Les forces russes ont mené un exercice aéroporté inédit dans l’Arctique

Le dérèglement climatique aidant, l’importance stratégique de l’Arctique ne pourra que s’amplifier dans les années à venir, dans la mesure où il sera possible d’y exploiter les ressources naturelles qu’elle recèle [notamment les hydrocarbures] et que de nouvelles routes maritimes y seront ouvertes. Et cela motive quelques différends territoriaux entre les pays de la région.

L’un d’eux porte sur la dorsale de Lomonossov, une chaîne de montagne immergée qui traverse l’océan Arctique des eaux sibériennes jusqu’à l’île canadienne d’Ellesmere. La Russie affirme qu’elle est une extension de son plateau continental, ce qui lui permet de revendiquer une surface de 1,2 millions de kilomètres carrés. Mais le Danemark et le Canada ont une autre interprétation. Selon ces derniers, cette dorsale se rattache aux plaques continentale de l’Amérique du Nord et du Groenland.

Quoi qu’il en soit, l’Arctique est une priorité pour la Russie depuis maintenant une dizaine d’années, avec la publication d’une stratégie dédiée à cette région en 2009. Depuis, Moscou y a consenti d’importants investissements et y a renforcé sa présence militaire, notamment via la construction de nouvelles bases [et la réhabilitation de celles qui avaient été abandonnées depuis la fin de la période soviétique] et le déploiement de capacités de déni et d’interdiction d’accès.

En 2018, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a estimé que « la concurrence dans l’Arctique pourrait conduire à un conflit potentiel ».

« Depuis la reprise en main de sa présence militaire dans l’Arctique […], Moscou a relancé les patrouilles de ses bombardiers stratégiques aux frontières de l’Otan. Comparée à la situation dans la Baltique ou en mer Noire, les détections de bombardiers russes par les radars de l’Otan restent peu fréquentes et bien inférieures au niveau de la Guerre Froide. Néanmoins, les risques d’une évaluation erronée pourraient conduire à une escalade des tensions, comme quand Moscou a simulé l’attaque des radars de Vardo, financés par les États-Unis, en territoire norvégien », souligne ainsi une récente note de l’Institut français des relations internationales [IFRI].

Cela étant, poursuit-elle, la « reconstitution par la Russie de ses capacités arctiques continue donc de s’inscrire dans une conception fondamentalement défensive, non seulement centrée sur le le contrôle de son propre territoire et de ses défis spatiaux et climatiques, mais aussi destinée à dissuader de potentielles velléités d’influence des pays voisins, membres de l’Otan. Cependant, le contexte actuel les rend propices à une interprétation plus offensive. »

Quoi qu’il en soit, les forces russes mènent régulièrement des exercices dans la région. Le dernier en date a pris la forme d’une opération aéroportée [OAP] – inédite selon Moscou – qui a mobilisé trois avions de transport Il-76, chacun pouvant embarquer 125 parachutistes.

« Pour la première fois dans l’histoire du monde, des parachutistes russes, au sein d’une unité mixte, ont effectué un saut en parachute à haute altitude à partir d’un avion Il-76 d’une hauteur de 10.000 mètres dans les conditions extrêmes de l’Arctique, dans la région de l’archipel François-Joseph », a en effet annoncé le ministre russe de la Défense, ce 26 avril.

Cette OAP a été ordonnée par Segueï Choïgou. Elle a également marqué le 90e anniversaire de la création des forces aéroportées russes. Selon le ministère, elle a exigé l’utilisation d’un « système de parachutage spécial de nouvelle génération » et permis de tester de nouveaux équipements, dont des tenues de combat développées pour les conditions extrêmes.

Une fois au sol, les parachutistes russes ont mené un exercice visant à « identifier et détruire un groupe de sabotage et de reconnaissance ennemi fictif », en relation avec la Flotte du Nord.

« Nous effectuerons des exercices similaires chaque année, dans différentes régions de l’Arctique, avec une composition différente des participants impliqués et à différents moments de la formation », a assuré Iounous-bek Evkourov, le vice-ministre russe de la Défense.

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