Sahel : Le nouveau chef du Pentagone reste vague sur le soutien américain à l’opération Barkhane

Fin 2019, Mark Esper, alors chef du Pentagone, lança une revue des déploiements militaires américains à l’étranger, à la lumière des priorités définis par la nouvelle stratégie de défense des États-Unis, qui, publiée un an plus tôt, mettait l’accent sur la rivalité avec la Chine et la Russie aux dépens de la lutte contre le terrorisme.

Et il fut avancé que le volume des forces américaines présentes en Afrique allait être ajusté, ce qui laissait craindre un moindre soutien des États-Unis à l’opération Barkhane, conduite par la France au Sahel. Soutien qui se serait limité au seul renseignement. Aussi, la ministre française des Armées, Florence Parly, alla plaider la cause de cette dernière à Washington en janvier 2020.

« Nous avons passé beaucoup de temps et d’énergie pour obtenir un soutien qui nous était contesté au début de l’année 2020. Puis, au fil des mois, ce soutien nous a été rendu mais avec des conditions puisque l’administration sortante [celle de M. Trump, ndlr] avait l’ambition de se faire payer pour l’ensemble des éléments qui étaient mis à notre disposition », rappellera Mme Parly, le 20 janvier dernier, lors d’une audition au Sénat. Au passage, cet appui américain à Barkhane a coût de 45 millions de dollars, ce qui est modeste par rapport au budget du Pentagone…

Quoi qu’il en soit, un an plus tard, et alors que l’adminstration de Donald Trump s’est effacée devant celle de Joe Biden, il faudra sans soute remettre le bleu de chauffe.

Devant les sénateurs, Mme Parly a concédé qu’elle n’avait encore aucune certitude sur ce que décidera la nouvelle équipe en place à Wahington au sujet du soutien à Barkhane et que, pour en avoir une idée, il fallait attendre les premiers contacts avec « nos nouveaux interlocuteurs à Washington ». Ce qui vient d’être fait, la ministre française ayant eu un échange téléphonique avec l’ex-général Lloyd Austin, fraîchement confirmé à la tête du Pentagone.

Avant de s’entretenir avec Mme Parly, M. Austin a d’abord appelé Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan, puis Ben Walace, le ministre britannique de la Défense. Ensuite, il a eu des conversations avec ses homologues japonais, sud-coréen, canadien, australien, indien et allemand.

Quoi qu’il en soit, à l’issue de ce premier échange téléphonique, le ministère des Armées a indiqué que Mme Parly et M. Austin « sont convenus de la nécessité de poursuivre l’excellente coopération opérationnelle entre les États-Unis et la France, notamment en matière de lutte contre le terrorisme au Sahel et au Levant, alors que les groupes armés terroristes y restent actifs et menaçants, malgré les sévères coups qui leur ont été portés. »

Seulement, le communiqué du Pentagone relatif à cette conversation se veut plus prudent. Le secrétaire à la Défense et la ministre française « ont discuté [to discuss, qui peut aussi se traduire par « débattre », ndlr] d’une série de questions, notamment la sécurité et la stabilité en Afrique, la nécessité d’une vigilance continue contre le terrorisme, la pandémie et la situation en Iraq et en Afghanistan ainsi qu’au Moyen-Orient en général. »

Et d’ajouter : « Au sujet de la situation sécuritaire en Afrique, le secrétaire et la ministre sont d’accord sur l’importance de la coopération dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. » Le rôle des États-Unis n’a ainsi pas été souligné dans le texte…

Lors d’une conférence de presse donnée plus tard, le porte-parole du Pentagone, John Kirby, est revenu sur cet entretien en indiquant que M. Austin n’avait « pris aucun engagement dans un sens ou dans un autre » au sujet du soutien américain à Barkhane mais qu’il avait « évidemment exprimé sa reconnaissance pour le travail que la France accomplit en termes de lutte de contre le terrorisme. » [voir à partir de la 56e minute sur la vidéo ci-dessus]

En outre, le porte-parole a précisé que le nouveau chef du Pentagone entendait « examiner l’ensemble de la posture militaire [des États-Unis] dans le monde avant de prendre des décisions spécifiques. »

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