Touché lors de l’opération Daguet en 1991, le Jaguar A91 va être exposé au Musée de l’Air et de l’Espace

À l’aube du 17 janvier 1991 et dans le cadre de l’opération Daguet, sous la conduite du commandant Jean-Luc Mansion [alias « Schnappy »], douze Jaguar des 7ème et 11ème Escadres de chasse décollèrent de la base d’al-Ahsa [Arabie Saoudite] pour détruire un dépôt de missiles balistiques SCUD installé par les forces irakiennes à al-Jaber, au Koweït.

Pour cette mission, chaque Jaguar emportait des bombes de 250 kg, des bombes anti-piste BLG66 Beluga, un « barax » de contre-mesures électroniques, un missile air-air Magic II d’autodéfense et un réservoir ventral de 1.200 litres.

Pendant que les Jaguar évoluaient à très basse altitude vers la base d’al-Jaber, les radars de cette dernière étaient visés par des F-4G « Wild Weasel » de l’US Air Force, protégés par des F-16. Malgré les tirs des canons de 30 mm et d’armes légères, les chasseurs-bombardiers réussirent leur mission.

Mais quatre d’entre-eux furent touchés à des degré divers. La verrière de l’un d’eux éclata sous l’impact des balles, blessant son pilote, le capitaine Alain Mahagne [alias « Charlie »]. Les commandes de vol du Jaguar du lieutenant Christ [alias « Jésus »] furent atteintes tandis que le carter d’huile du réacteur droit de celui piloté par lieutenant Bonnafoux fut crevé par des tirs de balles de petit calibre.

Mais le Jaguar A91, immatriculé 11-YG et avecle capitaine Jean-François Hummel [« Mamel »] aux commandes, fut touché par un missile sor-air de type MANPADS « SA-7 Grail », au niveau de son réacteur droit. Malgré l’incendie qui risquait d’atteindre les deux tonnes de pétrole qui restaient dans le réservoir, son pilote décida quand même de ramener l’avion en Arabie Saoudite, ce qu’il réussit à faire, avec le lieutenant Bonnafoux.

« La première étape, la plus dure, la plus pénible est celle où l’on se rend compte qu’il y a très peu de chances de s’en sortir. On est chez l’ennemi, on est très loin de tout. Tout va très mal dans l’avion. À cet instant, on est très calme, parce qu’on est fataliste », confiera, plus tard, le capitaine Hummel. Et d’ajouter : « Mais comme ce n’est pas la mentalité fondamentale d’un pilote de chasse d’être fataliste on reprend le dessus. On a alors la certitude que cela va passer, qu’on a eu de la chance, que l’avion n’explosera pas, que c’est le jour où il faut tenter le tout pour le tout. Et on tente de ramener l’avion. »

Le Jaguar A91, trop salement touché, n’a plus revolé depuis, alors que ce type de chasseur-bombardier a été retiré du service en 2005. Rapatrié à Toul, avant de prendre la route de la BA 279 de Châteaudun en 1994, il a depuis été remis dans un état « présentable », mais en laissant les dommages subis ce 17 janvier 1991, pour être exposé au Musée de l’Air et de l’Espace.

« Le Jaguar A91 fait son entrée au musée dans le cadre du projet de rénovation muséal prévu à l’horizon 2024 », a précisé le ministère des Armées.

La cérémonie marquant son entrée dans la collection du musée a été organisée ce 17 janvier, exactement trente ans après avoir manqué d’être détruit lors du premier raid aérien français de l’opération « Desert Storm ».

« C’est une première mondiale. Jamais un avion ayant connu les stigmates de la guerre récente et conservé en l’état de combat n’avait été exposé de la sorte. Son vécu fait sa particularité, et il participera à la continuité technologique que nous souhaitons honorer à travers la présentation de ces objets. Cette acquisition est également la première de toute une série d’autres d’avions légendaires dans les années à venir. Nous en sommes très fiers », a commenté Anne-Catherine Robert-Hauglustaine, directrice du MAE, historienne, docteure en histoire des sciences et des techniques et professeure à Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

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