L’avion d’entraînement TB-30 Epsilon a terminé sa carrière au sein de l’armée de l’Air

Il fut une époque où le Groupement École [GE] 315 de la base aérienne de Cognac accueillait, tous les deux mois, des promotions de 30 à 40 élèves officier du personnel navigant [EOPN]. Ces derniers, après un passage à l’École de formation initiale du personnel navigant [EFIPN] de Bourges-Avord, où ils venaient effectuer une douzaine d’heures de vol à bord d’avions Cap-10 pour déterminer leur orientation future [chasse ou transport], entamaient alors une formation de 29 à 37 semaines en fonction de leur pré-spécialisation.

Ensuite, ces EOPN rejoignaient l’École de chasse de Tours ou retrouvaient celle de Bourges-Avord pour devenir pilotes de transport. Mais tous avaient le point commun d’avoir volé 66 heures – soit l’équivalent de 54 missions – à bord du TB-30 Epsilon [surnommé « Zebulon », un personnage du « Manège enchanté »].

Doté d’un moteur Lycoming 6 cylindres de 300 ch lui permettant de voler jusqu’à la vitesse de 520 km/h, ce biplace en tandem avait été conçu pour encaisser des facteurs de charge de +6/7 G à 3G, ce qui en faisait un appareil maniable et « nerveux ».

Le premier prototype du TB-30 Epsilon prit l’air en décembre 1979, soit il y a près de 40 ans, avec Marc Yoh aux commandes et Claude Durand, en tant qu’ingénieur d’essais. Et l’armée de l’Air en commanda un premier lot de 30 exemplaires moins d’un an plus tard afin de remplacer une partie de ses Fouga Magister. Entretemps, son constructeur – la SOCATA [Société pour la construction d’avions de tourisme et d’affaires] – s’était employé à corriger rapidement les défauts originels de cet appareil, pour en faire le succès que l’on sait.

Au total, l’armée de l’Air porta le total de TB-30 Epsilon commandés à 150 exemplaires. Le Portugal en dota ses forces aériennes [les avions furent assemblés localement, sous licence], de même que le Sénégal et le Togo, qui choisit une version armée pouvant emporter de paniers à roquettes, des bombes légères et une nacelle de mitrailleuses.

Malgré le fait qu’ils ont été constamment modernisés depuis leur entrée en service, en 1984, les TB-30 Epsilon font les frais de la refonte de la formation des élèves pilotes de l’armée de l’Air, cette dernière reposant désormais sur un nouvel appareil, à savoir le PC-21 du constructeur suisse Pilatus, mieux adaptés aux exigences opérationnelles du moment.

Ainsi, par exemple, outre le fait qu’il reproduit l’environnement que trouvera un jeune pilote à bord d’un Rafale, le PC-21 peut simuler un réacteur, grâce à un calcul électronique qui « gomme » les effets de son hélice. « Quand on actionne la manette des gaz, il y a un petit retard avant que la puissance ne soit délivrée. Et quand on réduit les gaz, le moteur garde une puissance résiduelle pour ne pas avoir l’effet de frein causé par l’hélice », explique en effet Air Actualités.

Quoi qu’il en soit, l’heure de la retraite a donc sonné pour les TB-30 Epsilon… Le 24 septembre, annonce le ministère des Armées, les PC-21 ont définitivement pris leur relève, avant d’en faire autant avec les Alphajet de l’École de l’aviation de chasse [EAC].

Au cours de leurs 35 années passées sous les cocardes françaises, les TB-30 Epsison ont permis de former 3.700 EOPN et réalisé plus de 645.000 de vols, dont 70% dédiées à l’instruction des futurs pilotes de chasse. Et ils servirent de monture à la partrouille « Cartouche Doré », qui avait été formée en 1989 pour marquer les 100.000 heures de vol de l’avion de la SOCATA.

« Le TB-30 Epsilon a également servi pour les missions secondaires confiées à l’EPAA [École de pilotage de l’armée de l’Air]. Il a ainsi été déployé régulièrement depuis 1996 dans le cadre de Dispositifs particuliers de sûreté aérienne [DPSA] lors d’évènements majeurs, comme les défilés du 14 Juillet mais aussi lors de nombreux sommets internationaux », rappelle le ministère des Armées.

À noter que le TB-30 Epsilon aurait pu avoir un « petit frère » si les circonstances en avaient décidé autrement. Dans les années 1980, la SOCATA développa, sur fonds propres, le TB-31 Oméga, un turbopropulseur qui, doté de deux sièges éjectables, était appelé à remplacer les Fouga Magister alors encore utilisés à l’École de l’Air [à l’époque, le cursus des officiers de l’Air était différent que celui des EOPN, ndlr]. Seulement, le projet n’alla pas plus loin que le prototype : en compensation de l’achat d’une soixantaine d’hélicoptères Panther et Écureuil par le Brésil, l’armée de l’Air dut commander des Embraer EMB-312 « Tucano », lesquels furent retirés du service une douzaine d’années plus tard.

Cela étant, le TB-30 Epsilon n’a pas pour autant fini de voler en France. La société Apache Aviation en exploite une flotte de quelques exemplaires, notamment pour offrir des stages UPRT [Upset Prevention and Recovery Training] destinés aux pilotes civils. Et six autres ont désormais le statut d’avion de collection. D’autres « Zébulon » ont entamé une nouvelle vie aux États-Unis.

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