La Pologne confirme l’achat de 250 chars américains M1A2 SEPv3 Abrams pour 5 milliards d’euros

Pour le groupe franco-allemand KNDS, formé par Nexter et Krauss-Maffei Wegmann, la Pologne aurait pu être un premier débouché pour « Enhanced Main Battle Tank » [E-MBT], un char reprenant le châssis du Leopard 2 et la tourelle du Leclerc.

« Composé de technologies éprouvées, le EMBT est une réponse à court-terme au besoin opérationnel du marché en matière de chars de combat de haute intensité. En assemblant un châssis, certifié MLC70, et une tourelle légère opérée par seulement 2 membres d’équipage au lieu de 3, le EMBT rassemble le meilleur en matière de char de combat, avec un potentiel de croissance exceptionnel [environ 6t] qui permet d’intégrer de nombreuses évolutions », fit en effet valoir Nexter, lors de la présentation de cet engin, à l’occasion de l’édition 2018 du salon d’EuroSatory.

Une décision en faveur de cet EMBT aurait eu d’autant plus de sens que l’armée polonaise dipose déjà de 250 chars Leopard 2. Au-delà des considérations capacitaires, elle aurait permis d’éviter des surcoûts en matière de Maintien en condition opérationnelle [MCO]. Mais tel n’a pas été le choix de Varsovie.

La semaine passée, un rumeur indiquait que la Pologne envisageait l’achat de 250 chars américains M1A2 SEPv3 Abrams afin d’en équiper quatre bataillons blindés. Le montant d’une telle commande était alors estimé à un plus de quatre milliards d’euros au maximum.

Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que ce qui passait une rumeur devienne une information confirmée. En effet, ce 14 juillet, lors d’une conférence de presse donnée à l’état-major de la 1ere brigade blindée, Jarosław Kaczyński, vice-président du Conseil des ministres polonais, en charge des questions de sécurité, et Mariusz Błaszczak, le ministre de la Défense, ont annoncé l’achat prochain de 250 chars Abrams pour 23,3 milliards de zlotys [soit un peu de 5 milliards d’euros]. Cette somme comprend également la fourniture de véhicules de soutien et d’un important stock de munitions ainsi que des prestations en matière de formation.

« Nous avons une très bonne nouvelle pour […] notre armée. Dans peu de temps, si tout se passe bien, l’année prochaine, elle sera enrichie d’un grand nombre de chars Abrams parmi les plus modernes du moment », a ainsi déclaré M. Kaczyński. Et d’ajouter qu’il y aura « suffisamment de ces chars pour équiper au moins quatre bataillons, ce qui est plus que nécessaire pour créer une brigade, donc une force sérieuse de côté de la Vistule ».

« Nous suivons le principe que quiconque veut la paix doit se préparer à la guerre. Eh bien, nous voulons la paix, mais en cas de malheur, notre défense sera plus forte », a encore fait valoir M. Kaczyński.

De son côté, M. Błaszczak a expliqué que Varsovie allait commander des chars « conçus comme un contrepoids aux chars russes T-14 Armata les plus modernes » et que les premières livraisons commenceraient « à partir de l’année prochaine ».

« Nous renforçons donc très rapidement les capacités de défense de la Pologne » et cette commande est une « réponse aux défis auxquels nous sommes confrontés en matière de sécurité internationale, et notre tâche étant de dissuader un agresseur potentiel ».

« Nous savons tous où se trouve cet agresseur et quelles menaces sont potentiellement possibles. C’est donc une réponse rapide et décisive à ces menaces », a insisté le ministre polonais de la Défense, sans nommer explicitement la Russie.

Enfin, le financement de cette acquisition de chars Abrams ne sera pas supporté par le budget de la Défense dans la mesure où il doit bénéficier de crédits extra-budgétaires, sur la base d’une « résolution séparée du Conseil des ministres ».

Conçu par General Dynamics Land System [GDLS], le M1A2 SEPv3, utime version de l’Abrams, dispose d’une protection renforcée, d’un nouvelle architecture informatique, d’un dispositif d’armes télécommandées [CROWS pour Common remotely operated weapon system], de capteurs optroniques dernier cri, du système contre-IED CREW Duke V3 et d’une conduite de tir améliorée. Mais le revers de la médaille est sa masse, qui dépasse les 70 tonnes. D’où, d’ailleurs, une motorisation plus adaptée…

Mais cette masse importante n’est pas sans poser de problèmes, même à l’US Army, comme l’a souligné un récent rapport du bureau des évaluations et des tests du Pentagone [DOT&E]. En outre, sa consommation importante en carburant suppose des contraintes logistiques supplémentaires. « En cas d’hostilités, cela pourrait signifier que nos chars deviendraient inutiles à la moindre interruption de l’approvisionnement en carburant », a ainsi relevé le site polonais WP Tech.

Photo : US Army

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