Renforcée par la frégate Forbin, la mission navale européenne dans le golfe Persique a été baptisée « Agenor »

Après le sabotage de plusieurs pétroliers au large des Émirats arabes unis et alors que les Gardiens de la révolution iraniens venaient d’arraisonner le Stena Impero, un tanker battant pavillon britannique [en réponse à la saisie du « Grace 1 » à Gibraltar par les Royal Marines], les États-Unis insistèrent pour réunir une coalition navale devant assurer la sécurité du transport maritime dans les détroits d’Ormuz et de Bab el-Mandeb.

Voulant sauver ce qui pouvait l’être de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne déclinèrent l’invitation, assurant ne pas vouloir s’associer à la politique de pression maximale exercée par Washington à l’égard de Téhéran. Et ces trois pays évoquèrent le lancement d’une opération navale européenne.

Par la suite, à la faveur de l’arrivée de Boris Johnson au 10 Downing Street à Londres, les Britanniques décidèrent finalement de rejoindre l’initiative américaine. Quant à l’Allemagne, elle passa son tour, la coalition gouvernementale au pouvoir à Berlin étant divisée sur le sujet. La France se retrouva donc seule à la manoeuvre. Et trouver des pays européens volontaires pour fournir des capacités à une mission navale européenne dans le golfe persique s’annonçait alors compliqué, Mme Parly ayant confié, en août 2019, qu’ils se comptaient alors sur les « doigts d’une seule main ».

Finalement, la Grèce, les Pays-Bas et le Danemark firent savoir qu’ils participeraient à cette mission, alors appelée EMASOH [European-Led mission Awareness Strait of Hormuz]. Puis cette dernière fit l’objet, le 20 janvier dernier, d’un « soutien politique », exprimé par l’Allemagne, la Belgique, l’Italie et le Portugal.

Dans le même temps, la frégate légère furtive [FLF] Courbet fut le premier navire européen à être engagé dans cette opération, qui, avait rappelé la Marine nationale, « vise à garantir la liberté de navigation dans le Golfe Arabo-Persique et le détroit d’Ormuz, tout en protégeant les intérêts économiques européens et internationaux. »

Pour rappel, près de 20% du pétrole français et le tiers du pétrole européen passent par cette « zone d’intérêt stratégique. »

Puis, le 22 février, la puissante frégate antiaérienne néerlandaise HNLMS De Ruyter est arrivée aux Émirats arabes unis, où l’EMASOH a installé son poste de commandement. Elle avait été précédée par la frégate de défense aérienne [FDA] Forbin, qui venait de relever la FLF Courbet.

L’engagement de la FDA Forbin dans cette mission de surveillance européenne marque un saut capacitaire important. Affichant un déplacement de 7.000 tonnes [soit deux fois plus que le « Courbet »], ce navire est armé de 8 missiles antinavires MM40 Exocet Block 3, d’un système surface-air antimissile PAAMS [avec des missiles Aster 15 et Aster 30], de 2 canons de 76 mm, de 3 canons téléopéres Narwhal de 20 mm et de 2 tubes lance-torpilles MU90. Et, il dispose de moyens conséquents en matière de détection et de guerre électronique. Par rapport à son homologue néerlandaise, la Marine nationale ne pouvait pas faire moins…

Quoi qu’il en soit, maintenant que les frégates HNLMS De Ruyter et Forbin sont arrivées aux Émirats arabes unis, l’EMASOH va prendre un nouveau tournant.

Ce 25 février, en effet, sa pleine capacité opérationnelle a été prononcée lors d’une cérémonie présidée par vice-amiral Didier Maleterre, commandant de l’opération, en présence de l’amiral Rob Kramer, chef d’état-major de la marine néerlandaise, du général Stéphane Mille, chef du Centre de planification et de conduite des opérations [CPCO] à l’état-major des armées, et des autorités émiraties. Et elle a pris le nom d’opération « Agenor ».

« Il s’agit d’une étape décisive dans l’engagement des partenaires européens au profit de la sécurité maritime et de la liberté de la navigation dans la région », souligne le ministère des Armées.

À noter que les Émirats arabes unis ont rejoint l’opération navale conduite par les États-Unis, laquelle compte également, et outre le Royaume-Uni, l’Arabie Saoudite, l’Australie, Bahreïn et l’Albanie.

Le nouveau nom de l’EMASOH évoquera sans doute, aux adeptes du tennis, celui d’un joueur haïtien qui perdit un quart de finales à Roland Garros face à l’américain Michael Chang, en 1989. Plus sérieusement, dans la mythologie grecque, Agenor est le fils de Poséidon, le dieu de la mer et des océans.

Photo : FDA Forbin et NH-90 NFH © S.Dzioba / Marine nationale

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