Le Royaume-Uni va massivement augmenter ses dépenses militaires et donner la priorité à la Royal Navy

Les Britanniques sont passés maîtres dans l’art de la ruse [ou de la « deception »]. Et leur gouvernement l’a encore montré ces dernières semaines, en faisant fuiter des rumeurs sur ses intentions en matière de politique de défense.

Rumeurs dont la presse se fit abondamment l’écho, d’autant plus que les incertitudes budgétaires leurs donnaient du crédit… Ainsi, alors qu’une revue stratégique de défense et de sécurité était en cours, il fut question du retrait de l’ensemble des chars Challenger 2 utilisés par la British Army ou encore d’une réduction drastique du nombre de navires de premier rang de la Royal Navy. Les incertitudes budgéraires donnèrent du crédit.

Était-ce une façon d’envoyer des ballons d’essai? Ou bien un moyen de masquer son jeu? Ou fallait-il attendre le départ de certains conseillers encombrants [comme Dominic Cummings]?

Toujours est-il que, ce 19 septembre, le Premier ministre britannique, Boris Johnson, a annoncé un effort sans précédent depuis la fin de la Guerre Froide en faveur des forces armées du Royaume-Uni, avec un investissement supplémentaire de 16,5 milliards de livres sterling [18,5 milliards d’euro] pour les quatre prochaines années. Et il s’ajoutera à celui de 7,6 milliards de livres sterling qui était déjà prévu.

Au total, ce sont donc 24,1 milliards de livres [27 milliards d’euros] supplémentaites qui profiteront aux forces britanniques. Pour rappel, le budget de ces dernière s’est élevé à près de 40 milliards de livres l’an passé. Ce qui fera une hausse de 15%, soit la plus forte depuis plus de 30 ans.

« J’ai pris cette décision au plein coeur de la pandémie » de covid-19 « parce que la défense du Royaume doit passer avant tout », a expliqué le locataire du 10 Downing Street. « La situation internationale est plus périlleuse et intensément compétitive que jamais depuis la Guerre Froide et la Grande-Bretagne doit être fidèle à son histoire et se tenir aux côtés de ses alliés », a-t-il ajouté.

Cet effort supplémentaire doit permettre au Royaume-Uni de mettre fin à une « ère de repli », de « renforcer son influence dans le monde » et « d’être pionner dans les nouvelles technologies ».

La Royal Navy, déjà bien servie avec le renouvellement de ses quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] avec ceux de la classe Dreadnought et ses deux porte-avions, sera l’une des principales bénéficiaires de cet effort budgétaire.

Cet « investissement de 16,5 milliards de livres sterling confirme notre commande de huit frégates de Type 26 et de cinq de Type 31 et nous engage sur la voie de la prochaine génération de Type 32. Et il soutient le programme des futurs navires de soutien notre groupe aéronaval », s’est félicité le ministère britannique de la Défense [MoD].

Cet « investissement soutiendra la revitalisation de la construction navale, en finançant une expansion significative de la Royal Navy qui disposera de la plus grande flotte de navires de surface modernes en Europe », a insisté le MoD. « Nos investissements supplémentaires rétabliront la position de la Grande-Bretagne en tant que première puissance navale en Europe », a enchéri Ben Wallace, le ministre britanique de la Défense.

Pour rappel, la Royal Navy met en oeuvre six contre-torpilleurs [classe Daring ou Type 45]. Les frégates de Type 26 et de Type 31 doivent remplacer celles de Type 23 [classe Duke, au nombre de 13]. Et, pour le moment, on ne sait pas grand chose sur la frégate de Type 32 évoquée par le MoD.

Cet effort budgétaire permettra de créer un « commandement de l’espace » qui « protégera les intérêts du Royaume-Uni dans l’espace et contrôlera le premier satellite lancé à partir d’une fusée britannique en 2022 ». Sans doute que M. Johnson a voulu parler du lanceur Skylark-L, récemment testé à Kildermorie Estate [Écosse].

Les capacités en matière de cyberdéfense vont être également renforcées avec la création d’une « National Cyber Force », qui réunira les compétences des forces britanniques et celle du GCHQ.

L’innovation ne sera pas oubliée. « Grâce à ces fonds, d’autres technologies, notamment des véhicules autonomes, des drones en essaim et des systèmes de pointe seront développées à des fins militaires », a précisé le général sir Nicholas Carter, le chef d’état-major des forces britanniques. Récemment, ce dernier a avancé l’idée que la British Army pourrait compter 30.000 robots d’ici 2030. En outre, une agence dédiée  au développement de l’intelligence artificielle va être créée.

Enfin, une enveloppe supplémentaire de 1,5 milliard de livres sterling sera affectée à la rercherce militaire… Ce qui devrait profiter essentiellement, a priori, au programme d’avion de combat Tempest.

Cela étant, au-delà de ces annonces, il reste une question de taille : où M. Johnson compte-t-il trouver cet argent?

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