Le SNA Émeraude et le BSAM Seine ont terminé leur mission d’intérêt stratégique dans l’Indo-Pacifique

Généralement, une mission en mer dure entre trois et quatre mois. Celle que viennent d’accomplir le sous-marin nucléaire d’attaque [SNA] Émeraude et le Bâtiment de soutien et d’assistance métropolitain [BSAM] « Seine », appelée « Marianne », aura duré deux fois plus longtemps.

Ayant appareillé de Toulon en septembre 2020, les deux navires de la Marine nationale ont mis le cap vers le canal de Suez, puis traversé la mer Rouge et l’océan Indien pour arriver, en novembre, à Perth, en Australie. Ils ont ensuite fait une escale à la base navale américaine implantée à Guam, où leurs équipages ont été relevés, grâce au concours d’un avion de transport A400M de l’armée de l’Air & de l’Espace.

Puis l’Émeraude et la Seine ont continué leur périple en mer de Chine méridionale [revendiquée par Pékin], transité par le détroit de la Sonde, entre les îles indonésiennes de Java et Sumatra, avec la frégate de surveillance Vandémiaire, avant de prendre le chemin du retour et de rencontrer le groupe aéronaval du porte-avions Charles de Gaulle dans l’océan Indien. Les deux bâtiments ont retrouvé Toulon le 7 avril, après 199 jours de mer et parcouru 30.000 nautiques, soit 1,3 fois le tour du monde.

En temps normal, les déploiements des SNA ne font l’objet d’aucune publicité. Or, il en a été tout autrement avec la mission Marianne étant donné que l’on a pu en suivre les grandes étapes sur les réseaux sociaux. Le président Macron l’a même évoquée lors de ses voeux aux Armées, en janvier. Et la ministre des Armées, Florence Parly, a annoncé la fin de la patrouille de l’Émeraude et de la Seine en mer de Chine méridionale un mois plus tard.

Si l’envoi d’un SNA français dans la région Asie-Pacifique n’a rien d’inédit, cela faisait toutefois près de 20 ans qu’une telle mission n’avait pas eu lieu. Le dernier sous-marin à s’y être aventuré était en effet le SNA Perle, en 2002…

Cette longue absence dans cette zone stratégique avait plusieurs raisons. Certes, le nombre de SNA opérationnels étant limité à six [et à cinq actuellement, après l’incendie de la Perle], les missions de surveillance des approches maritimes, de renseignement près des zones d’intérêt proches [en Méditerranée, notamment], de sûreté des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] et d’escorte du groupe aéronaval sont évidemment prioritaires.

Mais, surtout, le retrait des Bâtiments de soutien mobile [BSM] et du Bâtiment Atelier Polyvalent [BAP] Jules Verne durant les années 2000, ne permettait plus d’assurer le soutien indispensable pour permettre aux SNA de patrouiller à 15.000 km des côtes métropolitaines. La mise en service des quatre BSAM, à partir de 2018, a changé la donne… et donc rendu possible la mission Marianne, qui a mobilisé également les moyens de la Direction interarmées des réseaux d’infrastructures et des systèmes d’information [DIRISI].

La mission Marianne, « rythmée par de nombreuses interactions avec des nations partenaires témoigne de la forte interopérabilité et du haut niveau de confiance que la Marine développe avec ses partenaires dans le Pacifique », a souligné la Marine nationale, rappelant les exercices auxquels le SNA Émeraude et le BSAM Seine ont participé, aux côtés des forces navales australiennes, américaines, japonaises et indonésiennes.

Et d’ajouter : « C’est également une aventure humaine et un défi logistique inédits démontrant l’engagement et le haut niveau de compétence de nos marins. 150 sous-mariniers et 50 marins des forces de surface ont été engagés grâce à une relève en cours de mission. »

« Le SNA Émeraude et le BSAM Seine reviennent aujourd’hui [7 avril] de près de 7 mois de déploiement dans les océans Indien et Pacifique. Fierté légitime des 4 équipages, de leurs états-majors, des services de soutien militaires et industriels, d’avoir construit ce succès », a par ailleurs commenté l’amiral Pierre Vandier, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], qui a fait le déplacement à Toulon pour accueillir les deux navires.

Cela étant, ce déploiement n’avait pas le renforcement des coopérations pour seul objet. Il s’est agi de mettre à jour les connaissances que la Marine nationale [mais pas seulement…] possède de cette zone… Et d’en acquérir de nouvelles.

« Concernant la mission Marianne, nous avons exploité ce déploiement pour mettre à jour nos connaissances sur une zone qui est associée à des enjeux multiples et croissants. Je souligne la coopération avec nos alliés américains de INDOPACOM [United States Indo-Pacific command] à cette occasion », a ainsi répondu le général Jean-François Ferlet, le Directeur du renseignement militaire [DRM], à une question posée lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le 9 mars dernier. Et les députés n’ont pas eu d’autres précisions [du moins, selon le compte-rendu qui en a été fait].

Interrogé au sujet de la patrouille en mer de Chine méridionale par le quotidien Var Matin, qui souhaitait savoir le sous-marin français s’y était aventuré en mode « furtif » et s’il avait croisé des navires militaires chinois, l’un des deux pachas de l’Émeraude a botté en touche. « Pas de commentaire », a-t-il dit. Même si elle a été médiatisée, la mission Marianne garde cependant ses secrets.

Photo : Marine nationale

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