Grande bénéficiaire du fonds de relance européen, l’Italie envisage de doper son industrie de défense

En juillet dernier, les chefs d’État et de gouvernement des 27 pays membres de l’Union européenne [UE] se sont mis d’accord sur un fonds de relance économique doté de 750 milliards d’euros et appelé « Next Generation EU ».

Dans le détail, ce fonds se compose de 390 milliards d’euros de subventions [allouées aux États membres sous réserves de respecter des objectifs dans le domaine de la transition écologique] et de 360 milliards d’euros disponibles sous forme de prêts.

C’est ainsi que l’Italie, dont l’économie a particulièrement été éprouvée par la pandémie de covid-19, s’est vue octroyer la part du lion, avec près de 209 milliards d’euros, dont 81,4 milliards d’aides directes et 127 milliards d’euros de prêts.

La semaine passée, le gouvernement italien a présenté un « Plan national de relance et de résilience » [PNRR], devant être financé en très grande partie par les fonds européens. Ce plan se décline en six parties : « Numérisation, innovation et compétitivité du système de production » , « Révolution verte et transition écologique », « Infrastructure de mobilité », « Éducation, formation, recherche et culture », « Équité sociale et territoriale » et, enfin « Santé ».

Chaque ministère italien a, dans le même temps, rendu une liste de 550 projets susceptibles de bénéficier d’un financement dans le cadre de ce PNRR, largement abondé par les fonds européens [.pdf]. Et, visiblement, ce ne sont pas les idées qui leur ont manqué. « La liste des projets pour le fonds de relance ressemble à la lettre au père Noël », a ainsi ironisé le quotidien Panorama.

Ces propositions ne seront très probablement pas toutes retenues. En tout cas, il est question d’allouer 25 milliards d’euros au « Plan pour la transformation numérique et le renforcement de la filière industrielle aérospatiale et de défense ».

Il s’agit ainsi de « permettre à ces secteurs de faire un saut technologique dans la recherche, l’innovation et le développement de plateformes duales performantes, avec un impact environnementale réduit et une sécurité cyber renforcée ». Et de citer, notamment, les hélicoptères de nouvelle génération FVL, l’avion [de combat] de sixième génération, les technologies sous-marines avancées, l’intelligence artificielle, le « futur navire européen » ainsi que les technologies spatiales et satellitaires. Ces projets sont portés par le ministère du Développement économique, qui, en Italie, est chargé des programmes militaires.

Concrètement, Il serait donc question d’utiliser ce plan de relance pour financer une partie du programme d’avion de 6e génération « Tempest », lancé par le Royaume-Uni en juillet 2018 et rejoint par l’Italie l’an passé. La mention du projet FVL [Future Vertical Lift] a de quoi interpeller… puisqu’il est actuellement conduit par les ֤États-Unis afin de remplacer les actuels UH-60 Black Hawk, AH-64 Apache, CH-47 Chinook et autres OH-58 Kiowa par des hélicoptères de nouvelle génération.

Ce programme, pour lequel Bell Helicopters, Sikorsky [filiale de Lockheed-Martin] et Boeing jouent les premiers rôles, est divisé en deux sous-projets : Future Attack Reconnaissance Aircraft [FARA] et Future Long-Range Assault Aircraft [FLRAA].

Cela étant, le directeur du programme FVL, le général Wally Rugen, a récemment indiqué que huit autres pays étaient interessés par le développement de ces hélicoptères de nouvelle génération, qui, normalement, devrait commencer à entrer en service à partir de 2030. S’il ne les a pas cités, on peut donc penser que l’Italie fait partie du lot.

Président de la Fédération des entreprises italiennes pour l’aérospatiale, la défense et la sécurité [AIAD], Guido Crosetto, a défendu l’idée d’une participation italienne au programme FVL. « C’est fondamental. […] Nous parlons d’un hélicoptère plus rapide et nous avons un leader mondial dans ce domaine. […] Nous ne pouvons l’ignorer », a-t-il confié à Defense News, en référence au groupe Leonardo. Et d’insister sur le fait que l’industrie aéronautique avait plus que jamais besoin d’une aide de l’État, ce secteur ayant été l’un des plus affectés par la pandémie de covid-19.

Reste que, pour le moment, les jeux ne sont pas encore faits. Déjà, le Parlement européen tarde à donner son feu vert au plan de relance de l’UE, les eurodéputés voulant conditionner l’attribution des fonds au respect de l’État de droit. En outre, ils estiment que le Cadre financier pluriannuel [le budget de l’Union pour 2021-27] est insuffisant… « Sans un accord général rapide entre le Conseil [les États membres, ndlr] et le Parlement européen, nous courons le risque de retarder le plan de relance », a ainsi prévenu Berlin.

En outre, Vincenzo Amendola, ministre italien des Affaires européennes, a indiqué à Defense News que « le plan de relance de l’Italie ne doit être présenté à l’UE qu’entre janvier et avril 2021. »

À noter que, dans le cadre de ce plan, le ministère italien de la Défense a présenté 21 projets qui, au total, exigeraient un financement d’au moins 5 milliards d’euros. Ce montant servirait notamment à financer des programmes spatiaux [satellites de communication, notamment pour la 5G, observation, surveillance espace extra-atmosphérique, etc], le renforcement et renouvellement des capacités de cyberdéfense de la Marina Militare ou encore la création de centres d’excellence dans les domaines de la robotique et de l’intelligence artificielle.

Photo : Hélicoptère AW-101 de Leonardo

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