Libye : Le gouvernement de Tripoli veut mettre en oeuvre l’accord militaire signé avec la Turquie

La semaine passée, le maréchal Khalifa Haftar, le chef de l’Armée nationale libyenne [ANL], qui relève des autorités de Tobrouk, a annoncé le début d’une nouvelle « bataille décisive » pour prendre le contrôle de Tripoli, où est installé le gouvernement d’unité nationale [GNA], mis en place sous l’égide des Nations unies en 2016, et ainsi mettre un terme à une offensive lancée en avril dernier.

Au départ, et après avoir « nettoyé » l’est et le sud de la Libye de la présence de groupes jihadistes, le maréchal Haftar espérait que la prise de Tripoli par ses troupes allait se faire rapidement. Seulement, et malgré l’appui fourni par les Émirats arabes unis, l’Égypte, voire la Russie [via la société militaire privée Wagner], ces dernières se sont heurtées à une vive opposition de milices armées qui, selon les mots de Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, se battent davantage pour la « protection de leurs activités criminelles » que pour défendre le GNA.

En outre, ces milices, dont certaines sont proches des Frères musulmans, bénéficient par ailleurs du soutien du Qatar et de la Turquie.

Fin novembre, le GNA a signé un accord visant à renforcer la coopération militaire avec Ankara ainsi qu’un mémorandum sur la délimitation maritime permettant à la Turquie de revendiquer des droits sur de vastes zones en Méditerranée orientale riches en gaz naturel. Et cela, sans se préoccuper de la Grèce, de l’Égypte et, surtout, de la République de Chypre.

Le contenu de cet accord militaire n’a pas été dévoilé. Cependant, le 10 décembre, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a affirmé que la Turquie pourraient envoyer des troupes en Libye sur le GNA lui en faisait la demande.

Or, le 19 décembre, et alors que l’ANL accentue son action contre la base aérienne de Misrata, occupée par des forces pro-GNA, ce dernier a indiqué avoir « approuvé à l’unanimité la mise en oeuvre du mémorandum d’entente sur la coopération sécuritaire et militaire entre le GNA et le gouvernement turc signé le 27 novembre. »

Cette annonce survient quelques jours après une rencontre à « huis clos », à Ankara, entre le chef du GNA, Fayez el-Sarraj, et le président turc, lequel est d’ailleurs régulièrement en contac avec son homologue russe, Vladimir Poutine, pour s’entretenir prochainement de la situation en Libye.

Quoi qu’il en soit, l’Égypte, dont les relations avec la Turquie sont exécrables, a déclaré devant le Conseil de sécurité des Nations unies qu’elle rejetait les deux accords signés par le GNA et Ankara.

Ainsi, selon les explications données par l’ambassadeur égyptien auprès de l’ONU, Mohammed Edrees, le chef du GNA n’est pas habilité à conclure des accords internationaux, qui doivent par ailleurs être validés par le Parlement libyen. Or, ce dernier soutient le maréchal Haftar depuis Tobrouk, où il s’est replié.

En outre, le diplomate égyptien a souligné que l’accord militaire entre Tripoli et Ankara autorise le « transfert d’armes et de munitions », ce qui constitue une violation de l’embargo sur les armes imposé à la Libye.

Au Caire, un éventuel envoi de troupes turques en Libye est une ligne rouge. « Nous n’autoriserons personne à contrôler la Libye […], c’est une question qui relève de la sécurité nationale de l’Égypte », a déclaré le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, le 17 décembre, en faisant allusion à la Turquie.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]