L’Agence de l’innovation de Défense s’explique sur son choix, contesté, d’un robot-mule pour l’armée de Terre

Afin de pouvoir réaliser les essais d’un robot-mule en opération extérieure pour le compte de l’armée de Terre, l’Agence de l’Innovation de Défense [AID] lança un appel d’offres pour une machine ayant une « capacité de charge de 400 kg à 800 kg » et pouvant mener des missions connexes comme « le ravitaillement [munitions, alimentation ou autre] » ou la « liaison entre deux groupes distants ». La liste n’était pas exhaustive.

Au regard évaluation réalisées précédemment au Centre d’entraînement aux actions en zone urbaine [CENZUB] de Sissonne ou aux présentations faites à l’occasion du SOFINS, le salon des forces spéciales organisé tous les deux ans au camp de Souge, on s’attendait à voir sortir du chapeau soit l’estonien Milrem Robotics [associé au français CNIM], soit Sharks Robotics [allié à Nexter] ou soit le tandem formé par ARQUUS et l’Institut de recherche franco-allemand Saint-Louis.

Finalement, en décembre 2019, l’hebdomadaire Challenges révéla que le choix de l’AID s’était porté sur une solution proposée par le groupe français GACI Rugged Systems, associé à l’israélien Roboteam. Et de s’en étonner, dans la mesure où le THeMIS de Milrem Robotics/CNIM avait a priori obtenu les meilleurs notes techniques, loin devant le Probot proposé par le tandem franco-israélien. Mais la différence s’était faite sur le prix, le second étant quatre fois moins cher que le premier.

Le directeur général de Gaci Rugged Systems, Joël Collino, s’en était alors expliqué dans ces colonnes. « Le prix proposé pour le PROBOT est certes agressif mais n’est absolument pas le résultat d’un dumping, ni de matériel d’occasion puisque la fabrication se fera en nos locaux. Par contre, […] ce prix est issu d’une offre qui n’intègre pas de grands groupes de défense dans son montage industriel », avait-il confié. « Notre contrat d’OEM avec ROBOTEAM nous assure l’accès aux sources de conception pour que nos bureaux d’étude puisse apporter des améliorations ou modifications à ce robot conçu par ROBOTEAM et qui est, pour le marché français, fabriqué par nos soins », avait-il ajouté.

Pour autant, six mois plus tard, ce choix continue de faire des vagues, à en juger par les questions posées par plusieurs députés [ Jean-Jacques Ferrara, associant François Cornut-Gentille, et Bastien Lachaud] à Emmanuel Chiva, le directeur de l’AID, lors d’une récente audition à l’Assemblée nationale.

« Le choix du projet Robopex n’est pas une erreur mais une décision pleinement assumée », a d’emblée assuré M. Chiva, avant d’évoquer des erreurs « factuelles » dans le papier de Challenges. « Nous n’avons pas acquis de matériel étranger, nous avons financé une expérimentation à petite échelle, puisqu’il s’agit d’une série de 5 robots, visant à définir le cadre d’emploi d’un robot mule en opération », a-t-il ensuite précisé.

« Nous avons lancé une compétition européenne afin d’acquérir un robot et de le tester en opération. La PME vainqueur de la compétition n’est pas israélienne mais 100 % française. Elle a proposé d’assembler en France, des composants mécaniques et électroniques d’origine israélienne, de la même manière qu’une entreprise utilise des composants d’origine chinoise pour assembler un ordinateur. On ne peut donc pas dire que nous avons acquis un robot israélien », a explique Emmanuel Chiva.

« Je le répète, il ne s’agit pas d’acquérir une grande série de robots dans le cadre du programme Scorpion par exemple. Il s’agit de procéder à une expérimentation qui nous permettra de déterminer les contours de ce que pourrait être le robot mule de demain, répondant au mieux aux besoins de nos forces », a encore insisté le directeur de l’AID. Et d’ajouter : « Cette expérimentation permettra de définir la meilleure adéquation entre classe de robot et usage notamment. »

« Cette initiative a fait parler d’elle car c’était la première fois qu’une expérimentation était notifiée aussi vite, après un essai au centre d’entraînement au combat en zone urbaine de l’armée de terre, pleinement intégrée à cette démarche », a fait valoir M. Chiva.

Par ailleurs, le directeur de l’AID a d’ores et déjà annoncé que le mise à jour du document de référence d’orientation de l’innovation de défense [DrOID], publié pour la première fois en 2019, va préciser les priorités européennes de coopération et mettra l’accent sur la supériorité opérationnelle et l’autonomie stratégique.

À ce sujet, a-t-il conclu, « le projet VMAX de planeur hypersonique est développé en France » et « nous avons dégagé des crédits supplémentaires pour les armes à énergie dirigées » tandis que des « expérimentations de systèmes lasers pour la lutte anti-drones sont en cours » et que « les travaux sur le canon électromagnétique de l’institut Saint-Louis sont une référence européenne. »

Photo : Le Probot (c) ROBOTEAM

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