Le torchon brûle entre la Pologne et la Biélorussie

Avant sa réélection – contestée – à la tête de la Biélorussie, le président Alexandre Loukachenko disait pis que pendre de la Russie, qu’il accusait de vouloir mettre la main sur son pays. Mais, face à une contestation grandissante, il a viré casaque et s’en prend désormais à ses voisins – la Lituanie et la Pologne – tout en agitant la menace d’une intervention de l’Otan.

Malgré les démentis fermes faits par Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Alliance atlantique et même s’il est déjà assuré du soutien de la Russie dans le cas où il perdrait le contrôle de la situation à Minsk, M. Loukachenko a continué dans cette veine, ce 28 août.

Pour les Occidentaux, la « Biélorussie, c’est juste un tremplin vers la Russie, comme toujours », a-t-il dit, selon des propos rapportés par l’agence Belta. « Contrairement à Hitler qui avait envoyé son armée sur Moscou, eux cherchent à casser le pouvoir en place, le remplacer par un nouveau qui demandera une aide militaire à un autre pays et déploiera des troupes », s’est-il risqué à affirmer.

La veille, il s’en était pris à la Pologne, l’accusant d’avoir l’intention de mettre la main sur la région frontalière de Grodno, dans le cas où la Biélorussie sombrerait dans le chaos. À noter que les forces biélorusses ont été massivement déployées dans ce secteur, où, d’ailleurs, elles mènent actuellement des exercices avec des officiers du renseignement militaire russe dans le cadre des manoeuvres « Polar Star ».

En outre, pour M. Loukachenko, l’éventuel transfert d’avions F-16 américains d’Allemagne vers la Pologne constituerait une « menace potentielle » pour la Biélorussie. « Ils seront à 15-20 minutes de vol de notre territoire. Pour moi, en tant que commandant en chef, c’est une question. On ne sait pas avoir quoi ils seront armés. Peut-être avec des armes nucléaires. Alors j’ai dû réagir », a-t-il dit, selon Beita.

Et pour faire bonne mesure, le ministère biélorusse des Affaires étrangères a convoqué le chargé d’affaires polonais à Minsk pour protester contre les « ingérences » de la Pologne dans les affaires intérieures de la Biélorussie.

Aussi, Varsovie a fini par réagir. Les commentaires de M. Loukachenko au sujet des intentions qu’il prête à la Pologne sont « inacceptables », a dénoncé Krzysztof Szczerski, un proche d’Andrzej Duda, le président polonais. « Personne n’a de telles intentions en Pologne et c’est de la propagande », a-t-il insisté.

De son côté, le sous-secrétaire d’État au ministère polonais des Affaires étrangères, Marcin Przydacz, a rappelé que, par le passé, « ce n’est pas la Pologne qui avait déplacé les frontière mais un autre voisin de la Biélorussie ».

Outre la Pologne, la Biélorussie est également en froid avec la Lituanie, qui accueilli sur son sol Svetlana Tikhanovskaïa, la figure de proue de l’opposition à M. Loukachenko. Le 23 août, Vilnus a accusé son voisin d’avoir violé son espace aérien avec au moins un hélicoptère d’attaque Mi-24. Que ce serait-il passé s’il avait été abattu?

Quoi qu’il en soit, l’Union européenne, qui ne reconnaît pas les résultats de l’élection présidentielle du 9 août dernier, a fait part de son soutien au « peuple biélorusse » et condamné les violences commises à l’encontre des manifestants. Et l’Organisation pour la Sécurité et la coopération en Europe [OSCE], par la voix d’Edi Rama, le Premier ministre albanais qui en assure actuellement la présidence, a dénoncé une situation « profondément alarmante » en Biélorussie.

« Le gouvernement biélorusse a réagi aux protestations par un usage disproportionné de la force, des détentions généralisées et des restrictions à la liberté des médias », a déploré M. Rama, ce 28 août, à l’ouverture d’une réunion spéciale du Conseil permanent de l’OSCE dédié à la Biélorussie.

« Plus de 100 journalistes ont été détenus, déportés ou ont fait l’objet de violences. C’est profondément alarmant, tout comme le sont les pertes en vies humaines et les informations sur des disparitions de personnes. Le tableau est pour le moins laid. C’est un cauchemar potentiel pour la Biélorussie et pour son peuple », a continué le Premier ministre albanais, avant de rappeler qu’il avait adressé à M. Loukachenko, la semaine passée, une proposition de médiation.

Photo : Par Ijanderson977 — Travail personnel, Domaine public

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