La Turquie se tourne vers des entreprises sud-coréennes pour sauver la production de son char Altay

En 2015, la Radio et Télévision de Turquie [TRT] était catégorique : le char de combat « Altay » allait être le « plus moderne du monde ». Puis, trois ans plus tard, le gouvernement turc annonça que sa production serait confiée au groupe BMC, aux dépens d’Otokar, qui en avait pourtant assuré le développement. En outre, une commande d’un premier lot de 250 unités fut signée, avec des premières livraisons attendues en 2020. Qui plus est, le Qatar exprima son intention d’en acquérir une centaine d’exemplaires.

Devant afficher une masse au combat de 65 tonnes et être doté d’un canon MKEK de 120 mm à âme lisse, il était alors question d’équiper l’Altay d’un blindage réactif, d’un bloc optronique télescopique YAMGOZ pour une surveillance sur 360°, d’un système de détection de départ de coup et d’un kit de détection laser.

Seulement, un char peut bien être présenté comme étant le plus moderne du monde, s’il n’a pas de moteur, il est aussi utile qu’un pot de fleurs. Et c’est justement ce qui manque à l’Altay.

Pendant un temps, la Turquie avait envisagé une collaboration avec le Japon pour mettre au point un moteur de char, le groupe Mitsubishi Heavy Industries étant alors pressenti pour créer une co-entreprise avec un partenaire industriel turc à cette fin. Mais ce projet ne se concrétisa pas. Finalement, deux groupes allemands furent sollicités : MTU pour un moteur turbo-diesel de 1.500 cheveaux et Renk pour la transmission. Et pour son blindage composite à base de carbure de bore, des industriels français furent approchés.

Sauf que la politique menée ces derniers mois par le président Erdogan a rendu plus compliquée la production des chars Altay. En effet, l’Allemagne a décidé un embargo sur les tous les systèmes pouvant être utilisés par les forces turques dans le nord de la Syrie. Ce qui implique donc les moteurs de MTU et les transmissions HSWL 295 TM de Renk. Et, étant donné ses relations exécrables avec la France, la Turquie doit trouver d’autres fournisseurs pour le blindage.

« Ce programme est confronté à des retards importants en raison d’un accès infructueux à des composants importants tels que le moteur, la transmission et le blindage », a admis un responsable turc auprès de Defense News. « Je ne suis pas en mesure de donner une date pour le début de la production en série. Tout ce que je sais, c’est que nous nous efforçons de faire avancer les choses », a-t-il ajouté.

Effectivement, étant donné qu’il n’est pas question d’abandonner un programme aussi emblématique, Ankara cherche d’autres partenaires. Et comme l’Altay s’inspire du char sud-coréen K2 Black Panther, la solution la plus logique est de s’adresser à Séoul, et plus précisément à Hyundai Rotem. D’autant plus, que les relations entre les deux capitales sont bonnes, l’industrie turque ayant par exemple fabriqué sous licence les obusiers K9 Thunder de Samsung Group.

En tout cas, selon Defense News, BMC est en pourparlers avec deux sous-traitants de Hyundai Rotem, dont Doosan pour les moteurs et S&T Dynamics pour les systèmes de tranmission. « Nous espérons que ces discussions permettront de régler les problèmes » de l’Altay, a confié une source industrielle turque au magazine américain. A priori, la situation pourrait se décanter d’ici quelques mois, c’est à dire quand un terrain d’entente sera trouvé au niveau des licences.

Pour autant, cette solution n’est pas idéale. Tout simplement parce que la transmission des premiers chars K2 Black Panther livrés aux forces sud-coréennes ne s’est pas révélée à la hauteur.  Au point que, pour les lots suivants, elle a finalement été remplacée par un modèle fourni par… Renk.

En attendant, le ministère turc de la Défense n’a pas d’autre choix que de moderniser les chars actuellement en service. Récemment, la protection des Leopard 2A4 a été renforcée [ce qui a augmenté sa masse de 7 tonnes]. Et les M60 Patton, conçu dans les années 1950/60, ont chacun reçu un kit de protection active « PULAT », développé par Aselsan.

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