Le ministère allemand de la Défense n’a pas de garanties sur le financement du SCAF et du MGCS

La semaine passée, il a été rapporté que la France, l’Allemagne et l’Espagne venaient de trouver un « accord général » sur la phase 1B du programme SCAF [Système de combat aérien du futur], laquelle vise à mettre au point un démonstrateur. Cependant, il restait encore à établir une « liste » devant préciser quels seraient les droits de propriété intellectuelle devant être « ouvert à tous » et ceux censés rester « au sein des entreprises concernées. »

Ces discussions avaient été précédées par un bras de fer entre Dassault Aviation et Airbus, le premier exigeant d’avoir toute la latitude nécessaire pour pouvoir tenir son rôle de maître d’oeuvre pour l’avion de combat qui sera au centre du SCAF. A priori, l’industriel français a eu gain de cause sur les sujets qui lui tenaient à coeur. Reste à voir comment le Parlement allemand accueillera l’accord une fois qu’il sera finalisé…

En réalité, il reviendra au comité des Finances du Bundestag [chambre basse du Parlement allemand] de valider ou non cet accord. Outre-Rhin, les députés ont leur mot à dire dès lors qu’un investissement est supérieur à 25 millions d’euros. Ce qui sera le cas pour la phase 1B du SCAF, dont le coût devrait être de l’ordre de 4 milliards d’euros.

Or, sur ce point justement le ministère allemand de la Défense n’a, pour le moment, aucune garantie sur le financement du SCAF, mais aussi sur le MGCS [Main Ground Combat System, char franco-allemand du futur, ndlr] ainsi que sur d’autres programmes majeurs, comme celui concernant le renouvellement des avions de patrouille maritime P3C Orion de la Deutsche Marine. En clair, le Bundestag aura à signer un chèque en blanc… Et rien ne dit qu’il acceptera de le faire.

En effet, selon un document « confidentiel » du ministère allemand de la Défense auquel l’agence Reuters a eu accès, plusieurs projets d’équipement d’une valeur totale de plusieurs milliards d’euros « risquent d’être abandonnés car le budget nécessaire n’a pas encore été obtenu ». Ce que confirme le site spécialisé « Augen geradeaus! », qui donne la liste des projets ainsi menacés.

Ainsi, outre le SCAF, le MGCS et les avions de patrouille maritime, la liste comprend notamment le projet de sous-marins U212CD [mené avec la Norvège], l’achat de nouveaux navires de renseignement électronique pour remplacer ceux de la classe Alster, le renouvellement des moyens de recherche du WTD71 [spécialisé dans la technologie navale], l’acquisition de pétroliers-ravitailleurs pour la Deutsche Marine ou encore le développement des capteurs du programme PEGASUS.

« Il paraît un peu étonnant que le ministère de la Défense remette ainsi en question des projets multinationaux jusque-là considérés comme sûrs », écrit « Augen geradeaus! ».

À noter que d’autres programmes, également importants, ne sont pas concernés. Tel est le cas du remplacement des chasseurs-bombardiers PANAVIA Tornado par des F/A-18 Super Hornet et des E/A-18 Growler, ces appareils étant indispensables à la Bundeswehr pour assurer les missions nucléaires et de guerre électronique de l’Otan.

Dans ce document, le ministère souligne que ces « problèmes de financement sont la conséquence de la forte baisse du budget [de la Défense] à partir 2022, comme le prévoit la planification budgétaire fédérale. »

Effectivement, annoncé en progression de 5% en 2022, pour atteindre 49,29 milliards d’euros, le budget de la Bundeswehr devrait significativement diminuer par la suite, le plan du ministère allemand des Finances ayant prévu de lui affecter 46,3 milliards en 2023, puis 46,1 milliards en 2024 et 45,6 milliards en 2025. Cette trajectoire financière sera sans doute corrigée par la coalition gouvernementale qui sortira des urnes, en septembre prochain… Mais rien ne dit que cette correction se fera à la hausse.

Quoi qu’il en soit, pour financer les projets en cours, l’actuelle ministre allemande de la Défense, Annegret Kramp-Karrenbauer, avait dit espérer un budget de 61,5 milliards en 2025… « C’est pourquoi les prochaines négociations pour former une coalition seront cruciales. En cela, les grands projets d’armement doivent être sécurisés pour l’avenir. La sécurité est une mission centrale pour l’ensemble du gouvernement », a-t-elle récemment fait valoir, dans un entretien donné à RedaktionsNetzwerk Deutschland.

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