Otan : Les États-Unis parlent d’établir des « relations constructives » avec la Turquie

Bien qu’il a souvent été avancé que l’ex-président Donald Trump, avait une attitude conciliante à l’égard de la Turquie, son administration a toutefois pris des mesures qui n’ont pas manqué de fâcher Ankara, au risque – et c’est une donnée souvent oubliée – de provoquer la fin de l’accès des forces américaines à la base d’Incirlik, qui, dans le cadre de l’Otan, abrite un dépôt de bombes nucléaires B-61.

Ainsi, pour l’acquisition de systèmes russes de défense aérienne S-400, il a été décidé d’exclure la Turquie du programme d’avion de combat F-35A et d’interdire l’attribution de toute licence d’exportation d’équipements militaires américains à la SSB, l’agence du ministère turc de la Défense chargée des approvisionnements. En outre, sous l’ère Trump, les États-Unis ont renforcé leur coopération militaire avec la Grèce et opéré un rapprochement avec la République de Chypre.

Enfin, lors de sa dernière réunion avec ses homologues de l’Otan, en décembre dernier, l’ex-chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, s’en est pris vivement à la Turquie, dénonçant ses « manquements » aux règles de l’Alliance, sa politique du fait accompli dans certaines crises régionales et son achat de systèmes S-400.

Maintenant que, depuis l’investiture de Joe Biden à la Maison Blanche, une nouvelle administration se met progressivement en place à Washington, quelles seront les relations entre les États-Unis et la Turquie?

Un début de réponse a sans doute été donné à l’occasion d’un échange téléphonique entre Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de M. Biden, et Ibrahim Kalin, le porte-parole du président turc, Recep Tayyip Erdogan. Et les comptes-rendus qui en ont été faits à Ankara et à Washington disent peu ou prou la même chose.

Ainsi, selon la partie turque, MM. Sullivan et Kalin ont exprimé « la volonté d’établir des relations fortes, durables et constructives entre les deux pays dans la période qui s’ouvre. » Et ils auraient également « souligné la nécessité d’adopter une nouvelle approche pour régler les désaccords », notamment sur l’affaire des systèmes S-400 et le soutien américain aux YPG, les milices kurdes syriennes, considérées comme terroristes à Ankara, en raison de leur proximité avec le Parti des travailleurs du Kurdistan [PKK].

La référence aux YPG est absente du communiqué de la Maison Blanche rapportant ce premier contact entre la nouvelle administration américaine et la présidence turque. En revanche, il confirme que M. Sullivan a souligné le « désir » de Washington « d’établir des relations constructives entre les États-Unis et la Turquie, d’élarger les domaines de coopération et de gérer efficacement les désaccords ».

Et le texte ajoute par ailleurs que M. Sullivan a également fait part de l’intention de Washington de « renforcer la sécurité transatlantique par le biais de l’Otan », tout en se disant « préoccupé par l’acquisition par le Turquie du système de missiles sol-air russe S-400, ce qui compromet la cohésion et l’efficacité de l’Alliance. » En outre, il a souligné « l’engagement de l’administration Biden à soutenir les institutions démocratiques et l’état de droit. »

Pour résumer, MM. Sullivan et Kalin sont donc convenus d’établir une relation plus constructive entre les États-Unis et la Turquie, en réglant « plus efficacement » leurs désaccords via une « nouvelle approche ». Cela se traduira-t-il par la fin, ou du moins un allègement, des sanctions décidées par l’administration Trump?

Lors de son audition au Congrès en vue de sa confirmation au poste de secrétaire d’État, Antony Blinken avait considéré que la Turquie était « un allié qui, à bien des égards… n’agissait pas comme un allié ». Toutefois, avait-il dit, « l’idée selon laquelle un de nos partenaires stratégiques – ou considéré comme tel – pourrait s’aligner sur l’un de nos plus importants concurrents stratégiques n’est pas acceptable. » Aussi avait-il estimé qu’il fallait « évaluer l’impact des sanctions existantes » avant d’aller éventuellement plus loin.

Seulement, quand M. Sullivan parle de « renforcer la sécurité transatlantique » par l’Otan, l’exclusion de la Turquie du programme F-35 et l’interdiction de lui accorder de nouvelles licences d’exportation de matériels militaires ne vont pas forcément dans ce sens…

 

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