Audacieux au combat, patriote ardent et modeste dans la victoire : Edgard Tupët-Thomé, Compagnon de la Libération, nous a quittés

L’un des quatre derniers Compagnons de la Libération vient de nous quitter. En effet, Edgard Tupët-Thomé, qui venait de fêter son centième anniversaire à l’Institut national des Invalides, s’est éteint ce 9 septembre. Son décès a été confirmé par le ministère des Armées, qui « se souviendra de son audace au combat, de son patriotisme ardent, de sa modestie dans la Victoire. » Et d’ajouter : « Edgard Tupët-Thomé reste un modèle d’engagement, un exemple du service désintéressé au nom d’un idéal. »

Né le 19 avril 1920 à Bourg-la-Reine [Hauts-de-Seine], Edgard Tupët entame des études de théologie après son baccalauréat. Mais, n’ayant pas la vocation, il décide de s’engager à l’âge de 18 ans au sein du 8e Régiment de Zouaves, alors implanté à Mourmelon. En septembre 1939, la France venant de déclarer la guerre à l’Allemagne qui venait alors d’envahir la Pologne, il prend part à l’offensive de la Sarre, qui voit les troupes françaises progresser jusqu’à la 4 km de la ligne Siegfried. Mais cette opération n’aura pas de lendemain : elle sera arrêté après l’annonce du pacte germano-soviétique.

Lors de la campagne de France de mai-juin 1940, Edgard Tupët, alors sergent, participe à la protection de l’embarquement du corps expéditionnaire britannique à Dunkerque. Mais, le 4 juin, il est fait prisonnier. Par pour longtemps : six jours plus tard, le jeune sous-officier profite de son transfert vers l’Allemagne pour s’évader. N’acceptant pas l’armistice demandé par le maréchal Pétain, il n’a qu’un seul objectif : rejoindre les Forces françaises libres [FFL] pour continuer le combat.

Ses tentatives pour rejoindre le Royaume-Uni ayant été vaine, Edgard Tupët prend un emploi à Clermont-Ferrand peu après sa démobilisation. C’est là que, par hasard, il entre en contact avec Roger Warin [alias Wybot], du réseau de Résistance Donald, dont il deviendra, avec Stanislas Mangin, l’un des rouages.

En mars 1941, Roger Warin ayant établi une liaison directe avec l’état-major de la France Libre à Londres, via Pierre Fourcaud, chargé de mission du général de Gaulle, Edgard Tupët devient l’un des quatre premiers engagés militaires « secrets » de la France Libre.

Après avoir assuré des missions de liaison et tenté vainement de faire libérer Pierre Fourcaud qu venait d’être arrêté, le jeune homme finit par rejoindre l’Angleterre, après un périple l’ayant conduit à traverser l’Espagne et le Portugal. À Londres, ayant pris le pseudonyme d’Edgard Thomé, il est affecté à l’état-major particulier du général de Gaulle et suit la formation parachutiste via du Bureau des Opérations aériennes [BOA]. Puis, il rejoint le Bureau central de Renseignements et d’Action [BCRA], pour le compte duquel il sera parachuté dans la région de Châteauroux avec le radio Joseph Piet.

Malgré une blessure reçue à la tête lors de son parachutage, Edgard Tupët-Thomé assume la responsabilité des opérations aériennes ainsi que celle de la branche « Action » du réseau « Ali-Tir », dont la branche « renseignement » est dirigé par Stanislas Mangin.

En mai 1942, et en raison de ses blessures, il s’envole vers l’Angleterre pour y être soigné. Lors de sa convalescence, il demande à être affecté au sein d’une unité combattante. Et c’est ainsi que, avec son camarade Mangin, il rejoint le Détachement d’instructeurs commando de Saint-Pierre-et-Miquelon, puis, un an plus tard, celui des Antilles, dont il prend le commandement de la 2e compagnie.

À sa demande, le lieutenant Tupët-Thomé est muté au 4e Bataillon d’infanterie de l’Air [BIA], qui a alors ses quartiers à Camberley, en Angleterre. Puis, en janvier 1944, il est nommé commandant en second de la 2e compagnie du 3e BIA, qui deviendra le 3e Régiment de Chasseurs Parachutistes [RCP].

Avec son unité, en août 1944, il est parachuté dans la secteur de Daoulas [Finistère]. Avec ses hommes, il enlève la Kommandantur, alors défendue par 60 soldats allemands [12 seront tués et 40 faits prisoonniers]. Puis il lance l’assaut contre la garnison de Landerneau, laquelle essuie de lourdes pertes. Sa section est ensuite affectée à la 6e Division Blindées de l’US Army, pour laquelle elle assure des missions de reconnaissance.

Fin août 1944, Edgard Tupët-Thomé est parachuté une seconde fois, dans le Jura. Et là encore, aves ses hommes, il va particulièrement se distinguer. Son unité s’empare de la localité de Clerval [Franche-Comté] et y repoussera les contre-attaques des troupes allemandes, leur infligeant de lourdes pertes malgré un rapport de forces à son désavantage [trente tués, un char détruit].

En avril 1945, l’officier, qui s’apprête à fêter ses 25 ans, est parachuté à la tête de sa section aux Pays-Bas, avec la mission d’attaquer les voies de communications de l’ennemi. Ennemi à qui il inflige encore des pertes importantes.

Après la capitulation allemande, Edgard Tupët-Thomé quitte l’uniforme pour le costume d’administrateur des colonies, après avoir été dplômé de l’Ecole coloniale d’administration. Affecté en Tunisie, où il deviendra Président Directeur Général de la Coopérative viticole de Takelsa, il décide de partir au Canada pour y gérer une propriété agricole durant cinq ans. De retour en France, il entame des études pour devenir ingénieur. Après avoir travaillé au bureau d’études techniques de Singer France, puis dans un laboratoire pharmaceutique, il rejoint pendant un temps l’entreprise automobile Panhard, avant de se reconvertir dans le tourisme.

Compagnon de la Libération et Grand Croix de la Légion d’Honneur [depuis janvier 2020], Edgard Tupët-Thomé était titulaire de la Croix de Guerre avec six citations et de la Médaille commémorative des Services volontaires dans la France libre. Il était également membre de l’Ordre de l’Empire britannique et Chevalier de l’Ordre d’Orange Nassau [Pays-Bas].

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