Les députés allemands n’ont pas voulu signer de chèque en blanc pour la poursuite du programme SCAF

Ce 23 juin, les membres de la commission des Finances du Bundestag [chambre basse du Parlement allemand] devait voter une enveloppe de près de 4,5 milliards d’euros pour la période 2021-27 afin de financer la contribution allemande au Système de combat aérien du futur, un programme d’armement dirigé par la France et impliquant l’Espagne. Et cela, après des semaines de tensions autour de la phase 1B du projet, avec des discussions difficiles entre les industriels concernés [dont Dassault Aviation et Airbus], notamment au sujet de la répartition des charges de travail et de la propriété intellectuelle.

De tous les projets lancés en 2017 par Paris et Berlin, seul le SCAF aura été inscrit à l’ordre du jour du Bundestag. Faute d’accord entre les industriels impliqués, le MGCS [Main Ground Combat System – char du combat du future, dirigé par l’Allemagne] a dû passer son tour et bien malin qui peut dire ce qu’il deviendra après les élections fédérales allemandes de septembre prochain. Quant MAWS [Maritime Airborne Warfare System, patrouille maritime], il est à craindre qu’il ne soit mort-né… Et la modernisation des hélicoptères d’attaque Tigre [standard Mk3], elle souffre des tergiversations allemandes…

Quoi qu’il en soit, et après un accord sur le financement des études préliminaires et la phase 1A [obtenu en février 2020, ndlr], le SCAF devait donc à nouveau obtenir le feu vert des députés allemands pour avancer. Et l’affaire s’annonçait compliquée au regard des critiques et des réserves formules à son endroit par l’Office fédéral des équipements, des technologies de l’information et du soutien en service de la Bundeswehr [BAAINBw], qui a dénoncé la part faire à l’industrie française dans ce programme, ainsi que par la Cour des comptes allemande [Bundesrechnungshof].

En outre, si la phase 1B du SCAF a fait l’objet d’un accord de principe entre les trois États concernés, les députés allemands auraient souhaité disposer de « l’accord final avec l’industrie » avant de se prononcer. Or, ce dernier n’a pas encore été conclu.

Finalement, au regard des enjeux politiques et industriels, le comité des Finances du Bundestag n’a pas mis un coup d’arrêt brutal au SCAF, comme certains pouvaient le redouter. En revanche, il a refusé de débloquer la totalité des fonds demandés, le ministère allemand de la Défense devant se contenter, dans un premier temps, de 1,3 milliard d’euros. Le reste suivra que si certaines conditions sont remplies.

« Malgré des critiques justifiées, nous continuons à soutenir ce programme, qui est un élément central de la capacité de défense souveraine de l’Union européenne. Afin de permettre la recherche et le développement du projet, nous débloquons maintenant le budget nécessaire. Pour toutes autres obligations financières, cependant, et contrairement à ce qu’elle a demandé, la ministre devra de nouveau obtenir l’approbation de la commission du Budget », a expliqué le député social-démocrate Dennis Rohde. En clair, la suite dépendra de la couleur politique de la prochaine coalition gouvernementale qui sortira des urnes en septembre.

La commission a d’abord rappelé que les conditions posées en février 2020 lors du vote relatif à la phase 1A n’avaient pas toutes été respectées, comme, par exemple, celle consistant à faire avancer en même temps les programmes SCAF et MGCS.

En outre, les députés allemands ont relevé que, « jusqu’à présent, ni l’étude de concept ni la phase 1A n’ont pu être achevées, de sorte qu’aucun résultat concluant n’est disponible pour être inclus dans la phase 1B ».

Aussi, ils appellent leur gouvernement à « soumettre l’accord final à la commission du Budget pour information » et à prendre immédiatement des mesures pour s’assurer que les projets SCAF et MGCS se déroulent en même temps ». En outre, ces parlementaires demandent que le programme soit transféré à « une organisation internationale » [l’OCCAr?] et que les « réglementations concernant l’exploitation ultérieure des résultats des activités conjointes d’étude et de recherche soient adaptées de manière à ce que les droits d’utilisation soient accordés quel que soit le projet. »

Ce dernier point avait été soulevé par la Cour des comptes allemandes, cette dernière ayant critiqué le fait que l’Allemagne ne pouvait pas, en l’état actuel des choses, utiliser les résultats des études menées dans le cadre du programme sans obtenir préalablement l’accord des deux autres pays partenaires.

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