Après la fusillade de Pensacola, le Pentagone suspend l’entraînement des militaires saoudiens aux États-Unis

Le matin du 6 décembre, le sous-lieutenant Mohammed Saeed Alshamrani, de la Royal Saudi Air Force [RSAF] a ouvert le feu avec un pistolet Glock Model 45 de 9 mm dans une salle de classe de la base aéronavale de Pensacola [Floride], où il suivait une formation dans le cadre de la coopération militaire entre les États-Unis et l’Arabie Saoudite. La fusillade a fait trois tués [Joshua K. Watson, Mohammed S. Haitham et Cameron S. Walters] et huit blessés parmi les marins américains.

Auparavant, l’officier saoudien, abattu par la police, avait violemment critiqué les États-Unis et cité Oussama ben Laden, le fondateur d’al-Qaïda. En outre, lui et trois de ses camarades avaient regardé des vidéos de fusillades ayant lieu sur le sol américain, lors d’un dîner qu’il avait organisé. Quant à l’arme utilisée, il est apparu qu’il se l’était procuré légalement quelques semaines plus tôt.

Au regard de ces éléments, le FBI a indiqué, deux jours plus tard, qu’il considère cette fusillade comme un « acte terroriste ». « Notre objectif principal est de déterminer s’il [le tireur] a agi seul ou s’il faisait partie d’un réseau plus large », a expliqué l’un de ses responsables, lors d’une conférence presse.

Cela étant, plusieurs élus américains ont demandé la suspension des formations dispensés aux militaires saoudiens aux États-Unis. « L’Arabie saoudite est un allié, mais il y a ici quelque chose de fondamentalement mauvais. Nous devons ralentir ce programme et le réévaluer », a ainsi fait valoir le sénateur républicain Lindsey Graham. « Nous ne devrions pas accueillir de nouveaux étudiants saoudiens tant que n’avons pas absolument confiance en notre processus de contrôle », a également estimé Matt Gaetz, membre de la Chambre des représentants.

Et ces demandes ont été entendues. Dans un premier temps, l’US Navy a en effet annoncé, le 10 décembre, la suspension de la formation de 303 stagiaires saoudiens alors en cours sur les bases navales de Pensacola, Mayport et Whiting Field. Puis, plus tard, et a priori en accord avec Riyad, le Pentagone a étendu cette mesure à l’ensemble des militaires saoudiens présents sur le sol américain.

« L’entraînement opérationnel des militaires saoudiens reprendra à l’issue d’une révision des procédures de sécurité et de vérification des antécédents de tous les militaires étrangers actuellement formés aux États-Unis », a ainsi indiqué un haut responsable du Pentagone. Ce qui devrait prendre entre cinq et dix jours.

Cette mesure « s’appliquera à tous les étudiants saoudiens présents aux États-Unis. Ils continueront donc tous à suivre une formation en classe, mais la formation opérationnelle sera suspendue au cours de cet examen », a précisé un responsable, cité par Military.com.

Étant donné que l’équipement des forces armées saoudiennes est en grande partie d’origine américaine, environ 28.000 militaires saoudiens ont été accueillis aux États-Unis depuis que ces programmes de formation ont été mis en place au titre de la coopération militaire entre Riyad et Washington.

Dans une note publiée cette semaine, le secrétaire adjoint à la Défense, David Norquist, a assuré que les procédures de sécurité et de filtrage des stagiaires étrangères suivant une formation aux États-Unis allaient être réexaminées.

Ainsi, il a été demandé au renseignement américain de « prendre des mesures immédiates pour renforcer la vérification des antécédents des stagiaires militaires étrangers et de terminer, d’ici 10 jours, un examen des politiques et procédures de filtrage de ces dernier avant de leur accorder l’accès aux bases » américaines.

« Ces efforts viseront à aligner plus étroitement les procédures de vérification IMS [International Military Students] avec celles que nous appliquons au personnel américain », a expliqué M. Norquist.

A priori, ces mesures vont également concerner les militaires français, en particulier les élèves-pilotes de l’aéronautique navale, dont une partie de la formation se fait à Whiting Field [Floride] ainsi qu’à Meridian [Mississipi]. Par ailleurs, il est à noter que la France accueille également des stagiaires saoudiens dans ses écoles militaires.

Quoi qu’il en soit, il n’est évidemment pas question pour le Pentagone de mettre un terme aux formations qu’il propose aux forces armées étrangères. « Cela aurait un effet négatif », a commenté le général David Goldfein, le chef d’état-major de l’US Air Force, lors d’un évènement au Reagan National Defence Forum, le 7 décembre. « Le plus grand impact serait sur nos alliés et partenaires et sur l’interopérabilité. […] Ma plus grande préoccupation est que nous nous éloignions de ces relations clés et des gens dont nous savons que nous avons besoin lorsque nous partons au combat », a-t-il ajouté.

Avec ces programmes de formation, « nous disposons de quelque chose que n’ont pas nos adversaires potentiels, comme la Russie et la Chine. […] La possibilité de faire venir ici des étudiants étrangers pour s’entraîner avec nous, pour comprendre la culture américaine, nous est très importante afin de construire ces relations au long cours qui contribuent à notre sécurité », a confirmé Mark Esper, le chef du Pentagone.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]