Le Service de Santé des Armées cherche une solution innovante pour soigner les troubles auditifs des militaires

De par leurs activités, les militaires sont très exposés au risque de perte d’acuité auditive soudaine [SSNHL], laquelle peut être accompagnée d’acouphènes et de vertiges. Ainsi, le niveau de produit par un tir de fusil d’assaut peut atteindre les 160 décibels. Un avion à réaction au décollage fait autant de bruit, si ce n’est davantage.

Une étude conduite sur la période 2014-2016 par le Centre d’épidémiologie et de santé publique des armées [CESPA] évoque une perte auditive après un traumatisme sonore aigu dans 62% des cas. Et ces troubles de l’audition peuvent devenir irrémédiables.

En outre, il s’est avéré que les tests d’audition tels qu’ils sont pratiqués actuellement, c’est à dire par audiométrie tonale, ne permettent pas de détecter les lésions éventuellement provoquées par un traumatisme sonore, comme les atteintes synaptiques entre le nerf auditif et les cellules sensorielles de l’oreille interne ou synaptopathies cochléaire », était-il expliqué dans un numéro d’Actu Santé, le magazine du Service de Santé des Armées [SSA].

Généralement, ces troubles de l’audition peuvent se traduire par un gêne quand plusieurs personnes parlent en même temps.

Aussi, l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées [IRBA] s’est impliqué dans plusieurs études pour améliorer le dépistage des troubles de l’audition chez les militaires et en assurer le suivi. D’où le projet ECO [Exposition à des flux auditifs multiples : conséquences sensorielles et Cognitives] mené en partenariat avec des laboratoires civils. Les travaux qui en sont issus ont ainsi permis de développé une technologie utilisée par les nouvelles radios tactiques CONTACT.

D’autres travaux menés par l’IRBA portent sur la mise au point de protections auditives, de nouveaux moyens de diagnostic et de traitements.

D’où l’enjeu du projet PATRIOT [Prévention diAgnostic et TRaitement InnOvants de la surdité liée au bruiT] auquel l’IRBA participe aux côtés de l’Institut Pasteur, de l’entreprise de biotechnologie SENSORION et de la Société électronique du Mazet, via sa filiale Echodia.

Récemment, le gouvernement a débloqué une enveloppe de 10,8 millions d’euros pour financer ce programme de recherche, au titre des « Projets R&D structurants pour la compétitivité ». Sur cette somme, 5,6 millions ont été alloués à SENSORION, qui a développé un médicament appelé « SENS-401 », à base d’azasétron.

Selon les explications de la société, ce dernier est un « candidat médicament qui vise à protéger et préserver les tissus de l’oreille interne en présence de lésions risquant d’entraîner une surdité progressive ou séquellaire ». Or, il doit faire l’objet d’une étude dite de Phase 2 « multicentrique, randomisée, en double aveugle avec contrôle placebo » auprès de militaires atteints de perte auditive neurosensorielle soudaine sévère ou profonde, sur la base du volontariat.

« Les patients inclus recevront deux fois par jour pendant 4 semaines soit une dose de 43,5 mg de SENS-401, une dose de 29 mg de SENS-401, ou un placebo. Le critère d’évaluation principal est la variation de l’audiométrie tonale (dB) dans l’oreille affectée entre la baseline et la fin du traitement (jour 28) », explique SENSORION.

« Ce projet est particulièrement passionnant car le consortium comprend également l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées et il s’agira de la plus grande étude clinique jamais réalisée dans l’armée française. La participation de l’armée française permettra de réduire considérablement les risques afférents à l’étude et d’améliorer la qualité des données que nous pourrons recueillir », explique l’entreprise dans sa dernière lettre adressée à ses actionnaires.

Seulement, l’épidémie de Covid-19 perturbe la bonne marche de cette étude de Phase 2. « La situation actuelle pose également un risque de délai dans l’ouverture des nouveaux sites militaires qui recruteront des patients dans l’étude de phase 2 en cours du SENS-401 dans la perte brusque d’audition », a prévenu l’entreprise, début avril.

Le projet PATRIOT, résume le SSA, a « pour ambition de mettre en place une nouvelle prise en charge des troubles de l’audition en couplant le développement de nouvelles solutions diagnostiques préventives et thérapeutiques ».

Photo : Forces armées en Guyane

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