De type Gunship, un AC-130W « Stinger II » a démontré pour la première fois son efficacité dans les opérations navales
De juillet 1987 à septembre 1988, la marine américaine mena l’opération « Earnest Will » afin de protéger les pétroliers koweïtiens naviguant dans le Golfe persique, dans un contexte marqué par la guerre entre l’Iran et l’Irak. L’une des menaces auxquelles devaient faire face ces navires étaient les mines, dissiminées par des embarcations légères iraniennes.
Pour contrer cette menace, l’US Navy engagea des Navy SEAL et six patrouilleurs tandis que le 160th Special Operations Aviation Regiment de l’US Army fut sollicité pour déployer des hélicoptères A/MH-6M Little Bird à bord des frégates USS Jarrett et USS Klakring. Le mode opératoire était simple : une fois les bateaux iraniens repérés, les appareils des « Night Stalkers » intervenaient pour les contraindre à cessez de mouiller des mines. Puis, les Navy Seals entraient ensuite dans la danse pour en prendre le contrôle et récupérer du renseignement.
Plus de trente ans après, la sécurité maritime est de nouveau menacée dans le Golfe persique et ses environs. En mai et en juin 2019, plusieurs pétroliers ont été « sabotés » non loin du détroit d’Ormuz. Images à l’appui, les États-Unis ont accusé l’Iran d’en être le responsable. Cependant, si elles ne permettaient pas d’être aussi affirmatif, les vidéos diffusées à l’appui de ces accusations ont montré des individus à bord d’une embarcation légère en train de retirer une mine patelle non explosées de la coque du méthanier Kokuka Courageous.
Mais tel n’est pas le seul mode opératoire pour perturber le trafic maritime. En 2000, à Aden, le destroyer américain USS Cole fut la cible d’une attaque suicide, réalisée au moyen d’une embarcation pleine d’explosifs. Et, deux ans plus tard, le pétrolier Limbourg subissait un sort identique alors qu’il se trouvait dans le golfe d’Aden.
Plus récemment, les rebelles Houthis, soutenus l’Iran dans leur entreprise de prendre le pouvoir au Yémen, ont eu recours à des embarcations chargées d’explosifs et téléguidées vers des navires appartenant à la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite. Et, visiblement, ce procédé s’est encore amélioré… Car, le 3 mars dernier, Riyad a fait état d’une tentative d’attaque contre l’un de ses pétroliers par non pas un mais quatre drones de surface. Et cela, dans la mer d’Oman… Ce qui, là aussi, était nouveau.
Pour contrer ces nouvelles menaces, les forces navales relevant de l’US CENTCOM, le commandement militaire américain pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale, ont imaginé un nouveau mode d’action, impliquant des patrouilleurs côtiers de type Cyclone, des avions de patrouilles maritime P-8A Poseidon et… un AC-130W Stinger II, c’est à dire l’une des versions de l’AC-130 Gunship, utilisé par l’US Air Force pour des missions d’appui au sol et d’interdiction aérienne.
Ainsi, fourni par l’US Central Special Command, l’AC-130W a récemment été engagé dans un exercice, au cours duquel il a été démontré que sa « puissance de feu a amélioré considérablement la capacité à détecter, suivre, engager et à détruire les menaces de surface afin de contrôler l’espace maritime dans le Golfe persique », a résumé le capitaine Peter Mirisola, chef du « Destroyer Squadron » [DESRON] 50 au sein de la Force opérationnelle interarmées CTF 55, laquelle est dotée notamment de patrouilleur côtiers de type Cyclone.
« L’efficacité de cette capacité interarmées à mener des frappes maritimes, des reconnaissances et des survols armés a été clairement démontrée lors de cet exercice à tir réel », a-t-il ajouté.
Concrétement, les P-8A Poseidon furent chargés d’effectuer des reconnaissances à longue portée tandis que les patrouilleurs côtiers sélectionnaient les cibles que l’AC-130W devait engager.
Pour rappel l’AC-130W est armé d’un canon de 30 mm GAU-23 et de munitions guidées, dont des bombes GBU-39 SDB [Small Diameter Bomb]. Cet exercice auquel il a pris part, les 8 et 9 mars dernier, est le premier où un tel appareil est engagé dans des opérations navales.
Le chef de forces navales de l’US CENTCOM [NAVCENT], l’amiral Jim Malloy, a justement rappelé que des capacités « conjointes », fournies par d’autres branches des forces américaines, avaient été mises en oeuvre par le passé, notamment lors de l’opération « Earnest Will ».
« Nous avons effectivement utilisé des capacités conjointes similaires dans le passé pour contrer les forces belligérantes qui tentaient de perturber ou d’entraver la libre circulation du commerce et la liberté de navigation dans cette région en utilisant la force », a dit l’amiral Malloy. « Nous continuerons de travailler avec les commandements des composantes et nos partenaires pour améliorer encore la létalité de nos forces grâce à notre capacité à affronter simultanément une multitude de menaces dans le Golfe persique, la mer Rouge et les eaux voisines », a-t-il ajouté.
Cela étant, les menaces évoluent très vite… Ainsi, lors de l’attaque menée le 3 mars dernier, en mer d’Oman, les assaillants ont fait plus que d’envoyer quatre embarcations téléguidées… En effet, afin de passer inaperçu [et d’accroître le risque de méprise chez leurs adversaires], ils ont utilisés des skiff, c’est à dire des bateaux de pêche traditionnels et omniprésents dans la région. En clair, le menace sera encore plus difficile à identifier, AC-130W ou pas.