14 juin 1940 : Les soldats français tiennent en échec l’armée allemande dans le secteur fortifié de la Sarre

14 juin 1940. L’histoire a retenu que, ce jour, là, les forces allemandes entrèrent dans Paris, alors déclarée ville ouverte. Pourtant, au même moment, des soldats français opposaient un résistance farouche à l’envahisseur dans le secteur fortifié de la Sarre, sur une ligne reliant Saint-Avold et Sarralbe, en Moselle, dans un secteur de la Ligne Maginot.

La veille au soir, la situation des trois armées françaises [la 3e du général Condé, la 5e du général Bourret et la 8e du général Laure] chargées de défendre les Vosges, l’Alsace et la Lorraine paraît compromise étant donné qu’elles risquaient d’être encerclées, notamment après la percée du groupe d’armées A commandé par le général von Rundstedt sur le front de l’Aisne.

Défendu par un dispositif placé sous les ordres du général Hubert et reposant sur six régiments [soit 18.000 hommes] et une centaine de pièces d’artillerie, le secteur de la Sarre constitue un verrou que l’état-major allemand entend faire sauter, conformément à la directive n°13 émise par Adolf Hitler. L’objectif est en effet de « percer la Ligne Maginot à son point le plus faible, entre Saint-Avold et Sarreguemines, dans la direction Lunéville-Nancy. »

Au regard des forces en présence, le sort de la bataille est presque joué d’avance.

En effet, le 14 juin au matin, la 1ere armée allemande du général von Witzleben lance l’opération « Tiger », en engageant six divisons d’infanterie et plus de 1.000 canons. L’ensemble est appuyé par une centaine d’avions de chasse et de bombardiers.

À six heures trente du matin, un déluge de feu s’abat sur les positions françaises, comparable, écrit l’historien Dominique Lormier [« Les vérités cachées de la défaite de 1940« , aux Éditions du Rocher], à celui de Verdun en 1916.

Persuadé qu’il ne reste plus grand chose des défenses françaises, le général von Witzleben lance ses six divisions d’infanterie à l’assaut. Seulement, comme le rappelle l’historien Roger Bruge [.pdf], « on a beaucoup travaillé pendant la ‘drôle de guerre’ et le soldat-terrassier a coulé du béton derrière les zones inondées, si bien que 90% des armes automatiques sous sous abri ».

Aussi, les fantassins allemands ne s’attendaient pas à devoir affronter une vive résistance de la part des soldats français ayant supporté les trois heures de bombardement en « rentrant la tête dans les épaules ». Les premières vagues d’assaut sont en effet décimées par les mitrailleuses, comme le rapporte le colonel Hort von Wolff du 222e régiment d’infanterie. « 9 heures : les troupes d’assaut sont bloquées sur place par le violent tir de mitrailleuses venant de la lisière nord de Puttelange, des bunkers de la zone inondée et des positions de la cote 248. Les pertes sont importantes », écrit-il [cité par M. Lormier].

Un temps réduits à l’inaction à cause du brouillard, les bombardiers allemands multiplient alors les piqués sur les postes avancés. Mais rien n’y fait.

Au fil de cette journée, le colonel von Wolff fera état à plusieurs reprises de « pertes importantes » infligées par les mitrailleuses et l’artillerie française, À 15h15, poursuit-il dans son rapport, le « tir français ne faiblit pas. Les éléments antichars des compagnies avancées sont hors de combat ou réduits au silence faute de munitions, qui ne peuvent être apportées en raison de la densité du feu adverse. Tous les bunkers français situés sur le front du régiment tirent sans arrêt. Les pertes sont lourdes. L’attaque doit être finalement arrêtée ».

« Si certains généraux de la Ire Armée allemande ont pensé défiler à Nancy le soir même et sabler le champagne sur la place Stanislas, il leur faut revenir à une vision plus réaliste des choses. Witzleben a attaqué le 20e corps non pas sur une position improvisée comme sur la Somme le 5 juin ou en Argonne le 9 juin mais sur un secteur de la ligne Maginot protégé par des centaines de petits blockhaus et des zones inondées. Et malgré l’inégalité des moyens – une division contre un régiment – les Français s’accrochent au terrain et ne le cèdent qu’au prix du sang », écrit Roger Bruge.

Le bilan de cette bataille varie selon les sources. Mais si l’on se fie aux rapports allemands, côté français, les six régiments ont eu 649 et 1.800 blessés. Mais l’opération Tiger aura coûté la vie à 1.200 soldats allemands et blessé 4.000 autres environ.

Le général Louis-Eugène Hubert, chef du 20e Corps, s’exclamera ; « ça, c’est une victoire! ». Mais une victoire qui restera sans suite. Le soir même, les défenseurs du secteur de la Sarre reçoivent l’ordre de « décrocher », c’est à dire d’abandonner leurs positions… alors que le commandement allemand était sur le plan de modifier ses plans d’attaque.

À lire : Les vérités cachées de la défaite de 1940 – Dominique Lormier – Les Éditions du Rocher – 19 euros

Photo : wikipedia

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