Le chef d’état-major de la force aérienne indienne n’exclut pas l’achat d’avions Rafale supplémentaires

Selon son contrat opérationnel, la force aérienne indienne [Indian Air Force – IAF] doit aligner 42 escadrons d’avions de combat afin de pouvoir être en mesure de faire face au Pakistan et à la Chine, selon la stratégie dite de « double front ». Dans le même temps, il lui faut se moderniser tout en favorisant l’émergence de capacités industrielles locales dans le domaine de l’aéronautique. Ce qui n’est d’autant plus pas aisé qu’il lui faut composer aussi avec les hésitations et le retards sur certains programmes.

Ce qui fait que, comme l’a souligné l’Air Chief Marshal RKS Bhadauria, le chef d’état-major de l’IAF, lors d’une conférence de presse donnée le 5 octobre, diposer, déjà, de « 36 à 38 escadrons » au cours de la prochaine décennie serait « un exploit ».

Les difficultés rencontrées lors du développement du LCA Tejas, confié à Hindustan Aeronautic Limited [HAL] afin de remplacer ses MiG-21 ont évidemment compliqué la tâche de l’IAF. De même que l’abandon de l’appel d’offres MMRCA [Medium Multi-Role Combat Aircraft], qui devait lui permettre de se doter de 126 avions de combat multirôles Rafale dans le cadre de vastes transferts de technologie dans le domaine industriel [108 avions auraient dû être assemblés en Inde, ndlr].

En outre, New Delhi a aussi décidé de mettre un terme au projet FGFA [Fifth Generation Fighter Aircraft], qui consistait à mettre au point un avion de combat de 5e génération via une collaboration avec du constructeur russe Sukhoï, sur la base du Su-57 « Felon ». Désormais, l’IAF mise sur l’Advanced Medium Combat Aircraft [AMCA], un programme qui, confié à HAL, ne devrait pas se concrétiser d’ici 2028.

Cela étant, le projet MMRCA a depuis été remplacé par un autre qui, appelé Multi-Role Fighter Aircraft [MRFA], prévoit l’acquisition de 114 avions de combat, via un appel d’offres. Les américains Lockheed-Martin [F-21] et Boeing [F/A-18 Super Hornet] sont sur les rangs, de même que le suédois Saab [Gripen E/F], le consortium Eurofighter [Typhoon], le russe MiG [MiG-35] et le français Dassault Aviation [Rafale].

Pour cette procédure, le constructeur français part avec un coup d’avance étant donné que la décision d’annuler le projet MMRCA avait été précédée par l’achat de 36 avions Rafale dans le cadre d’une procédure de gouvernement à gouvernement. Les cinq premiers exemplaires, livrés en juillet par Dassault Aviation, ont officiellement été mis en service au sein du Squadron n°17 « Golden Arrows ».

Justement, et alors que les tensions avec la Chine persistent dans la région du Ladakh, l’Air Chief Marshal Bhadauria s’est félicité sur le fait que les Rafale donnent désormais à l’IAF la « possibilité de tirer en premier et de frapper fort dans la profondeur dans un espace aérien contesté ». Et cela, alors que l’Armée populaire de libération [APL] s’attache à renforcer ses moyens aériens dans les régions frontalières avec l’Inde, ce qui inquiète évidemment l’état-major indien. Ainsi, par exemple, le quotidien Times of India a fait état du déploiement, sur la base aérienne de Kashgar, de bombardiers stratégiques H6, dotés de missiles de croisière KD-63. De quoi menacer les centres de décision indiens…

Aussi, l’Air Chief Marshal Bhadauria n’a pas échappé à la question qui devait brûler les lèvres de nombreux journalistes : est-il dans les plans de New Delhi de commander un nouveau lot de 36 Rafale? D’autant plus que, de l’avis de certains analystes militaires cités par la presse indienne, il faudrait quatre escadrons [de 18 Rafale chacun] à l’IAF. Sur ce point, il ne s’est pas trop avancé. « Il est trop tôt pour le dire », a-t-il répondu, soulignant qu’une telle décision impliquerait mécaniquement une réduction du nombre d’avions à commander via l’appel d’offres MRFA, pour lequel New Delhi, a-t-il précisé, à reçu « toutes les réponses » à la demande d’informations lançée en 2019.

En tout cas, l’achat d’un second lot de Rafale n’est pas exclu. « Toutes les options sont sur la table. […] Il y a plusieurs questions qui doivent être prise en considération. Dès qu’une décision sera prise, nous vous le dirons », a dit le chef de l’IAF aux journalistes, avant de rappeler que la force aérienne indienne doit recevoir 3/4 Rafale tous les deux ou trois mois, jusqu’à la livraison des 36 exemplaires soit terminée.

Reste que plusieurs éléments plaident en faveur d’une commande d’un autre lot de Rafale. Le premier est budgétaire : les développements de la version indienne de l’avion français étant déjà amortis, l’achat d’autres exemplaires serait par conséquent moins coûteux. Et cela vaut aussi pour les infrastructures… ainsi que pour le maintien en condition opérationnelle [MCO]. Sur ce point, des synergies pourraient être trouvées avec l’Indian Navy, qui a lancé une procédure pour acquérir 57 chasseurs-bombardiers embarqués. Le Rafale Marine et le F/A-18 Super Hornet sont les principaux favoris.

Un autre point en faveur d’une telle solution est le facteur temps. Aller au bout de l’appel d’offres MRFA et mettre en place les montages industriels pour produire l’avion retenu en Inde sera long, voire incertain, alors Dassault Aviation a déjà noué un partenariat avec le conglomérat indien Reliance Group afin de satisfaire aux exigences de New Delhi en matière de compensations industrielles [offset] au moment de la commande de 36 Rafale. Or, au regard des menaces pressantes auxquelles l’Inde doit faire face, il n’y pas de temps à perdre.

Photo : Rafale de l’IAF

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