Le président Trump lève les restrictions sur l’usage de mines antipersonnel par les forces américaines

Entrée en vigueur en 1999, la Convention d’Ottawa interdit l’acquisition, la production, le stockage et l’utilisation de mines antipersonnel aux 162 pays qui l’ont ratifiée, dont la France. Cependant, 34 États n’ont pas souhaité adhérer à ce texte, dont la Chine, la Russie et les États-Unis [en plus de la Corée du Nord, de la Corée du Sud, de l’Iran ou encore l’Inde].

Bien que non signataires de cette convention, les États-Unis décidèrent, sous l’impulsion de l’administration Obama, de s’en rapprocher en interdisant aux forces américaines d’avoir recours à des mines antipersonnel, sauf sur la péninsule coréenne. Il faut dire que ces dernières en firent un usage très limité au cours des 30 dernières années : lors des opérations « Desert Shield » et « Desert Storm » en 1990/91 en Irak et en Afghanistan, en 2002.

En outre, la Maison Blanche avait également annoncé l’arrêt de la fabrication de mines antipersonnel aux États-Unis. « Nous cherchons des solutions conformes à la convention d’Ottawa qui, à terme, permettraient aux États-Unis d’y adhérer », avait expliqué l’exécutif américain, à l’époque.

Ces annonces faites en 2014 faisaient suite à plusieurs mesures, dont, en 1999, le démantèlement du dernier champ de mines permanent autour de la base navale de Guantanamo, la ratification de la modification du protocole II de la convention sur certaines armes classiques ou encore l’engagement pris en 2006 de remplacer, dans leur arsenal, les mines persistances par des mines pouvant devenir inactives quelques jours ou semaines après avoir été posées.

Cela étant, en 2016, l’US Army avait communiqué sur un programme visant à remplacer les mines terrestres « Gator » jusqu’alors en dotation par un nouveau système appelé PdM GLMR [Product Manager Gator LandMine Replacement], consistant à mettre en place un « réseau » de mines avec un « homme dans la boucle ». Il était alors question de prononcer une capacité opérationnelle initiale en 2025 et d’un investissement de 2,4 milliards de dollars. Mais le calendrier a été a priori accéléré.

« Lorsqu’un adversaire parcourt un champ de munitions en réseau, le capteur du système et la capacité de communication transmettront au soldat que quelque chose se trouve près d’une munition. Un soldat déterminera alors s’il s’agit d’un ami ou d’un ennemi et pourra choisir de faire exploser ou pas une munition antipersonnel », avait expliqué l’US Army à l’époque, en assurant qu’un tel dispositif serait conforme à la Convention d’Ottawa.

Pour les responsables militaires américains, une telle capacité peut s’avérer déterminante. Un champ de mines ne permet pas seulement de ralentir l’avancée de l’adversaire [d’où l’exception qui avait été faite pour la péninsule coréenne en 2014] mais aussi de le contraindre à choisir un autre itinéraire le mener droit vers une embuscade.

Quoi qu’il en soit, le président Trump vient de décider les restrictions qu’avait imposées son prédécesseur en 2014.

« Le département de la Défense a déterminé que les restrictions imposées aux forces américaines par l’administration Obama pouvaient gravement les désavantager pendant un conflit. Le président refuse ce risque pour nos troupes », a expliqué la Maison Blanche, via un communiqué de la Maison Blanche.

« Cette nouvelle politique autorisera le commandement militaire à utiliser, dans des circonstances exceptionnelles, des mines antipersonnel avancées et non permanentes spécifiquement conçues pour réduire les blessures infligées aux civils et aux forces partenaires », ajoute le texte.

Selon Victorino Mercado, secrétaire adjoint à la défense pour la stratégie, les plans et les capacités, les mines qu’utiliseront les forces américaines seront « avancées », dans le sens où elles pourront être activées à distance et supposées s’autodétruire après un délai allant de 2 heures à 30 jours. « Il n’y a que 6 chances sur un million que le système d’autodestruction ne fonctionne pas », a-t-il assuré.

« Les mines antipersonnel sont un outil important que nos forces doivent avoir à leur disposition pour assurer le succès de leur mission », a commenté Mark Esper, le chef du Pentagone. Avec ces mines intelligentes, « je pense que vous serez convaincus que nous avons accordé beaucoup de considération à la façon dont elles seront employées et à ce qui leur arrivera après un conflit », a-t-il ajouté devant la presse.

La décision de M. Trump n’a pas manqué de susciter de l’indignation parmi les ONG, comme Handicap International, à la pointe du combat contre les mines antipersonnel. C’est « une condamnation à mort pour les civils », a réagi Anne Hery, une responsable de cette association, citée par l’AFP. « L’idée que les mines terrestres dites ‘intelligentes’ seront plus sûres que les anciennes est absurde. […] Qui expliquera à la mère d’une fille victime que 20 jours n’étaient pas suffisants avant de jouer au football dans une ferme vide? La seule mine sûre est celle que l’on ne produit pas! », a-t-elle fait valoir.

Normalement, et contrairement à ce que l’on peut penser, les champs de mine sont censés être surveillés, pour la simple et bonne raison qu’ils sont disposés là où l’ennemi est attendu. Le problème peut venir après… quand ils ont été abandonnés.

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