Les forces spéciales insistent pour obtenir des drones MAME et souhaitent se doter de munitions rôdeuses

Lors de l’audition du général commandant les opérations spéciales [GCOS], le général Éric Vidaud, le député Jean-Michel Jacques n’a pas caché son inquiétude au sujet de l’Eurodrone MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance], développé dans le cadre d’une coopération dirigée par l’Allemagne et associant la France, l’Italie et l’Espagne.

Le contrat aurait dû être notifié par les États clients aux industriels [Airbus, Dassault Aviation et Leonardo] à la fin de l’année 2019. Or, il ne l’a toujours pas été, l’armement potientiel de ces appareils ayant fait débat outre-Rhin. Cela étant, ce ne serait qu’une question de semaines, sauf si l’un des pays impliqués renonce au dernier moment [selon La Tribune, l’Espagne serait sur cette voie-là].

Or, selon la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, l’armée de l’Air & de l’Espace [aAE] devrait disposer de cinq systèmes de drones MALE, dont quatre de type MQ-9 Reaper et un de type EuroDrone [ou EuroMale] sur les quatre commandés. Mais, visiblement, ce calendrier ne sera pas tenu…

« Dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM), nous avons consenti au développement d’un drone européen, l’Eurodrone, qui ne devrait apparaître qu’en 2028, voire en 2030. Je ne vous cacherai pas que les années à venir m’inspirent une certaine inquiétude », a ainsi affirmé M. Jacques.

Aussi, a-t-il interrogé le général Vidaud sur « le trou capacitaire qui se dessine, au moins jusqu’à l’entrée en service de l’Eurodrone », soulignant au passage que ce dernier « sera d’ailleurs très lourd » et « moins agile que le Reaper ». D’où sa seconde question : « Correspondra-t-il vraiment à nos besoins? ». Enfin, le député a également demandé au GCOS s’il est possible, « d’ici à l’entrée en service de l’Eurodrone, de développer d’autres types de drones, afin de pouvoir pratiquer le ROEM [Renseignement d’origine électromagnétique].

Le général Vidaud n’a pas répondu au sujet de l’Eurodrone. Ou s’il l’a fait, sa réponse ne figure pas dans le compte-rendu de son audition. Ce qui laisse libre court à toutes les interprétations. En tout cas, il a souligné « l’importance » des drones dans les opérations menées par les forces spéciales.

« Nous utilisons de très nombreux drones de taille et de modèles différents, que ce soit au Levant ou au Sahel », dont, outre les drones MALE, les microdrones et les nanodrones, « dont certains, sont de fabrication française », a fait valoir le GCOS.

Mais s’agissant du segment MALE, a-t-il poursuivi, il « faut bien comprendre que les opérations qui visaient les têtes de chaîne de commandement jihadiste ont été réalisées avec l’appui des drones américains, tant quantitativement que qualitativement » et que « dans une mission qui s’apparente à la recherche d’une aiguille dans une énorme botte de foin, ces drones nous permettent de réduire l’espace de recherche. » Ensuite, a-t-il ajuté, les « images permettent de caractériser la personne visée, que ce soit par son comportement ou les moyens de déplacement qu’elle utilise. »

Cela étant, le Commandement des opérations spéciales ses propres objectifs en matière de drone, dont l’acquisition d’appareils de type MAME [moyenne altitude moyenne endurance], lesquels « offrent souplesse d’emploi, endurance, et l’emport de doubles charges. »

Ce n’est pas la première fois que le COS exprime un tel besoin. Prédécesseur du général Vidaud, l’amiral Laurent Isnard, l’avait fait en 2017. « Les forces spéciales ont besoin d’acquérir une capacité ISR [renseignement, surveillance, reconnaissance, nldr] complémentaire propre. Nous proposons de lancer par conséquent un programme d’acquisition de drone moyenne altitude, moyenne endurance – 100 kilomètres pour six heures de vol –, disposant d’une charge de renseignement d’origine électromagnétique et capable d’emporter des armements de faible charge », avait-il dit à l’époque.

Depuis, le COS s’est découvert d’autres besoins. Et le récent conflit au Haut-Karabakh, où les forces azerbaïdjanaises ont utilisé des munitions rôdeuses [c’est à dire des drones « kamikaze »], a donné matière à réfléchir… Devant les députés, le général Vidaud a ainsi parlé de l’acquisition de « munitions télé-opérées », plus précises et donc d’une efficacité redoutable.

Parmi les autres objectifs, le GCOS a également cité les essaims de drones, les drones sous-marins et terrestres et… les drones à changement de milieu. Voilà de quoi inspirer les PME innovantes qui seront invitées au prochain SOFINS, la salon dédié aux forces spéciales, organisé tous les deux ans au camp de Souge.

N’ayant pas pus avoir lieu en 2020, il devrait se tenir du 29 juin au 1er juillet… ou, en fonction de la situation sanitaire, à l’automne prochain. « Mon objectif est bien de [le] maintenir car il permet des échanges essentiels entre les opérateurs et les concepteurs ; c’est dans le dialogue que nous pouvons exprimer nos besoins et que les TPE-PME peuvent les réaliser », a conclu le général Vidaud.

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