Le gouvernement suédois exclut une adhésion à l’Otan

Depuis qu’elle a rejoint le programme de Partenariat pour la paix [PPP] en 1994 et qu’elle participe, à ce titre, au processus de planification et d’examen [PARP], la Suède n’a cessé de renforcer sa coopération avec l’Otan, sans toutefois jusqu’à l’adhésion.

Ainsi, ce pays neutre est devenu membre du Conseil de partenariat euro-atlantique en 1997, puis il a été désigné comme « partenaire – nouvelles opportunités », dans le cadre de l’initiative pour l’interopérabilité. Enfin, il adhère au Concept de capacités opérationnelles [OCC] de l’Otan.

Or, depuis l’annexion de la Crimée par la Russie et l’intensification des activités militaires russes dans la région de la Baltique ainsi que dans celle du Grand Nord, le débat sur une éventuelle adhésion à l’Otan a pris de la vigueur à Stockholm.

En attendant, le gouvernement suédois a revu sa politique de défense, ce qui s’est traduit notamment par la remilitarisation d’île de Götland [le « porte-avions » de la Baltique], la réactivation de certaines unités, le retour du concept de défense totale ou encore par une hausse significative des dépenses militaires.

Dans le même temps, la Suède a renforcé ses coopérations militaires avec ses voisins nordiques et scandinaves [en particulier avec la Finlande] tout en se rapprochant des États-Unis et du Royaume-Uni, via la Force expéditionnaire commune [Joint Expeditionary Force, JEF] créée par Londres et le programme d’avion de combat de 6e génération « Tempest ».

Cela étant, en décembre 2020, le Riksdag [Parlement] a adopté une « option Otan », ouvrant ainsi la voie à une éventuelle adhésion à l’Alliance. Seuls les partis de la gauche suédoise [sociaux-démocrates et écologistes], actuellement au pouvoir, s’y sont opposés.

Pour les promoteurs de cette « option Otan », il s’agirait de permettre à la Suède de rejoindre l’Alliance dans le cas où le contexte sécuritaire viendrait à se dégrader davantage. Et de bénéficier ainsi de la clause de défense collective définie par l’article 5 du Traité de l’Atlantique-Nord.

Pourtant, l’article 42-7 du Traité de l’Union européenne [dont la Suède est membre], prévoit un mécanisme de défense collective… mais qui n’est pas contraignant… tout en étant flou sur les moyens à mettre en oeuvre en cas d’agression contre l’un des pays membres. En 2018, le président Macron avait proposé de le modifier pour qu’il y ait une « solidarité renforcée quasi-automatique ». Sans succès. « Notre volonté est clairement que l’Europe assume son autonomie stratégique et renforce sa solidarité en matière de défense », avait-il plaidé à l’époque.

Quoi qu’il en soit, et alors que selon une enquête du Pew Research Center, 65% des Suèdois disent avoir un regard positif sur l’Alliance atlantique, il n’est pas question pour leur gouvernement d’aller vers une adhésion à l’Otan. Tel est le message qu’ont fait passer Ann Linde et Peter Hultqvist, respectivement ministres des Affaires étrangères et de la Défense, dans une tribune publiée ce 6 avril par le quotidien Dagens Nyheter.

Ainsi, écrivent-ils, il n’est pas question pour le gouvernement suédois – minoritaire – d’abandonner « sa politique de non-alignement » en rejoignant une alliance militaire comme l’Otan.

« Nous vivons à une époque où nos choix sont très importants. Ils peuvent déterminer notre propre destin et celui des autres à court et à long terme. Le monde qui nous entoure a changé et nous voyons davantage le nationalisme, la croyance en des systèmes autoritaires ainsi que les divisions entre les nations et au sein des nations. Les valeurs démocratiques sont remises en question d’une manière qui aurait été inimaginable il y a à peine quelques années. Ce sont de sérieux défis », ont commencé par expliquer les deux ministres.

Aussi, « à cette époque pleine d’incertitudes, nous avons besoin de stabilité, de perspectives à long terme et de prévisibilité dans la politique de sécurité. Le fait de ne pas conclure d’alliances militaires donne à la Suède la liberté d’agir dans n’importe quelle situation, de la manière qui contribue le mieux à la détente et à une issue pacifique. Et cela garantit à la Suède son indépendance en matière de politique étrangère. Par conséquent, la doctrine de la politique de sécurité du gouvernement reste inchangée », ont ensuite fait valoir Mme Linde et M. Hultqvist.

Pour autant, ont-ils souligné, cela ne veut pas dire que la Suède est isolée dans la mesure où elle « promeut la coopération en matière de défense avec les pays voisins ainsi qu’avec l’Otan. »

« Le lien transatlantique avec les États-Unis est essentiel à la stabilité, le rôle du Royaume-Uni est important. Avec notre partenaire le plus proche, la Finlande, nous avons développé une planification opérationnelle conjointe […]. En développant une synergie, c’est-à-dire la capacité de travailler ensemble, nous créons une base pour une action commune […]. Les exercices conjoints et les échanges d’informations sont ici d’une importance décisive », ont-ils souligné.

Dans ces conditions, M. Hultqvist et Mme Linde estiment qu’ils revient aux partis ayant voté « l’option Otan » de démontrer en quoi cette dernière pourrait profiter à la Suède. Reste qu’il se pourrait bien que cette question fasse partie des enjeux des prochaines élections législatives suédoises, prévues en septembre 2022.

Photo : Forces suédoises lors de l’exercice BALTOPS 2015 – Otan

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