Les députés envisagent l’achat de blindés Sherpa pour la Gendarmerie

Produits par Berliet [constructeur aujourd’hui disparu], les Véhicules blindés à roues de la Gendarmerie [VBRG] affichent plus de 40 ans de service. Souvent évoquée, leur remplacement n’a jamais abouti jusqu’à présent, alors que le maintien en condition opérationnel [MCO], malgré toute la bonne volonté du monde, est de plus en plus compliqué à assurer, sauf à « cannibaliser » certains exemplaires, c’est à dire à récupérer les bonnes pièces pour faire continuer à faire fonctionner ceux qui sont encore dans un état acceptable.

Sur les 155 VBRG livrés à la Gendarmerie mobile pour ses missions de maintien de l’ordre [MO], près de 80 sont encore opérationnels. Et encore faut-il le dire vite car les « acrobaties » en matière de MCO ont atteint leurs limites.

Chef de l’inspection générale de la Gendarmerie nationale [IGGN], le général Michel Labbé, la difficulté est de trouver un véhicule adéquat, c’est à dire offrant un bon niveau de protection aux gendarmes, susceptibles d’être exposés à des tirs d’armes, et capables de dégager des obstacles. Or, pour cela, il faut une lame… et un moteur à l’arrière.

« Il n’y a pas un véhicule blindé, aujourd’hui, avec une lame, capable de pousser quelque chose s’il n’a pas son moteur à l’arrière », avait expliqué le général Labbé. « Quel est l’industriel qui produit des véhicules blindés avec un moteur à l’arrière? Il n’y en a pas », avait-il ajouté, estimant qu’il fallait « envisager » de relever « un vrai défi technologique ».

La solution trouvée par la Gendarmerie a donc consisté à faire du neuf avec du vieux. C’est à dire en ayant recours à des Véhicules de l’avant blindé [VAB] cédés par l’armée de Terre [qui ont un moteur à l’arrière tout en pouvant être dotés d’une lame] et en modernisant les VBRG, en leur installant une nouvelle motorisation. Pour autant, cela ne pouvait pas régler le problème de la vetusté des autres composants…

Et, effectivement, selon les députés Jean-Louis Thiériot et Benjamin Griveaux, qui viennent de remettre un rapport sur l’avenir de la Base industrielle et technologique de Défense [BITD], les deux VBRG qui ont été « rétrofités » n’ont « pas pu être engagés en mission et ont dû être renvoyés à l’industriel. »

Quoi qu’il en soit, il n’y a pas 36 solutions. Soit il s’agit de continuer la rénovation des VBRG ayant encore un minimum de potentiel, ce qui est « coûteux et infructueux », souligne le rapport, car il en coûterait 300.000 euros par engin pour gagner seulement dix ans de service. Soit il décidé une bonne fois pour toute de procéder à l’acquision de véhicules neufs, à un prix unitaire de 700.000 euros, soit « à peu près le double du prix du retrofit pour quatre fois plus d’espérance de vie, avec un gain opérationnel net et, vraisemblablement, de nettes économies de MCO. »

Selon MM. Thiériot et Griveaux, Arquus serait sur les rangs avec son véhicule Sherpa, produit à plus d’un millier d’exemplaires. La Gendarmerie « estimant avoir besoin de 89 blindés, un renouvellement complet de cette capacité coûterait à peu près 65 millions d’euros », ce qui est « tout à fait raisonnable », avancent-ils, en plaidant pour qu’un tel achat puisse se faire dans le cadre d’un plan de relance en faveur de la BITD.

Seulement, le moteur du Sherpa est à l’avant… Sur ce point, les rapporteurs soulignent que, actuellement, la gendarmerie mobile ne dispose que de 23 VBRG dotés de lames, dont 7 en métropole. « Ce qui est très peu en cas de troubles ‘du haut du spectre' », font-ils valoir. Mais pour cela, sans doute que les anciens VAB de l’armée de Terre pourront y remédier.

À noter que le GIGN est déjà doté de véhicules « Sherpa Light »  doté d’une échelle. Un exemplaire, alors à l’état de prototype [voir photo], avait été utilisé lors de l’assaut donné en janvier 2015 à Dammartin-en-Goële contre les frères Kouachi, les auteurs de l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo.

Par ailleurs, le 19 juillet, dans le cadre du projet de loi de budget rectifié pour 2020, le Sénat a voté une enveloppe de 75,3 millions d’euros [en autorisation d’engagement] pour renouveler une partie des véhicules utilisés par les policiers et les gendarmes [qui relèvent du mininstère de l’Intérieur tout en ayant conservé leur statut militaire, ndlr]. Cette mesure doit permettre d’acquérir, dès 2020, « environ 1.150 véhicules électriques [produits à Flins et à Maubeuge par Renault], 1.150 véhicules à essence et 1.500 vélos électriques de production française ».

« Ce renouvellement correspond à une hausse de 50% des plans d’équipement qui étaient prévus pour 2020 », s’est réjoui le ministère de l’Intérieur. « Ce premier renfort budgétaire qui correspond à une première tranche du plan de relance » qui permettra à la Police et à la Gendarmerie « d’exercer leurs missions dans de meilleures conditions, au profit d’un meilleur service public pour les citoyens », a-t-il ajouté. Et de préciser qu' »en termes d’économie de carburant, le verdissement du parc avec l’achat des 1.150 véhicules électriques permet une économie annuelle de 1,8 millions de litres de carburant, de l’ordre de 2,6 millions d’euros. »

Photo : Sherpa Light « échelle » du GIGN

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