monde ».

En effet, en 2020, l’US Navy a retenu un modèle inspiré de la classe Begamini pour son programme de frégate FFG(X). Ainsi, Fincantieri Marinette Marine [FMM], la filiale américaine du groupe italien, aura à construire 10 navires dans un premier temps, pour environ 5,5 milliards de dollars.

Et, en juin dernier, Fincantieri a communiqué sur la volonté de l’Indonésie de se procurer six FREMM appartenant à la classe Bergamini. Au total, et si la vente au Maroc se confirme, le constructeur italien aura vendu 30 unités de ce type de navire, dont dix à la Marine Militare.

Et ce n’est sans doute pas fini… puisque Fincantieri est en lice pour le marché grec [en concurrence avec son partenaire Naval Group, qui a proposé la Frégate de défense et d’intervention] et lorgne sur le Canada, où la flambée des coûts du programme « Global Combat Ship », pour lequel BAE Systems et Lockheed-Martin ont été retenus avec la frégate de type 26, fait quelques vagues. Au point que, selon le site spécalisé Rivista Italiana Difesa, Ottawa aurait demandé des renseignements à Fincantieri. L’effet « US Navy » n’y serait pas étranger…

Photo : FREMM Carlo Margottini – Piergiuliano Chesi, CC BY 3.0

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