Le président Macron entend tirer les « conséquences militaires » de l’attaque contre des civils français au Niger

Plus de 48 heures après, l’attaque qui a coûté la vie à six ressortissants français travaillant pour l’ONG Acted [Charline Fouchet, Myriam Dessaivre, Nadifa Louassa, Stella Gautron, Léo Ruelle et Antonin Girardi] ainsi qu’à leur chauffeur, Boubacar Garba Soulay, et à leur guide, Kadri Abdou, lors d’une excursion touristique dans la région de Kouré [Niger] n’a toujours pas été revendiquée.

Et le ratissage de la zone concernée, située à soixante kilomètres au sud-est de Niamey, par la force Barkhane, qui a engagé des moyens aériens, et les forces nigériennes, n’a rien donné. D’ailleurs, les investigations menées par les policiers de la Direction générale de la sécurité intérieure [DGSI] et ceux de la Sous-direction antiterroriste [SDAT] dans le cadre d’une enquête ouverte par le Parquet national antiterroriste, le 10 août, s’annonce très compliquée. D’ailleurs, on voit mal comment les auteurs de cette attaque pourront être identifiés. Et quand bien même ils le seraient, les chances de les retrouver sont minces. D’autant plus qu’il n’est pas impossible qu’ils soient « neutralisés » dans d’éventuels combats à venir.

Pour le moment, on sait que le mode opératoire est celui généralement suivi par les jihadistes et que le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM], lié à al-Qaïda, a nié toute implication dans cette attaque. Ce qui fait que les soupçons s’orientent vers l’organisation rivale, à savoir l’État islamique au grand Sahara [EIGS].

D’autant plus que l’État islamique en Afrique de l’Ouest [ISWAP, issu du groupe terroriste nigérian Boko Haram], avec lequel l’EIGS entretient d’étroites relations, s’en prend régulièrement aux travailleurs humanitaires [comme encore le 22 juillet dernier, dans le nord est du Nigéria]. Cela étant, on ignore encore si l’attaque de Kouré avait été planifiée ou si elle a été de « circonstance ».

Par ailleurs, étant en conflit ouvert avec le GSIM pour des raisons idéologiques et des questions de contrôle de territoire, l’EIGS est sous la pression de Barkhane et des forces armées partenaires dans la région dite des trois frontières [car située aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso]. D’où l’hypothèse de représailles de l’organisation jihadiste en réponse aux coups qui lui sont portés.

Quoi qu’il en soit, l’attaque de Kouré aura des suites sur le terrain militaire. C’est en effet ce qu’a laissé entendre le président Macron, à l’issue d’un Conseil de défense organisé par vidéo-conférence ce 11 août.

« Il est important qu’on puisse faire le point sur la situation au Niger, les éléments qui sont en notre possession, les avancées de l’enquête, les démarches diplomatiques qu’on doit effectuer, évidemment les conséquences militaires qu’on doit en tirer, les conséquences sur l’ensemble de nos dispositifs dans la région » du Sahel, a en effet affirmé M. Macron, près de 8 mois après le sommet de Pau, qui avait impulsé une nouvelle dynamique dans le combat contre les groupes jihadistes.

« J’ai décidé de renforcer les mesures de sécurité pour nos ressortissants dans la région. Nous poursuivons l’action pour éradiquer les groupes terroristes avec l’appui renforcé de nos partenaires », a également annoncé M. Macron, via Twitter.

Confronté à une double menace jihadiste [GSIM et EIGS au nord et ISWAP et Boko Haram au sud], le président du Niger Mahamadou Issoufou, avait demandé, en juillet 2019, la création d’une « coalition internationale de lutte contre le terrorisme au Sahel et au lac Tchad à l’image de celle mise en place pour lutter contre Daesh au Moyen-Orient. » Et d’insister : « Si demain, le terrorisme arrive à vaincre nos États [du Sahel], il ira en Europe et aux États-Unis. »

« En Irak et en Syrie, quand il a fallu lutter contre Daesh, il y a eu les armées les plus puissantes du monde. Ces armées ont mis trois ans avant de défaire Daesh. C’est pour ça que je suis étonné quand on nous critique […] ou on nous reproche de ne pas pouvoir vaincre cette menace-là avec les moyens qui sont les nôtres. Ce n’est pas juste », avait aussi souligné le président nigérien.

Pour le moment, la Coalition pour le Sahel, formée à l’initiative de la France, s’appuie militairement sur Barkhane, la Force conjointe du G5 Sahel, les forces partenaires ainsi que, plus récemment, la Task Force Takuba, qui monte progressivement en puissance avec des unités de forces spéciales européennes [France, Estonie, Suède, République tchèque, Italie]. La Minusma, la mission des Nations unies au Mali, n’a pas le mandat pour s’attaquer aux groupes jihadistes.

Photo : Archive/ EMA

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