Les différences de grades compliquent la mutualisation de la formation des pilotes de drones des armées de l’Air et de Terre

Il fut un temps où des sous-officiers étaient pilotes, le corps des officiers étant réservés à ceux qui sortaient d’une grande école militaire. Puis, il fut décidé que tous les pilotes seraient des officiers, mais selon des modalités et des contrats différents. L’armée de l’Air fut la première à franchir le pas, en 1983. Et l’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT] fut la dernière à le faire, en invitant, en 2008, son personnel navigant sous-officier à opter pour le statut d’officier sous contrat [OSC]. La même chose va-t-elle se répéter pour les télé-pilotes de drones?

Dans un premier temps, l’armée de l’Air & de l’Espace [aAE] a puisé ses opérateurs parmi ses pilotes ayant au minimum la qualification de chef de patrouille. Puis, l’an passé, au regard de besoins en forte croissance, elle a décidé de former ses pilotes de drone MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance] dès le début de leur carrière militaire, via la filière EOPN [Élève-officier du personnel navigant].

Pour prétendre piloter un drone MALE comme le MQ-9 Reaper, il faut suivre une formation de 71 semaines, comprenant une formation de pilote de planeur et d’avion léger, suivie de plusieurs phases visant à assimiler des savoir-faire tactiques.

À noter que l’US Air Force a adopté une autre approche. En 2016, et pour la première fois depuis les années 1960, des sous-officiers ont été formés au pilotage d’aéronefs militaires, en l’occurrence des drones RQ-4 Global Hawk. Cependant, ce sont toujours des officiers qui sont aux commandes quand il s’agit de drones armés.

L’armée de Terre, qui mettra en oeuvre des drones tactiques Patroller dont les performances sont relativement proches d’un appareil de type MALE et qui pourront être armés, forme ses télépilotes à Dax. Issus du 61e Régiment d’Artillerie [RA], les stagiaires, sous-officiers, apprennent ainsi les bases de l’aéronautique [mécanique du vol, météorologie, circulation aérienne, réglementation, etc…] en vue de préparer une licence de pilote privé « avion ». Pour antant, et à la différence de l’aAE, ils ne seront pas considérés comme des pilotes à part entière, mais plutôt comme faisant partie intégrante des manoeuvres au sol dans lesquelles ils seront engagés.

Par ailleurs, de telles formations étant coûteuses, l’idée de les mutualiser a été avancée l’an passé. Et une réflexion est en cours. Or, si le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Thierry Burkhard, est allant sur ce dossier, c’est probablement moins le cas pour l’aAE, son chef d’état-major, le général Philippe Lavigne, n’ayant pas abordé ce sujet lors de ces récentes auditions parlementaires.

« Nous menons actuellement une réflexion sur une éventuelle mutualisation de la formation des pilotes de drones, même si l’armée de Terre et l’armée de l’Air et de l’Espace n’ont pas les mêmes attentes », a en effet indiqué le général Burkhard, lors de sa dernière audition à l’Assemblée nationale.

« Dans l’armée de l’Air et de l’Espace, tous les pilotes de drones sont des officiers, ce qui n’est pas le cas dans l’armée de Terre, où des sous-officiers sont formés au SDT [Système de drone tactique, Patroller, ndlr] », a pousuivi le CEMAT. Aussi, a-t-il ajouté, « nous devons donc, avant toute mutualisation, nous mettre d’accord sur les spécifications de la formation. Ensuite, nous devrons examiner la question des flux, l’armée de l’Air et de l’Espace ne disposant pas de flux extensibles à l’infini. »

« La formation sur les SDT est longue et coûteuse, mais elle a été prise en compte et intégrée dans le budget – ainsi que le maintien en qualification », a cependant dit le général Burkhard. Mais le problème est le retard pris par le programme Patroller… Retard qui oblige l’armée de Terre « à maintenir en qualification les pilotes qui ont déjà suivi une formation ».

« Pour ce faire, nous utilisons des simulateurs. Mais j’ai un autre problème : je dois maintenir en qualification les soldats qui utilisaient le drone précédent, le Système de drone tactique intérimaire [SDTi, Sperwer], qui n’est plus en état de fonctionner. Nous sommes en contact étroit avec l’industriel, qui est bien conscient de ces difficultés, notre objectif commun étant de mettre en place un système de drone sûr et fiable », a expliqué le CEMAT.

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