La Turquie teste le système russe S-400 avec des F-16 et bloque des plans défensifs de l’Otan pour les pays baltes

Le prochain sommet de l’Otan, qui se tiendra à Londres les 3 et 4 décembre prochains, sera l’occasion d’une grande explications entre Alliés, lesquels affichent des désaccords parfois profonds.

Il est en effet probable que le président américain, Donald Trump, fera de nouveau l’article sur les dépenses militaires qu’il estime trop faible de certains pays membres [à commencer par celles de l’Allemagne]. On peut aussi parier que son homologue français, Emmanuel Macron se fera reprocher les propos qu’il a tenus au sujet de la « mort cérébrale de l’Otan », après avoir dénoncé l’attitude des États-Unis et de la Turquie en Syrie. Ou encore que le secrétaire général de l’Alliance, Jens Stoltenberg, ne cessera de plaider en faveur du lien transatlantique, tout en soulignant que l’Union européenne n’a pas les moyens de se défendre seule.

Et on peut également s’attendre à ce que la Turquie soit mise sur la sellette, en raison de son opération militaire contre les milices kurdes syriennes [YPG] dans le nord de la Syrie, qui, selon un rapport du Pentagone, n’a pu que profiter à l’État islamique, ainsi que de son achat de systèmes russes de défense aérienne S-400, ce qui lui a valu d’être exclue du programme d’avion de combat F-35.

« Nous exigerons également le maintien d’une attitude ouverte, mais exigeante, à l’égard de la Turquie, qui conserve sa place comme alliée au sein de l’Otan », a dit Florence Parly, la ministre des Armées, lors d’une récente audition devant la commission des Affaires étrangères, à l’Assemblée nationale. Et « personne ne pousse [la Turquie] en dehors de l’Alliance atlantique », a-t-elle continué.

Cependant, « ses membres ont un certain nombre de devoirs » et Ankara « a pris une position unilatérale, sans consulter personne et surtout pas ses alliés, mettant à mal la lutte contre le terrorisme en Syrie et en Irak », a rappelé la ministre. « Cette intervention n’est pas propice aux intérêts de sécurité des Européens et ne respecte pas la lettre et l’esprit du traité de Washington. Après la réunion des ministres de la défense à Bruxelles, il est important que tout cela soit réexaminé dans un cadre stratégique : cela sera fait », a-t-elle prévenu.

Justement, selon l’agence Reuters, qui cite quatre sources distinctes, la Turquie refuse de soutenir des plans de défense préparés par l’Otan pour les pays baltes et la Pologne, tant que les Alliés ne lui apporteront pas un soutien politique « plus marqué » dans ses opérations menées dans le nord de la Syrie.

Or, sans un accord d’Ankara, ces plans seront plus difficilement mis en oeuvre. « Ils [les Turcs] prennent les Européens de l’Est en otage, bloquant l’approbation de ce plan militaire tant qu’ils n’auront pas obtenu de concessions », a résumé l’une des sources de l’agence de presse britannique. C’est un « comportement déstabilisant », a fait valoir une seconde source. Et, évidemment, cela ne peut que ravir la Russie.

Justement, s’agissant du rapprochement entre Ankara et Moscou, qui pourrait aller jusqu’à l’achat d’avions de combat russes Su-35 Flanker E pour les besoins des forces aériennes turques, les États-Unis devrait remettre la question de l’achat des systèmes S-400 sur le tapis lors de ce prochain sommet de l’Otan.

D’autant plus que, selon les médias turcs, Ankara a commencé à tester ses batteries S-400 avec des avions F-16, acquis auprès du constructeur américain Lockheed-Martin. Sans doute que, à Washington, on aurait préféré qu’ils soient conduits avec des F-4 Phantom, un appareil que plus aucun allié de l’Otan utilise actuellement. En outre, cela ne peut conforter la décision des États-Unis d’exclure la Turquie du programme F-35…

« C’est inquiétant », a réagi Mike Pompeo, le chef de la diplomatie américaine, lors d’une conférence de presse. « Nous restons confiants et parlons encore aux Turcs pour essayer de trouver une voie de sortie. Je ne veux pas m’avancer sur ce que le président peut faire ou pas. Mais nous avons clairement exprimé au gouvernement turc notre volonté de les voir s’éloigner de la mise en opération complète » des S-400, a-t-il ajouté.

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