Le robot « mule » qu’expérimentera l’armée de Terre pourrait être fourni par l’israélien Roboteam [MàJ]

En juillet, le ministère des Armées, via son Agence de l’innovation de Défense [AID], a lancé un appel d’offres afin de pouvoir déployer cinq robots mule en opération extérieure en 2020, à des « fins d’essais et d’expérimentation ».

« Le robot visé a une fonction principale de type ‘mule’ d’une capacité de charge de 400 kg à 800 kg, qui permet aux fantassins de se décharger d’une partie de leur paquetage, afin de gagner en mobilité. Il peut aussi remplir des missions connexes comme procéder à un ravitaillement [munitions, alimentation ou autre], ou assurer une liaison entre deux groupes distants [liste non exhaustive] », était-il indiqué dans l’avis publié à l’époque. En outre, l’engin devait également avoir des « fonctions d’observations et de reconnaissance » tout en étant « téléopérable, à vue et hors de la vue » et « tractable derrière certains modèles de véhicule de l’armée de Terre. »

Par ailleurs, le texte posait des conditions pour participer à cette procédure. En effet, il précisait que, « conformément à l’article R 2342-7 du code de la commande publique, la présente procédure [n’était] pas ouverte aux opérateurs économiques des pays tiers à l’union européenne ou à l’espace économique européen. »

En clair, pour faire acte de candidature, il fallait disposer d’une capacité de production et un bureau d’étude dans un pays membre de l’UE ou dans l’espace économique européen.

Dès lors, on pouvait s’attendre à voir cet appel d’offre se jouer entre l’estonien Milrem Robotics [associé au groupe CNIM], le français Sharks Robotics, qui, allié à Nexter, avait fait sensation avec son robot Barakuda, lors du dernier salon SOFINS, et le tandem formé par ARQUUS et l’institut de recherche franco-allemand Saint-Louis, avec le Stamina Aurochs.

Finalement, aucun de ces trois candidats n’a été retenu. En effet, selon Vincent Lamigeon, de l’hebdomadaire Challenges, ils ont été coiffés sur le poteau par l’israélien Roboteam, associé au français GACI Rugged Systems, un sous-traitant qui travaille régulièrement pour Naval Group, Thales, Safran, MBDA ou encore Dassault Aviation.

Or, le choix de l’AID en fait tousser plus d’un. En effet, Roboteam n’a pas d’usine ni de bureau d’études dans l’UE. En revanche, cette entreprise dispose d’une unité de production aux États-Unis. En outre, son conseil d’administration compte deux anciens officiers généraux américains et une ex-responsable du Pentagone sous l’ère Obama. Et, pour couronner le tout, FengHe Fund Management, implanté à Shangaï et à Singapour, fait partie de ses actionnaires.

Après tout, si l’offre faite par Roboteam et GACI Rugged Systems, basée sur le « Probot », était effectivement la plus performante d’un point de vue opérationnel, son choix n’aurait sans doute pas fait débat. Seulement, ce n’est pas le cas…

Selon Challenges, le THeMIS proposé par Milrem Robotics et CNIM aurait obtenu la meilleure note technique, loin devant le Probot de Roboteam/GACI. Mais le choix se serait fait sur le prix proposé, le tandem franco-israélien ayant divisé le sien par quatre.

Vendre un produit à un prix inférieur à son prix de revient s’appelle du dumping. Ce qui est, au passage, interdit par le droit de la concurrence. Mais d’après l’hebdomadaire économique, qui cite deux sources différentes, Roboteam ne se serait pas livré à ce genre de pratique dans la mesure où il aurait simplement proposé des robots d’occasion. Ce que conteste le directeur général de GACI Rugged Systems, Joël Collino.

« Le prix proposé pour le PROBOT est certes agressif mais n’est absolument pas le résultat d’un dumping, ni de matériel d’occasion puisque la fabrication se fera en nos locaux. Par contre, […] ce prix est issu d’une offre qui n’intègre pas de grands groupes de défense dans son montage industriel », a-t-il en effet confié à Zone Militaire. « Notre contrat d’OEM avec ROBOTEAM nous assure l’accès aux sources de conception pour que nos bureaux d’étude puisse apporter des améliorations ou modifications à ce robot conçu par ROBOTEAM et qui est, pour le marché français, fabriqué par nos soins », a-t-il précisé.

Quoi qu’il en soit, « ce contrat porte sur une expérimentation technique, il ne préjuge en rien du résultat d’appels d’offres ultérieurs », a tenu à souligner un proche de l’AID, cité par Challenges. En outre, dans le domaine robotique militaire, la France participe au projet MUGS [Modular Unmanned Ground System], conduit par l’Estonie dans le cadre de la Coopération structurée permanente [CSP/PESCO]. Ce programme vise à développer un « un F16 de systèmes terrestres sans équipage », capable de transporter différentes charges utiles [fret, capteurs, drone captif, etc], avec une fonction de navigation autonome.

Photo : Roboteam

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