Crimée : La marine russe dit avoir tiré des coups de semonce vers un navire de la Royal Navy; Londres dément

Alors que les F-35B du porte-avions HMS Queen Elizabeth viennent d’effectuer leurs premières missions de combat depuis la Méditerranée orientale, au profit de la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis, deux navires du groupe aéronaval britannique [le Carrier Strike Group 21] ont été déployés en mer Noire.

Ainsi, le « destroyer » de type 45 HMS Defender et la frégate HMNLS Evertsen ont accosté au port ukrainien d’Odessa, le 18 juin. La suite de leur mission est pour le moins obscure.

En effet, selon les données transmises par le Système d’identification automatique [Automatic Identification System – AIS], qui permet de surveiller le trafic maritime, les deux navires auraient ensuite quitté Odessa pour mettre le cap vers Sébastopol [Crimée], qui abrite l’état-major de la flotte russe de la mer Noire. Or, ni le HMS Defender, ni le HMNLS Evertsen n’avaient quitté le port ukrainien au moment où leur présence avait été signalée près de la Crimée…

Et, ce 23 juin, le mystère s’est encore épaissi étant donné que, selon le dernier relevé de l’AIS, le « destroyer » britannique [code d’identification : IMO 4907878] se trouverait actuellement dans golfe Persique… alors qu’il n’a pas quitté la mer Noire. En revanche, les données concernant la frégate néerlandaise sont cohérentes, le HMNLS Evertsen [code d’identification : MMSI 244942000] étant localisé en mer de Marmara.

Cela étant, le HMS Defender n’a certainement pas quitté la mer Noire étant donné qu’il aurait été visé par des tirs de semonce de la marine russe, alors qu’il naviguait près de la Crimée. C’est en effet ce qu’affirme l’état-major russe, ce 23 juin.

Selon la version livrée par Moscou, le navire britannique serait aventuré dans les eaux entourant la Crimée à 11h52. Puis, n’ayant pas réagi aux injonctions russes, un patrouilleur a procédé à des tirs d’avertissement entre 12h06 et 12h08. Tirs n’ont eu aucun effet puisqu’un bombardier tactique Su-24 Fencer a ensuite largué quatre bombes à fragmentation de type OFAB-250 sur sa trajectoire pour le contraindre à faire demi-tour. Ce qu’il a fait à 12h23. L’incident s’est déroulé au niveau du cap Fiolent, au sud de Sébastopol.

Pour rappel, via la résolution 68/262 de l’Assemblée générale des Nations unies, la communauté internationale n’a pas reconnu l’annexion de la Crimée par la Russie. Aussi, l’envoi du « destroyer » britannique dans les eaux de la péninsule aurait été un moyen de le rappeler, comme c’est le cas des opérations de liberté de navigation [FONOP] régulièrement effectuée en mer de Chine méridionale, près d’îlot revendiqués par Pékin.

Seulement, le ministère britannique de la Défense [MoD] a contesté la version de Moscou. « Aucun coup de semonce n’a été tiré » sur le HMS Defender, qui effectuait « un passage inoffensif dans les eaux territoriales ukrainiennes conformément au droit international », a-t-il assuré. « Nous pensons que les Russes se préparaient à un exercice d’artillerie en mer Noire et qu’il en ont averti la communauté maritime. Aucun tir n’a été dirigé vers le HMS Defender et nous ne reconnaissons pas l’affirmation selon laquelle des bombes ont été larguées sur son passage », a-t-il insisté.

À Kiev, le ministre des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, a immédiatement réagi à l’annonce de cet incident. « Les actions agressives et provocatrices de la Russie dans les mers Noire et d’Azov, son occupation et sa militarisation de la Crimée constituent une menace durable pour l’Ukraine et ses alliés », a-t-il fait valoir.

Quoi qu’il en soit, ce n’est pas la première fois que la Russie prétend avoir chassé un navire britannique de ses eaux territoriales. En mai dernier, Moscou avait donné les détails concernant l’interception du destroyer britannique HMS Dragon, qui aurait été effectuée par sa garde-côtière lors de l’un de ses déploiments en mer Noire durant l’automne 2020.

« Le 13 octobre 2020, malgré les avertissements sur l’inadmissibilité de l’entrée dans les eaux territoriales de la Russie, le destroyer D35 Dragon de la Royal Navy a traversé la frontière russe près du cap Kherson dans la mer Noire, profitant d’un droit de passage inoffensif. À la demande de quitter les eaux territoriales, le capitaine a déclaré avoir mal reçu le signal. Grâce aux actions conjointes de gardes-frontières du FSB, de la Marine russe et des Forces aérospatiales russes, le navire a été expulsé vers les eaux neutres », raconta Vladimir Koulishov, chef de la garde-côtière russe, à Sputnik.

Cette version des faits a ensuite été démentie par Londres. « La marine de la Fédération de Russie n’a pas entravé le passage du HMS Dragon, qui a navigué sans incident, exerçant ainsi notre droit de passage inoffensif en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer », avait répondu le ministère britannique de la Défense.

Photo : HMS Defender © Marine nationale

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