Le ministère des Armées fait le point sur les projets qu’il a soutenus pour faire face à la crise sanitaire

Lors du premier épisode de l’épidémie de covid-19, le ministère des Armées, via l’Agence de l’innovation de Défense [AID], avait lancé un appel à projets afin de rapidement trouver des solutions innovantes pour « protéger la population, soutenir la prise en charge des malades, tester la population, surveiller l’évolution de la maladie au niveau individuel et l’évolution de la pandémie, ou aider à limiter les contraintes pendant la période de crise. » Une enveloppe de dix millions d’euros avait été débloquée à cet effet.

Au total, l’AID reçut 2.584 projets qui, s’ils avaient tous été acceptés, auraient exigé 1,15 milliard d’euros de financement. D’où une sélection drastique, selon trois critères principaux : l’impact sur la gestion de crise, la crédibilité scientifique et/ou la faisabilité technique et la rapidité de mise en oeuvre de la solution. En outre, le caractère dual des propositions, c’est à dire leurs possibles applications pour les armées, ont été pris en compte.

En juin le ministère des Armées indiqua que 37 projets avaient été retenus dans le cadre de cette procédure, dont 22 donnèrent lieu à la notification d’un marché.

Ce nombre tomba à 36, après le retrait de l’étude PREVCHLOROCO qui, conduite par le Centre d’épidémiologie et de santé publique des armées, a visait à « tester l’efficacité de la chloroquine à faible dose pour la prévention de l’infection par le SARS-CoV-2 dans la population soignante du Service de Santé des Armées ».

Et cela, en raison de « l’évolution de la situation sanitaire » et sans doute aussi à cause de la controverse sur les effets de cette substance sur la covid-19… même si, dans la liste, on pouvait trouver un projet de la Pharmacie centrale des armées [PCA] consistant à développer une « forme injectable de chloroquine adaptée au conditionnement des patients sévèrement atteints, pris en charge par respirateur artificiel et ne pouvant pas bénéficier de chloroquine, seulement accessible sous forme de comprimés. »

Quoi qu’il en soit, à l’occasion du Forum Innovation Défense, le ministère des Armées a fait le point sur ces projets qu’il a soutenus. « Grâce aux capacités d’accélération de l’innovation de l’AID, certains produits sont à présent disponibles pour lutter contre la crise sanitaire », a-t-il fait valoir.

Curieusement, le test sérologique « NG-Test® IgG-IgM COVID-19 », proposé par l’entreprise NG Biotech et pour lequel le ministère des Armées avait investi un million d’euros, ne fait pas partie de ces 9 projets « à présent disponibles » pour faire face à l’épidémie.

En juillet, la cellule investigation de Radio France avait en effet jeté un froid en affirmant que la PME travaillait avec un sous-traitant chinois, qui commercialisait d’ailleurs ses propres tests. « D’après nos informations, NG Biotech importe en France les bandelettes sous forme de grandes feuilles, appelées ‘master sheets’, qui sont ensuite découpées à Guipry-Messac et introduites dans les boîtiers. La seule fabrication effectuée directement par NG Biotech est celle de la ‘solution tampon’, qui va faciliter la migration du sang dans la bandelette », avait-elle révélé.

Cela étant, parmi les neuf projets évoqués par le ministère des Armées, trois sont des solutions de diagnostic, dont Point of Care de Loop Dee Science, CoViDiag d’Innobiochips et le test salivaire EasyCov de SkillCell. S’agissant de ce dernier, la Haute autorité de santé [HAS] a donné son feu vert pour son utilisation dans un avis publié le 28 novembre… Mais uniquement chez les patients symptomatiques pour qui le prélèvement nasopharyngé est impossible. Ce que conteste la PME qui l’a mis au point.

Dans le même domaine, le projet DROPLET-COV2, porté par l’université et le CHU de Rouen, vise à développer un test de diagnostic moléculaire « à partir de prélèvements nasopharyngés ou salivaire basé sur la RT-PCR digitale multiplex du SARS-Cov-2 », lequel serait « plus sensible et facilement généralisable. »

Toujours dans le registre des tests, le projet COVID-Box, de l’Institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale [IRCG] vise également à concevoir un laboratoire mobile pour réaliser des tests « moléculaires rapides et à haut débit ». Il est actuellement mis en oeuvre à l’aéroport de Roissy.

Par ailleurs, une toile composite virucide proposée par le groupe Serge Ferrari est désormais commercialisée et le respirateur MakAir, mis au point par le collectif Makers for Life, avec l’université et le CHU de Nantes, est actuellement en phase II d’essai clinique. Les résultats sont attendus pour le premier trimestre 2021, soit quand les vaccins seront disponibles.

« MakAir vise le développement, dans des délais courts, d’un respirateur pour le traitement d’urgence des patients en détresse respiratoire aigüe, infectés par le Covid-19. La conception de ce respirateur s’inspire de celle des respirateurs légers déjà utilisés dans les hôpitaux. Il est pensé pour être simple, facile à produire et le moins onéreux possible, tout en étant éligible à l’agrément de l’ANSM », avait expliqué l’AID, en avril dernier.

S’agissant de la détection du SARS-Cov-2, le ministère des Armées a mis en lumière le projet COMETE [Covid-19 Marseille Environment Testing & Expertise] du Bataillon de Marins-Pompiers de Marseille [BMPM]. Il s’agit d’un laboratoire projetable permettant de détecter la présence du coronavirus dans l’air et sur les surfaces. Une évolution consiste à chercher les traces de virus dans les eaux usées. Et cette approche est pleine de promesses [en plus d’être peu coûteuse].

« La recherche des traces du génome SARS-CoV2 par analyse RT-PCR [Real Time Polymerase Chain Reaction] dans les eaux usées a pour objectif d’anticiper une éventuelle reprise de l’épidémie. L’expérience acquise devrait permettre d’évaluer la corrélation entre ces mesures et l’évolution à court terme de l’épidémie », explique le BMPM sur son site Internet.

Enfin, la plateforme WaKEDCo, du secrétariat général pour l’administration, du service de santé des armées et du centre de conduite informatique de l’armée de Terre, permet d’accélérer le traitement de la documentation scientifique sur la covid-19 grâce à l’intelligence artificielle. Elle pourrait avoir d’autres applications à l’avenir.

Photo : Makair © Makers for Life

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