Le Parlement turc va se prononcer sur l’envoi de forces militaires en Libye

En novembre, le Gouvernement d’unité nationale [GNA] libyen, installé à Tripoli sous l’égide des Nations unies et soutenu par une myriades de milices affichant, pour certaines, une proximité avec les Frères musulmans, a signé avec la Turquie deux accords qui font polémique.

Alors que, depuis avril, Tripoli fait l’objet d’une offensive lancée par l’Armée nationale libyenne [ANL] qui, commandée par le maréchal Khalifa Haftar, relève du gouvernement de Tobrouk, soutenu par le Parlement libyen élu en juin 2014, le GNA a conclu un accord visant à renforcer la coopération militaire avec Ankara.

Puis, ce même GNA a aussi signé un mémorandum fixant les frontières maritimes entre la Libye et la Turquie, ce qui permet à cette dernière revendiquer des droits sur de vastes zones en Méditerranée orientale riches en gaz nature, sans se préoccuper des pays autres pays concernés, comme la Grèce, la République de Chypre et l’Égypte. Et, depuis, le ton ne cesse d’aller crescendo.

Le 22 décembre, le ministre grec des Affaires étrangères, Nikos Dendias, a fait une visite-éclair à Benghazi, dans l’est de la Libye, où il a rencontré le maréchal Haftar ainsi que Abdallah Al-Thini, le chef du gouvernement de Tobrouk. Puis il s’est rendu au Caire et à Larnaca [Chypre]. Les discussions ont porté sur ces deux accords signés par Tripoli et Ankara, lequels sont, insiste Athènes, « dénués de fondement » et « contraires au droit international. »

« La Grèce n’hésitera pas à défendre ses droits et intérêts souverains de quelque manière que ce soit, toujours dans le cadre de ses obligations constitutionnelles et du droit international », a par ailleurs prévenu M. Dendias, dans un entretien donné à l’hebdomadaire grec Real News.

Jusqu’à présent, le gouvernement de Tobrouk était soutenu par les Émirats arabes unis et l’Égypte, voire aussi par la Russie [qui disposerait de « mercenaires » sur place]. Désormais, la Grèce vient de rejoindre cette liste… De son côté, et outre celui de la Turquie, le GNA, reconnu par la communauté internationale [officiellement, du moins] bénéficie de l’appui du Qatar. Ces soutiens se traduisent par des livraisons d’armes et de matériels militaires aux deux belligérants.

C’est ainsi que, le 21 décembre, l’Armée nationale libyenne a annoncé avoir saisi un cargo turc battant pavillon de la Grenade au large des côtes de la Cyrénaïque [est de la Libye]. En juillet, le maréchal Haftar avait déjà averti que ses troupes s’en prendraient aux intérêts de la Turquie en Libye.

Deux jours plus tôt, le GNA avait fait savoir qu’il entendait mettre en oeuvre l’accord militaire conclu avec la Turquie, alors que le maréchal Haftar venait d’annoncer que la « bataille finale » pour Tripoli allait commencer.

C’est donc dans ce contexte que, ce 26 décembre, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a annoncé qu’il soumettrait un projet de loi au Parlement afin d’obtenir le feu vert pour l’envoi de troupes en Libye. Un vote pourrait avoir lieu le 8 ou le 9 janvier.

« Puisqu’il y a désormais une invitation [de la Libye], nous l’accepterons. Nous mettrons le projet de loi sur l’envoi de troupes à l’ordre du jour dès l’ouverture de la session parlementaire », a en effet déclaré M. Erdogan, au lendemain d’une visite en Tunisie, où il a évoqué le dossier libyen avec Kais Saied, son homologue tunisien.

« Nous avons discuté des moyens de coopérer pour parvenir à un cessez-le-feu en Libye et relancer le processus politique », avait alors expliqué le président turc à cette occasion. « Nous évaluerons tous les types de soutien militaire [au GNA], y compris au sol, sur mer et dans les airs si nécessaire », avait-il aussi ajouté.

Quoi qu’il en soit, la perspective d’un déploiement militaire turc en Libye ne devrait pas laisser l’Égypte sans réaction, Le Caire et Ankara étant à couteaux tirés. « Nous n’autoriserons personne à contrôler la Libye […], c’est une question qui relève de la sécurité nationale de l’Égypte », avait en effet prévenu Abdel Fattah al-Sissi, le président égyptien, le 17 décembre, en évoquant la Turquie.

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