Mme Parly assure que la commande grecque de Rafale n’aura pas d’impact opérationnel pour les forces françaises
Pour la ministre des Armées, Florence Parly, l’intention de la Grèce de se procurer 18 Rafale, annoncée le 12 septembre, est une « excellente nouvelle » non seulement pour l’Europe mais aussi pour l’industrie française. C’est en effet la première fois qu’un pays européen envisage d’acquérir ce type d’appareil pour moderniser ses forces aériennes.
Cela étant, sur les 18 avions commandés, 12 devraient être prélevés sur la dotation des forces françaises. D’où certains doutes et inquiétudes qui ont pu être exprimés. Sont-ils totalement infondés? Pas forcément. Selon l’édition 2020 des chiffres clés de la Défense, l’armée de l’Air & de l’Espace dispose actuellement de 102 Rafale.
Et, en mai dernier, son chef d’état-major [CEMA&E], le général Philippe Lavigne avait souligné lors d’une audition parlementaire que la « modernisation de notre aviation de combat [était] primordiale dans une environnement où les menaces et les défenses sont de plus en plus complexes ». Et d’ajouter : « Je pense en particulier au Rafale en remplacement accéléré de nos flottes anciennes dont certaines sont déjà à bout de souffle. »
Douze Rafale prélevés sur la dotation de l’armée de l’Air & de l’Espace, c’est presque l’équivalent d’un escadron, alors que son activité opérationnelle est toujours aussi élevée… Et si l’on considère que les Forces aériennes stratégiques [FAS] ne seront pas concernées, alors l’essentiel de l’effort devrait reposer sur la 30e Escadre de Chasse [et donc sur les escadrons 2/30 Normandie-Niémen et 3/30 Lorraine]. Dans le même temps, les Mirage 2000D de la 3e Escadre sont en cours de modernisation [pour 55 d’entre-eux].
En outre, Athènes veut aller vite dans ce dossier, le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, ayant évoqué l’arrivée des premiers Rafale dès 2021 [et un commande finalisée en 2022]. Ce qui suppose, sauf à augmenter la cadence de production, que les six Rafale neufs attendus par la force aérienne grecque seront prélevés sur les 28 que doit recevoir l’armée de l’Air & de l’Espace entre 2022 et 2024.
Pour autant, pour Mme Parly, il n’est pas question de faire la fine bouche. « Il est assez curieux dans notre pays d’entendre les esprits chagrins lorsqu’un projet historique se concrétise », a-t-elle lancé lors d’une audition à l’Assemblée nationale, ce 18 septembre. « Alors, je le redis, c’est une excellente nouvelle pour l’Europe et, de ce point de vue, j’espère que cela contribuera à affermir encore la stratégie concernant la politique d’exportation de l’armement dont je souhaite qu’elle puisse de plus en plus se développer en faveur de nos partenaires europénes », a-t-elle continué.
En outre, a poursuivi Mme Parly, « nous nous sommes suffisamment désolés de voir l’armée de l’Air belge privilégier le F-35, par exemple, pour mieux nous féliciter de ce choix » du gouvernement grec en faveur du Rafale. « Nous ne pouvons pas à la fois promouvoir une politique de préférence européenne […] et puis nous désoler lorsque la Grèce fait ce choix », a-t-elle insisté.
Quant aux conséquences opérationnelles qu’aura ce prélèvement de 12 Rafale sur la dotation de l’armée de l’Air & de l’Espace, Mme Parly ne les a pas éludées.
« Vous imaginez bien que c’est ma priorité que de m’assurer que de tels prélèvements n’auront pas d’impact opérationnel sur nos forces. C’est ma responsabilité première », a fait valoir Mme Parly, qui s’est défendu d’exercer ses fonctions « avec légèreté ».
« J’aimerai qu’il soit bien compris […] par les parlementaires que nous examinons ces possibles prélèvements avec infiniment de sérieux et que nous ne laisseront pas faire de prélèvements qui pourraient avoir un impact opérationnel. Est-ce à dire qu’il n’y pas de marge de manoeuvre? Est-ce à dire qu’il n’y a pas de solution intelligente qui pourrait être mise en oeuvre? La réponse est évidemment non », a expliqué la ministre.
Quoi qu’il en soit, et même si le plan de relance n’a pas de volet militaire, l’année 2021 apportera sans doute des réponses, la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25 prévoyant une « clause de revoyure » à cette échéance. En clair, cet exercice doit permettre d’actualiser la trajectoire financière de la LPM, en fonction de l’évolution des menaces et de la conjoncture. Sans doute que ce sera l’occasion de commander de nouveaux Rafale pour l’armée de l’Air, sachant que le plan de charge des chaînes d’assemblage de Dassault Aviation [et de ses sous-traitants] est assuré jusqu’en 2024.
Fin août, Mme Parly avait évoqué une adaptation du calendrier des commandes de Rafale « afin que les chaînes de production de Dassault Aviation soient préservées. » L’idée serait d’avancer la commande de 30 exemplaires, laquelle est pour le moment prévue en 2023.
Photo : © armée de l’Air & de l’Espace