La Russie accuse un navire militaire américain d’avoir violé ses eaux territoriales

Le statut des baies historiques a toujours été controversé d’un point de vue juridique, d’autant plus que les règles qui s’y appliquent sont souvent compliquées. Toujours est-il qu’en 1957, l’Union soviétique décida de considérer le golfe Pierre-le-Grand, en mer du Japon, comme une mer intérieure, l’un des principaux projectifs étant alors de protéger le port militaire de Vladivostok, siège de sa Flotte du Pacifique. Et de tracer en conséquence une ligne entre l’embouchure de la rivière Tumen-Oula et le cap Povorotny pour en fixer la limite. Ce que constestèrent le Japon… ainsi que les États-Unis et le Royaule-Uni, qui envoyèrent une note de protestation, estimant que cette décision n’était pas conforme au droit international.

« La détermination de la ligne de base à l’intérieur des baies a toujours été très controversée. Les principaux problèmes concernent tout d’abord la disposition et l’étendue maximale de la ligne qui ferme la baie, et en second lieu, les droits que l’État côtier peut exercer à 1’intérieur de cette ligne artificielle. La ligne de fermeture peut être utilisée dans le cas d’une baie, qui est définie comme une échancrure bien marquée dont la pénétration est telle, proportionnellement à la largeur de son ouverture qu’elle contient des eaux renfermées qui constituent plus qu’une simple inflexion de la côte. La ligne de fermeture, qui ne peut excéder 24 milles, peut être utilisée seulement si la superficie de la baie est égale ou supérieure à celle d’un demi-cercle ayant pour diamètre la ligne tirée à son ouverture », explique ainsi le juriste Umberto Leanza.

Or, la largeur de l’entrée du golfe de Pierre le Grand dépasse les 24 milles, ce qui, stricto sensu, n’en fait pas une baie pouvant être qualifiée de mer intérieure. À moins de la considérer comme une « baie coutumière »…

Quoi qu’il en soit, si l’Union soviétique a disparu, les contestations relatives au statut du golfe Pierre-le-Grand ont persisté. Aussi, la marine américaine y envoie de temps à autre des navires dans le cadre de missions dites FONOP [Freedom of Navigation OPeration]. Ce fut par exemple le cas en décembre 2018, avec le destroyer [ou contre-torpilleur] USS McCampbell. Mais, surveillé par le navire Amiral Tribouts, de la flotte du Pacifique.

Près de deux ans plus tard, l’USS Navy a envoyé le destroyer USS John McCain au même endroit, pour une mission similaire. Seulement, les choses se sont passées différemment, à en croire le ministère russe de la Défense.

En effet, selon ce dernier, le 24 novembre, le navire américain a fait une incursion d’environ un nautique dans les eaux revendiquées par la Russie. Le contre-torpilleur « Amiral Vinogradov », qui le suivait, a donc utilisé « un canal de communication international » pour « l’avertir que de telles actions étaient inacceptables » et qu’il « pourrait être chassé des eaux territoriales russes par une ‘manoeuvre de percussion’. » Après avoir envoyé son avertissement, le navire russe a changé de cap pour mettre sa menace à exécution. Mais l’USS John McCain n’a pas insisté et a fait demi-tour.

Dans un communiqué, la marine américaine, via l’US Pacific Fleet, n’a pas confirmé l’échange entre l’USS John McCain et le navire russe. Si ce n’est qu’elle a reconnu que son destroyer a « fait valoir ses droits et libertés de navigation à proximité du golfe Pierre-le Grand, en mer de Japon ».

« Cette opération de liberté de navigation a confirmé les droits, libertés et usages licites de la mer reconnus par le droit international en contestant les revendications maritimes excessives de la Russie », est-il expliqué dans le texte.

« Le droit international de la mer […] prévoit certains droits et libertés et autres utilisations licites de la mer pour toutes les nations. Les États-Unis respectent ces droits et libertés par principe pour préserver la liberté des mers qui est essentielle à la sécurité, à la stabilité et à la prospérité mondiales. Tant que certains pays continueront à faire valoir des revendications maritimes qui sont incompatibles avec le droit international tel que reflété dans la Convention sur le droit de la mer de 1982 et qui prétendent restreindre illégalement les droits et libertés dont jouissent tous les États, les États-Unis continueront à défendre ces droits. et les libertés de la mer garanties à tous », conclut l’US Navy.

Photo : US Navy

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