SCAF : Safran et l’allemand MTU vont créer une co-entreprise pour la motorisation de l’avion de combat du futur

En février dernier, le ministère des Armées s’était félicité de la signature par le français Safran et l’allemand MTU Aero Engines d’une lettre d’intention au sujet d’un accord de coopération industrielle pour la motorisation du New Generation Fighter [NGF], c’est à dire le chasseur-bombardier de nouvelle génération sur lequel reposera le programme du « Système de combat aérien du futur » [SCAF], conduit dans le cadre d’une coopération entre la France, l’Allemagne et l’Espagne. Et d’annoncer, dans la foulée, que le contrat allait être notifié pour la mise au point d’un démonstrateur.

« L’esprit de cet accord illustre ce que nous cherchons à réaliser. Une répartition claire des responsabilités, des tâches et des rôles dès les phases amont, basée sur le principe du ‘meilleur athlète’. Ainsi, Safran se positionne en leader sur l’architecture et l’intégration du moteur. MTU prendra, quant à lui, le leadership sur la partie des services », avait alors expliqué Florence Parly, la ministre des Armées.

En outre, toujours au titre du SCAF, Safran avait obtenu le contrat d’études amont « Turenne 2 », d’un montant de 115 millions d’euros, pour le développement d’aubes de turbine pouvant supporter des températures de plus de 2.000°c [contre 1.800°c pour celles des moteurs M-88 équipant le Rafale, ndlr].

Mais il ne fallait pas se réjouir trop vite… Étant donné que, en Allemagne, tout contrat d’une valeur supérieure à 25 millions doit impérativement obtenir le feu vert du Bundestag, les parlementaires allemands, ont fait traîner les choses… Et les contrats relatifs au démonstrateur du NGF ne purent être notifiés à Dassault Aviation et à Airbus à l’occasion du salon de l’aéronautique et de l’espace du Bourget. Et il est désormais prévu qu’il le soit en janvier 2020.

Mais un autre problème apparut : la remise en question, par le Bundestag, du projet d’accord entre Safran et MTU, lequel confiait au premier la responsabilité de la conception et de l’intégration des moteurs [domaine où il a une longue expérience]. Quant au second, il devait avoir la main sur les services. Or, pour certains députés d’outre-Rhin, ce partage des tâches ne pouvait se faire qu’au détriment de l’industrie allemande. D’où leur plaidoyer en faveur d’une co-traitance.

Seulement, une telle issue n’était pas acceptable pour la partie française.

« Il s’agirait d’éviter de confier la responsabilité d’un pan important du programme à un conglomérat plutôt qu’à un industriel en particulier, l’expérience du programme d’A400M ayant montré que la formule du conglomérat complique considérablement la résolution des problèmes susceptibles de survenir, faute de responsable clairement identifié », avait expliqué le député Jean-Charles Larsonneur, dans son dernier rapport pour avis sur les crédits alloués à l’équipement des Forces en 2020.

Et d’ajouter : « Cette demande de la partie allemande serait vue par certains comme étant de nature à déséquilibrer une architecture d’ensemble, équitable et agréée au préalable. En effet, il est déjà convenu que l’ensemble des travaux soient répartis en quatre sous-ensembles cohérents, appelés ‘piliers’ : les deux gouvernements s’étant déjà mis d’accord pour confier les piliers avion et moteur à un leader industriel français, tandis que les piliers ‘remote carriers’ et ‘système de systèmes’ sont destinés à avoir des leaders industriels allemands aux termes des accords déjà trouvés. »

Et le Conseil des ministres franco-allemand du 16 octobre dernier ne parvint pas à surmonter ce blocage.

Finalement, ce 3 décembre, Safran Aircraft Engines et MTU Aero Engines ont annoncé avoir trouvé un accord… qui reprend, dans les grandes lignes, celui qui avait été signé en février. À la différence qu’il est désormais question de créer une co-entreprise.

« Safran Aircraft Engines et MTU Aero Engines ont convergé sur les détails de leur partenariat d’égal à égal pour développer le moteur du futur avion de combat européen NGF », ont en effet annoncé les deux industriels, via un communiqué commun.

« Cet accord industriel s’appuie sur les principes définis par la lettre d’intention signée entre les deux sociétés en février 2019, qui spécifie que Safran aura la responsabilité d’ensemble de la conception et de l’intégration du moteur et que MTU Aero Engines sera leader pour les services », lit-on dans ce texte.

Ainsi, y est-il expliqué, « dans le cadre du schéma contractuel défini par la France et l’Allemagne, Safran Aircraft Engines sera le primo-contractant du projet et MTU Aero Engines le principal partenaire pour la première phase de Recherche & Technologie [Phase 1A] ».

Et  les activités de développement, de production et de support après-vente du moteur qui équipera le NGF relèveront donc, d’ici la fin 2021, d’une co-entreprise dans le capital sera détenu à parts égales par les deux industriels.

« Cet accord est un pas en avant majeur, qui reflète la volonté » de nos deux sociétés « d’assurer une gestion solide et efficace du programme, reposant sur un partenariat équilibré et des responsabilités claires », ont commenté Olivier Andriès et Michael Schreyögg, respectivement président de Safran Aircraft Engines et directeur des programmes chez MTU Aero Engines. « Safran et MTU sont déterminés à fournir aux Forces une architecture de moteur innovante qui constituera un atout essentiel des capacités opérationnelles de nos clients », ont-ils ajouté.

Photo : ministère des Armées 

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