MAWS : La France propose de prêter quatre avions de patrouille maritime Atlantique 2 à l’Allemagne

La semaine passée, la Defense Security Cooperation Agency [DSCA], l’agence chargée des exportations américaines d’équipements militaires dans le cadre du dispositif FMS [Foreign Military Sales] a rendu un avis positif sur la vente à l’Allemagne de cinq avions de patrouille maritime P-8A Poseidon, afin de lui permettre de remplacer les huit P-3C Orion actuellement en service au sein de la Deutsche Marine. Le montant du contrat est estimé à environ 1,5 milliards d’euros.

Ces P-3C Orion devaient être initialement modernisés pour les prolonger leur durée de vie opérationnelle jusqu’en 2030 et attendre ainsi la concrétisation du programme MAWS [Maritime Airborne Warfare System] devant être conduit en coopération avec la France.

Pour rappel, le programme MAWS vise à développer un nouvel avion de patrouille maritime qui serait au centre d’un réseau de capteurs [radars, sémaphores, drones, satellites, etc] ainsi que des capacités accrus en matière de guerre électronique et d’armement anti-navire.

Or, la décision de retirer les P-3C Orion du service d’ici 2025 et l’acquisition éventuelle de P-8A Poseidon ne peuvent que susciter le doute sur les intentions de Berlin au sujet du MAWS… D’autant que, selon l’avis publié par la DSCA, il est question de maintenir la capacité allemande en matière de patrouille maritime pour les « 30 prochaines années ».

Le chef d’état-major de la Bundeswehr, le général Eberhard Zorn, a évoqué ce sujet lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le 17 mars. « En ce qui concerne le MAWS, attendre 2040 ou plus tard, c’est trop long. Nous devons essayer d’avoir les solutions les plus rapides possibles. Le MAWS, évidemment, n’est pas exclu, c’est l’objectif. Mais d’ici que nous l’ayons à disposition, de nombreuses années vont s’écouler », a-t-il dit. Pourquoi a-t-il parlé de 2040 et non de 2030? Mystère…

Plus tard, au cours de la même audition, le général Zorn s’est expliqué sur les achats d’équipements militaires aux États-Unis.

« À propos des matériels que nous achetons aux États-Unis, pour moi, ce qui est très important, c’est d’avoir des capacités […]. Donc, quand nous avons besoin de matériels, qu’est-ce que nous faisons? Eh bien nous regardons ce qui existe sur le marché et ce que nous pouvons acheter tout prêt. Et lorsque nous ne le trouvons pas, nous lançons éventuellement un projet de développement », a-t-il expliqué.

Aussi, quand la Budeswehr a regardé les avions de patrouille maritime disponibles sur le marché, l’Atlantique 2 [ATL2] français n’y était pas… Ce qui n’est plus le cas désormais. En effet, selon le site spécialisé Mer&Marine, Paris a proposé à Berlin de lui prêter quatre appareils de ce type portés au standard 6.

Actuellement, la Marine nationale dispose de 22 ATL2. Et dix-huit d’entre eux doivent être modernisés, les quatre autres étant appelés à servir de « réservoir » à pièces détachées. D’où l’idée de rénover ces derniers afin de les prêter à la Deutsche Marine. Ce qui permettrait à cette dernière d’attendre la mise en service du MAWS.

Pour rappel, le programme de modernisation des ATL2 vise à traiter les obsolescences et de passer au tout numérique. En outre, ce standard 6 comprend l’intégration de nouveaux équipements [capteurs, calculateur tactique, systèmes de renseignement optronique et acoustique, consoles de visualisation des opérateurs, etc]. Et il dispose également du radar à antenne active Searchmaster, fourni par Thales, d’une nouvelle version du logiciel de mission LOTI [Logiciel Opérationnel de Traitement de l’Information], d’un sous-système de traitement acoustique numérique de dernière génération [STAN] et de l’interrogateur IFF TSA2542.

Par ailleurs, la Deutsche Marine a mis en oeuvre, par le passé, le Bréguet Atlantic, « l’ancêtre » de l’ATL2. Le dernier des 20 exemplaires a été retiré du service en 2010. Ces appareils ont été remplacés par les actuels P-3C Orion, acquis d’occasion auprès des Pays-Bas.

Reste maintenant à voir l’accueil que fera le gouvernement allemand à la proposition française. Proposition qui permettrait de répondre à une rupture capacitaire tout en étant peu coûteuse. Un refus serait en tout cas lourd de sens.

Photos :
1/ Vol en formation de 3 Atlantique 2 des flottilles 21F et 23F au dessus des côtes bretonnes – Jean-Philippe Pons / Marine nationale
2/ Adrian Pingston – Domaine public

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