Pour l’Otan, la Chine présente des « défis systémiques »; Pékin dénonce une « exagération »

Dans le communiqué conjoint publié à l’issue du sommet de Bruxelles par les chefs d’État et de gouvernement des trente pays membres de l’Otan, la Russie est citée à cinquante reprises. Et sur les 79 paragraphes du texte, une douzaine lui sont consacrés, en grande partie pour détailler les « menaces » et les « défis » qu’elle présente.

Ainsi, le communiqué dénonce en particulier les « activités provocatrices » de la Russie, « notamment à proximité des frontières de l’Otan », ainsi que ses « exercices d’alerte de grande envergure organisés dans préavis », le « renforcement de sa présence militaire en Crimée », le « déploiement de missiles à double capacité » [les Iskander, ndlr] à Kaliningrad, l’intégration militaire avec la Biélorussie, « les violations répétées de l’espace aérien de pays membres » de l’Alliance ainsi que sa « posture d’intimidation stratégique plus agressive » via son arsenal nucléaire.

Cependant, les membres de l’Otan disent toujours souhaiter une « relation constructive avec la Russie, lorsque ses actions le permettront ». La même formule avait été utilisée dans la déclaration finale publiée à l’issue du sommet de l’Alliance organisé à Londres en décembre 2019… Pour rappel, et pour la première fois, ce texte avait évoqué la « l’influence croissante et les politiques internationales de la Chine », présentées « à la fois » comme des « opportunités et des défis » auxquels les Alliés devaient « répondre ensemble ».

Depuis, la Chine figure « en bonne place sur l’agenda de l’Otan », comme l’avait souligné Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’organisation, en juin 2020. La semaine passée, ce dernier s’était inquiété de la proximité entre Moscou et Pékin, vue comme étant une « nouvelle source de dangers » pour l’Alliance, notamment en raison des investissements chinois dans les infractructures de transport et de télécommunications en Europe.

Aussi, et comme on pouvait s’y attendre, la Chine fait l’objet d’une attention toute particulière lors du sommet de Bruxelles. Ses « ambitions déclarées […] et son assertivité présentent des défis systémiques pour l’ordre international fondé sur des règles et dans des domaines revêtant de l’importance pour la sécurité de l’Alliance », est-il affirmé dans le communiqué final. « Nous sommes préoccupés par celles des politiques coercitives qui ne correspondent pas aux valeurs fondamentales inscrites dans le traité de Washington », font également savoir les Alliés.

« La Chine accroît rapidement son arsenal nucléaire, se dotant d’un plus grand nombre d’ogives et de vecteurs sophistiqués pour établir une triade nucléaire », est-il aussi souligné dans le texte. Ce qui confirme l’évalution récemment faite par l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm [Sipri], pour qui Pékin aurait augmenté la taille de son arsenal nucléaire de 20% en deux ans.

Les Alliés ont en outre critiqué « l’opacité » de la Chine dans « la mise en œuvre de la modernisation de son appareil militaire et dans celle de sa stratégie de fusion militaro-civile publiquement déclarée », tout en soulignant sa coopération avec la Russie dans le domaine militaire, « notammant en participant des exercices russes dans la zone euro-atlantique. »

« Nous restons préoccupés par le fait que la Chine manque souvent de transparence et a fréquemment recours à la désinformation. Nous appelons la Chine à respecter ses engagements internationaux et à agir de manière responsable au sein du système international, notamment dans les milieux spatial, cyber et maritime, en conformité avec son rôle de grande puissance », lit-on encore dans le communiqué.

Cela étant, les membres de l’Otan disent vouloir maintenir un « dialogue constructif avec la Chine lorsque cela est possible ».

« Sur la base des intérêts qui sont les nôtres, nous voyons d’un œil favorable les possibilités d’interagir avec la Chine sur des questions revêtant de l’importance pour l’Alliance et sur des défis communs, tels que le changement climatique’, assurent-ils, avant d’exhorter Pékin « à s’investir de manière substantielle dans le dialogue, dans le développement de la confiance, et dans des mesures de transparence concernant ses capacités et sa doctrine nucléaires ».

Pour le moment, l’Otan évite de parler de « menace » à propos de la Chine, préférant plutôt évoquer les « défis systémiques » que cette dernière incarne. Seulement, à Pékin, cela revient au même…

Ainsi, l’ambassade de Chine auprès de l’Union européenne a réagi à ce communiqué en accusant l’Otan d’exagérer « la théorie de la menace chinoise » et de montrer une « mentalité de guerre froide » en cherchant à « créer artificiellement des confrontations ». Et d’estimer que l’expression « défi systémique calominie l’évolution pacifique » du pays.

Pourtant, peu avant cette réaction chinoise, M. Stoltenberg avait pris soin d’expliquer que la « Chine n’est pas notre adversaire, notre ennemie » mais que « nous devons faire face aux défis qu’elle pose pour notre sécurité ».

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