L’entretien d’une caserne parisienne a été confié à une entreprise dont le patron ferait l’objet d’une « fiche S »

Alors qu’un récent rapport du Sénat a fait état d’actions de « reconnaissance des emprises militaires par des individus aux motivations présentant un risque » [terroriste] encore « très fréquentes », le Canard Enchaîné vient de lancer un pavé dans la mare.

En effet, dans son édition du 4 décembre, l’hebdomadaire affirme que, pour assurer l’entretien d’une caserne du XIIIe arrondissement de Paris, qui sert de lieu d’hébergement aux militaires célibataires, le ministère des Armées a attribué un marché d’une valeur de près de 73.000 euros [HT] sur 19 mois à une entreprise de nettoyage dont le dirigeant avait été « fiché S » en raison de sa proximité avec la mouvance jihadiste. Et cela, quelques jours après l’attaque au couteau commise à la Préfecture de police de Paris par un agent radicalisé.

Or, cela n’a pas échappé à la Direction générale de la sécurité intérieure [DGSI]. « À quoi bon s’embêter à répertorier et à surveiller les radicalisés, pour notamment s’assurer qu’ils n’ont pas accès à des informations sensibles, si les autres administrations se foutent de notre travail? », s’interroge l’un de ses agents dans les colonnes du Canard Enchaîné.

Pour rappel, constituant une catégorie de mesures de recherches au sein du fichier des personnes recherchées [FPR], les fiches « S » [S pour « Sûreté de l’État »] ne concernent pas les seuls individus de la mouvance islamiste radicale.

« Il existe 11 catégories de fiches S [de S2 à S163], qui ne correspondent pas à des niveaux de dangerosité, mais renvoient à des profils et des conduites à tenir [par exemple, les informations à recueillir ou les actions à entreprendre », rappelait un rapport de la commission sénatoriale des lois, publié l’an passé.

Et d’ajouter : « Aussi la fiche S n’est-t-elle qu’un outil parmi d’autres de collecte de renseignement pouvant être mobilisé par les services spécialisés pour prévenir, notamment, les actes de terrorisme. »

« La fiche S ne contient pas les informations relatives à un éventuel suivi opérationnel de la personne, sachant que les personnes fichées S ne sont pas toutes des objectifs des services de renseignement. La fiche S ne contient pas non plus les informations précises à l’origine de l’inscription ‘S’ au FPR », avait encore précisé ce rapport.

Normalement, il revient à la Direction du renseignement et de la sécurité de la Défense [DRSD] de vérifier les antécédents des employés d’une entreprise appelée à travailler sur un site militaire.

« En 2018, la DRSD a rendu plus de 80 000 avis de sécurité pour l’habilitation de personnes travaillant en entreprise », indique le service. Mais, a priori, cette procédure ne concerne pas les dirigeants. Un responsable du ministère des Armées a confié, à l’hebdomadaire, qu’il y a manifestement un « trou dans la raquette ».

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