Des Mirage 2000D ont effectué une démonstration de force en Centrafrique, en soutien des Casques bleus
Si elle s’est un peu améliorée depuis la signature, le 6 février 2019, de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation, la situation sécuritaire de République centrafricaine demeure très fragile, plusieurs groupes armés s’opposant pour le contrôle des ressources naturelles de certains territoires, avec, en plus, des considérations ethniques.
Ainsi, par exemple, en mars, à Bria le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique [FPRC] a éclaté selon des lignes de fractures ethniques, donnant naissance à deux factions rivales : l’une dominée par l’ethnie gula, l’autre, par les ethnies runga et kaga. Soutenue par le Parti pour le rassemblement de la nation centrafricaine [PRNC, non signataire de l’accord de paix, ndlr], la première s’en est violemment pris à la seconde, ainsi qu’aux populations arabes et à une patrouille de la Mission multidimensionnelle intégrées des Nations unies pour la stabilisation de la République centrafricaine [MINUSCA].
Ces tensions entre ces deux factions ont favorisé le renforcement de la présence d’un troisième groupe à dominante peule, à savoir l’Union pour la Centrafrique [UPC] d’Ali Darassa. Et cela, est-il affirmé dans le dernier rapport des groupes d’experts de l’ONU pour la République centrafricaine, avec des « violations systémiques des droits humains » et des « escarmouches » avec dles Forces armées centrafricaines [FACa].
Ayant des intérêts communs avec l’UPC, le groupe 3R [Retour, réclamation et réhabilitation], également à dominante peule, est l’autre organisation armée citée dans le rapport du groupe d’experts pour sa « quête constante de nouveaux territoires » afin de « maximiser la taxation des activités de transhumance » et contrôler les « activités sur les sites d’exploitation minière » situés dans sa zone d’influence, c’est à dire dans l’ouest du pays. Ses éléments ont ainsi été vus dans les préfectures de la Lobaye, de l’Ombella-Mpoko et de l’Ouham, où leur présence n’avait jusqu’à présent jamais été signalée.
« Des sources locales ont confirmé que malgré les engagements pris au titre de l’Accord, les deux groupes [UPC et 3R] n’avaient cessé d’étendre leurs zones de contrôle territorial depuis qu’ils l’avaient signé, en février 2019 », avance ainsi le rapport, lequel souligne que des « violations des droits humains par des éléments des 3R ont continué d’être signalées. »
La MINUSCA tente évidemment de contrer l’expansion de ces groupes. Ce qui donne parfois lieu à des accrochages, comme cela a été le cas le 14 août, dans le nord-ouest de la Centrafrique.
« Il y a eu des affrontements entre [le groupe] 3R et la MINUSCA vendredi dernier [14/08], avec des tirs et usage de matériel lourd par les éléments des 3R », a en effet déclaré Vladimir Monteiro, le porte-parole de la mission de l’ONU, le 17 août, selon l’AFP. Ce qui a nécessité de faire appel au détachement Chasse [DETCHASSE] de la force Barkhane, comme cela s’est déjà produit au moins à trois reprises par le passé.
« Des avions français ont effectué vendredi 14 août une démonstration de force contre un groupe armé dans le Nord-Ouest de la Centrafrique en soutien de Casques bleus », a dit M. Monteiro.
Une patrouille d’avions de combat français, soit deux Mirage 2000D, ont donc effectué un « show of force » [démonstration de force], qui consiste à survoler à très basse altitude une position hostile en afin d’adresser à ceux qui la tiennent un « ultime avertissement » avant l’ouverture du feu.
La précédente intervention de ce type avait été réalisée en février dernier, deux Mirage 2000 ayant effectué un « show of force » à la demande et en appui de la MINUSCA qui observait des regroupements de groupes armés à proximité de Birao.
« Nos Casques bleus sont parvenus à mettre en déroute ces éléments [du groupe 3R], trois bases vers la ville de Bocaranga ont été détruites et l’opération se poursuit », a ensuite ajouté M. Monteiro.
Quoi qu’il en soit, le nouveau chef d’état-major de la composante militaire de la MINUSCA, le général français Renaud Sénétaire, aura fort à faire dans les mois à venir, d’autant plus que la Centrafrique va entrer en campagne électorale.
« Nous sommes ici pour maintenir au plus bas niveau possible les agissements des groupes armés. Pour cela, nous sommes déployés sur tout le territoire. Notre deuxième mission en tant que Force, c’est aussi de nous protéger en tant que Mission, protéger notre logistique, les axes et de permettre à tout le monde de circuler librement », explique le général Sénétaire, qui a récemment pris ses fonctions.
Et la tâche n’est pas aisée. Ainsi, certains responsables à l’origine du chaos dans lequel la Centrafrique est plongée refont surface, comme François Bozizé, candidat à l’élection présidentielle de décembre prochain, ou encore Michel Djotodia, l’ex-homme fort de la coalition rebelle de la Séléka, revenu au pays pour réaffirmer son emprise sur la communauté gula [ce qui serait à l’origine des troubles constatés à Bria]. En outre, le groupe d’experts de l’ONU met en garde contre un afflux de combattants étrangers, originaires principalement du Soudan et souligne que le « trafic régional d’armes s’est également poursuivi le long d’autres itinéraires. »
Photo : Mirage 2000D (c) EMA – Archive