La Suède finira-t-elle par rejoindre l’Otan?

En décembre 2012, le chef d’état-major suédois, qui était alors le général Sverker Göranson, jeta un froid en déclarant que la Suède ne tiendrait pas quinze jours en « cas d’attaque limitée ». Puis une simulation de bombardement de deux bases du pays, lors du congé pascal de 2013 ainsi que l’annexion de la Crimée par la Russie un an plus tard, associée à une hausse de l’activité militaire dans son voisinage firent que Stockholm décida de revoir sa politique de défense.

Ainsi, l’industrie de l’armement fut reprise en main, en particulier dans le secteur de la construction navale, le service militaire rétabli, l’île de Götland, le « porte-avions » de la Baltique, remilitarisée, le concept de défense totale dépoussiéré, etc… Dans le même temps, le gouvernement suédois s’attacha à renforcer ses liens militaires avec ses voisins scandinaves. Et le pays renoua avec les grandes manoeuvres.

Cela étant, la Suède n’est pas isolée. Si elle n’appartient pas à l’Otan, elle fait partie du « Programme de partenariat pour la paix » et participe parfois à des opérations menées par l’Alliance. Mais celui ne lui donne pas la garantie que les Alliés viendront à son secours en cas d’attaque contre son territoire.

Certes, l’Union européenne prévoit un mécanisme de défense collective via l’article 42-7 du traité de Lisbonne. Mais il n’est pas contraignant, en plus d’être flou sur les moyens à mettre en oeuvre en cas d’une agression armée contre l’un de ses États membre. En outre, étant neutre, la Suède n’est pas concernée, au même titre que la Finlande, l’Autriche, Malte et l’Irlande.

Durant l’été 2018, le président Macron avait proposé de corriger cet article 42-7 en lui donnant un caractère semi-automatique en cas d’agression contre l’un des membres de l’UE. « Notre volonté est clairement que l’Europe assume son autonomie stratégique et renforce sa solidarité en matière de défense », avait-il plaidé lors d’un déplacement en Finlande.

Pour cela, le président français avait donc proposé une « solidarité renforcée quasi-automatique » qui se ferait « qu’entre les États membres qui en seraient d’accord » afin de pouvoir disposer d’une « véritable solidarité d’intervention si un État était attaqué. » Depuis, ce projet de réforme est tombé dans les oubliettes.

Plus récemment, lors d’un discours sur la force de frappe française, M. Macron a affirmé que les « intérêts vitaux de la France ont désormais une dimension européenne. » Et de se dire ouvert à un « dialogue stratégique avec nos partenaires européens qui y sont prêts sur le rôle de la dissuasion nucléaire française dans notre sécurité collective. » Là encore, cette offre n’a pas eu l’effet espéré…

Quoi qu’il en soit, ce n’est pas vers l’UE que la Suède regarde mais vers… l’Otan. Selon une enquête du Pew Research Center publiée le 30 novembre, 65% des Suédois ont dit voir l’Alliance atlantique « sous un jour positif ». Jamais un tel niveau n’avait été atteint… Mais avoir une bonne opinion ne veut pas dire vouloir une adhésion.

Mais les choses bougent au niveau politique. En effet, début décembre, rapporte le quotidien La Croix, plusieurs partis représentés au Riksdag [Parlement] ont voté une « option Otan », ouvrant la voie à une future adhésion. Ce résultat a été obtenu grâce au ralliement des Démocrates suédois [extrême droite]. Seuls les partis de gauche, actuellement au pouvoir, s’y sont opposés. Ce qui laisse  à penser que cette question sera l’un des thémes majeurs des prochaines élections législatives, en 2022.

Dans le fond, cette tendance n’est pas surprenante. Depuis 2014, le gouvernement suédois ne cesse d’évoquer la menace russe. Menace qui n’est pas infondée d’ailleurs. Ainsi, en 2015, alors que le débat sur une éventuelle adhésion à l’Otan refaisait surface à Stockholm, Moscou avait prévenu que cela « aurait des conséquences en termes militaro-politiques et de politique étrangère, et demanderait nécessairement des mesures de représailles de la part de la Russie. »

Cette menace russe a également été avancé pour justifier la hausse de 40% des dépenses militaires suédoises d’ici cinq ans, ce qui permettra de réactiver des unités autrefois dissoutes et d’en créer de nouvelles, les effectifs devant être augmentés de 30% d’ici 2030.

Une adhésion de la Suède à l’Otan pourrait entraîner celle de la Finlande. En effet, un rapport publié en 2016 avait conclu que Helsinki ne devrait pas rejoindre l’Alliance atlantique sans Stokholm… Et vice versa.

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