Pour un amiral américain, la décision de Manille de rompre un accord militaire va affecter la lutte contre l’EI

Pour le président Trump, que Manille ait décidé de mettre un terme à un accord militaire donnant un cadre légal à la présence de militaires américains aux Philippines [le Visiting Forces Agreement, ndlr] n’est pas un problème.

« Pour être honnête, cela ne m’a jamais vraiment préoccupé. […] Cela m’est vraiment égal, s’ils veulent le faire, ce n’est pas un problème, cela nous fera économiser beaucoup d’argent », a en effet déclaré M. Trump.

Cependant, et une fois de plus, les responsables militaires ne partagent pas l’avis du chef de la Maison Blanche. Tel est notamment le cas de l’amiral Philip Davidson, le chef de l’US Indo-Pacific Command [USINDOPACOM].

Conformément aux dispositions de l’accord en question, il reste six mois à Washington pour tenter de convaincre Manille de revenir sur sa décision. « Nous avons donc un peu de temps pour mener des efforts diplomatiques. J’espère que nous aurons un bon résultat », a confié l’amiral Davidson, le 12 février.

Les Philippines font face à deux menaces. En effet, la Chine, qui a déjà pris le contrôle sur le récif de Scarborough, situé au large de l’île de Luçon [ce qui conduisit Manille à saisir la Cour permanente d’arbitrage de La Haye, qui lui donné raison, ndlr], a des vues sur d’autres territoires, comme celui de Pag-asa. Et, des groupes jihadistes ayant fait allégeance à l’État islamique [EI] après avoir été proches, pour certains, d’al-Qaïda, sont particulièrement actifs dans le sud de l’archipel.

En 2017, ces organisations occupèrent la ville de Marawi, sur l’île de Mindanao. Et, malgré un soutien américain et australien, il fallut plusieurs mois aux forces philippines, peu habituées au combat urbain, pour les en chasser.

Cela étant, d’après le dernier rapport du comité de suivi des sanctions prises par les Nations unies contre l’EI et al-Qaïda, un tel scénario n’est pas envisageable à l’avenir. Cependant, note-t-il, « malgré les efforts déployés, les groupes affiliés à l’EI continuent de représenter une menace de plus en plus grave » dans le sud-est asiatique, et en particulier dans le sud des Philippines, région qui leur sert de « base d’entraînement et de planification de leurs opérations » et où ils « attirent des combattants » venus d’Indonésie et de Malaisie.

« Les États Membres ont fait observer que la porosité des frontières maritimes, couplée au fait que certains pays à majorité musulmane ne requièrent pas de visa ou en délivrent seulement à l’arrivée sur leur territoire, a créé une voie d’accès à la région que les combattants terroristes étrangers empruntent fréquemment. Les revenants d’Irak et de la République arabe syrienne qui retournent dans la région sont particulièrement dangereux, car ils peuvent accroître les capacités des groupes locaux et modifier les cibles ou la méthodologie des attaques », prévient encore ce rapport.

D’où le commentaire de l’amiral Davidson. « Nos capacités à aider les Philippines dans leur combat contre l’extrémisme violent dans le Sud ainsi que nos capacités à nous entraînér et à opérer aux côtés des forces armées de ce pays, seront remises en cause sans cet accord sur les forces étrangères », a-t-il prévenu.

« Les États-Unis partagent une longue histoire avec le gouvernement et le peuple des Philippines et reconnaissent que la sécurité régionale et mondiale est mieux assurée grâce au partenariat solide qui est permis par le VFA », a résumé un responsable américain auprès de l’Associated Press.

Pour rappel, dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, les États-Unis avaient envoyé 600 instructeurs auprès des forces philippines en 2002, afin de les aider face au groupe Abu Sayyaf. Plusieurs cadres de ce dernier ont été éliminés et/ou capturés par la suite [dont Abu Sabya, Galib Andang, alias « commandant Robot », Khadaffy Abubakar Janjalani ou encore Jainal Antel Sali].

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