Pour Israël, l’accord avec Abu Dhabi ne doit pas remettre en cause sa supériorité militaire au Moyen-Orient

Le 13 août, le président américain, Donald Trump, a annoncé qu’Israël et les Émirats arabes unis allaient établir officiellement des relations diplomatiques. Ce qui n’était pas vraiment une très grande surprise, étant donné les rapports officieux que ces deux pays entretenaient jusqu’alors, notamment pour contenir l’Iran, leur adversaire commun.

Pour arriver à un tel accord, négocié sous l’égide des États-Unis, Israël a suspendu [sans pour autant y renoncer] son projet visant à coloniser des territoires en Cisjordanie, ce qui signera probablement la fin de l’initiative de paix arabe [appelée « plan Abdallah »], selon lequel les pays arabes n’établiraient des relatiosn diplomatiques avec l’État hébreu qu’en échange de la restitution des territoires qu’il a conquis à la faveur de la Guerre des Six-Jours et de la création d’un État palestinien ayant Jérusalem-Est pour capitale.

Cependant, selon le quotidien Yediot Aharonot [éditeur du site Internet Ynet News, ndlr], a indiqué, le 18 août, que la perspective d’acquérir des F-35 ainsi que des drones de facture américaine aurait fini de convaincre Abu Dhabi de signer cet accord.

« L’administration du président Trump est sur le point de vendre des avions de combat F-35 et des drones aux Émirats arabes unis via une clause secrète faisant partie de l’accord visant à établir des relations diplomatiques entre Israël et la nation du Golfe », a en effet écrit Ynet, citant des responsables américains et émiratis.

Or, jusqu’à présent, Israël s’était toujours opposé à de telles ventes, au nom du « Qualitative Military Edge » [QME, avantage militaire qualitatif], c’est à dire la règle qui, depuis la guerre du Kippour [1973] doit lui assurer la supériorité militaire au Moyen-Orient. Et ce serait toujours le cas, à en croire le cabinet du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu.

« L’accord avec les Émirats n’inclut aucune clause de ce type, et les États-Unis ont clairement indiqué qu’ils veilleront toujours à ce qu’Israël ait l’avantage qualitatif », a-t-il en effet réagi, infirmant ainsi l’information donnée par le Yedioth Ahronoth. Et d’insister : « Dans les pourparlers [relatifs à l’accord de normalisation des relations avec les Émirats], Israël n’a pas renoncé à son opposition à la vente d’armes et de technologies de défense susceptibles de modifier l’équilibre militaire à un pays du Moyen-Orient. »

En outre, selon The Times of Israel, un responsable de la Maison Blanche a également nié l’existence d’une telle clause secrète dans l’accord conclu par Israël et les Émirats.

Cela étant, à y regarder de plus près, ces déclarations ne remettent pas en cause le fait que les Émirats arabes unis sont susceptibles de se procurer des F-35… Elles affirment seulement qu’un tel contrat ne fait pas partie de l’accord de normalisation.

Cité par l’agence Reuters, le ministre israélien de l’Énergie, Yuval Steinitz, a rappelé que les États-Unis vaient déjà vendu aux Émirats arabes unis, « contre notre gré », des avions de combat F-16 « plus avancés que ceux possédés par Israël ainsi que des F-15 à l’Arabie Saoudite. » Loin de voir un éventuel danger particulier à voir des F-35 être vendus à Abu Dhabi, il en a quasiment défendu l’idée.

« Tout F-35 qui finira par se retrouver aux Émirats arabes unis – même si nous n’en serons pas particulièrement heureux cas nous voulons toujours être les seuls à disposer de telles armes dans la région – menacera l »Iran bien plus que nous pouvons le faire », a estimé M. Steinitz.

A contrario, le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, rival de M. Netanyahu, a estimé qu’il n’était pas « bon pour Israël » que le F-35 puisse être vendu à un autre pays du Moyen-Orient. « Nous devons parler aux Émiratis, aux Américains, et nous assurer que nos intérêts sécuritaires sont défendus », a-t-il affirmé, sans pour autant préciser s’il s’opposerait ou pas à une telle vente.

« Je vous le dis : il ne faut pas prendre de risques avec la sécurité. Nous nous assurerons – nous nous assurerons bien – que nos intérêts sécuritaires seront préservés. […] On peut trouver un accord de paix tout en étant responsable d’un point de vue sécuritaire. Non seulement on le peut, mais on le doit », a-t-il martelé.

Ancien pilote de la force aérienne israélienne et responsable du renseignement militaire, le général Amos Yadlin a rappelé que les Émirats arabes unis ont toujours cherché à acquérir des armes « très sophistiquées » auprès des États-Unis. « Il est important de s’assurer qu’un tel processus inclura le ministère israélien de la Défense, celui des Affaires étrangères, ainsi que les Forces de défense israélienne si jamais il dout aboutir à une réduction de l’avantage militaire qualitatif d’Israël », a-t-il prévenu.

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