Les États-Unis continuent de livrer des armes aux forces démocratiques syriennes

Début août, et alors que le président turc, Recep Tayyip Erdogan, évoquait à nouveau de lancer une opération militaire contre les milices kurdes syriennes [YPG], considérées comme terroristes à Ankara, les États-Unis et la Turquie trouvèrent un accord sur l’établissement d’une zone de « sécurité » dans le nord-est de la Syrie. Ce qui supposait la mise sur pied d’un « centre d’opérations conjointes » ainsi que des patrouilles turco-américaines.

Pour rappel, les YPG font partie des Forces démocratiques syriennes [FDS], une alliance arabo-kurde qui, appuyée par la coalition dirigée par les États-Unis, a été à la pointe du combat contre l’État islamique [EI ou Daesh] sur la rive orientale de l’Euphrate, en Syrie. En outre, étant donné que l’organisation jihadiste reste une menace, même après avoir perdu ses derniers bastions, les États-Unis et leurs partenaires voulaient éviter toute intervention militaire turque.

Un moins après cet accord, et alors qu’il fut avancé que les combattants de l’YPG [ou du moins une grosse partie] y avaient laissé leurs positions, les militaires américains et turcs effectuèrent leurs premières patrouilles conjointes dans la zone tampon voulue par Ankara pour éviter toute infiltration de miliciens kurdes syriens sur son territoire. Cependant, et malgré cette avancée, les autorités turques ne cachèrent pas une certaine impatience.

« Il y a eu des patrouilles communes, c’est vrai, mais les efforts pour aller plus loin […] se sont révélés uniquement cosmétiques », fit valoir Mevlut Cavusoglu, le ministre turc des Affaires étrangères, avant de mettre en garde les États-Unis contre tout retard dans l’application de l’accord conclu en août.

Seulement, dans le même temps – et cela a toujours été une pomme de discorde entre Ankara et Washington – les États-Unis ont continuent encore à livrer des armes et des équipements militaires aux FDS. Et cela malgré l’accord sur la zone tampon.

« Nous continuons à fournir des armes et des véhicules tout à fait adaptés aux besoins » des FDS, a en effet affirmé Chris Maier, directeur du groupe de travail sur la lutte contre l’EI au département américain de la Défense, lors d’une conférence de presse donnée le 18 septembre.

Cette annonce n’est pas surprenante, dans la mesure où un récent rapport de l’Inspection générale du Pentagone a souligné les déficits capacitaires des FDS pour mener des opérations de contre-insurrection. Et, a priori, ces livraisons ne suscitent pas [ou plus] d’objections de la part d’Ankara.

« Nous informons la Turquie mensuellement de la nature de ces armes et de ces véhicules », a précisé Chris Maier. En tout cas, le ministre turc de la Défense, Hulusi Akar, n’a pas évoqué ce sujet dans un entretien publié ce 19 septembre par le quotidien Türkiye. Mais sans doute n’en a-t-il pas eu le temps entre le moment où il a été interrogé par la presse turque et la déclaration du responsable américain.

Quoi qu’il en soit, M. Maier a confirmé que « plusieurs fortifications kurdes ont été retirées » de la zone dite de « sécurité » et que les membres des YPG ont été remplacés par des combattants arabes. Cependant, a-t-il admis, il reste « encore des miliciens kurdes dans la zone ».

« Le retrait des fortifications ne doit pas forcément être considéré comme une chose qui affaiblit la sécurité du nord-est de la Syrie […] Nous sommes convaincus […] que l’hypothèse d’une incursion turque en Syrie est nettement moins probable » maintenant, a estimé le responsable américain.

Cela étant, pour Ankara, la mise en place de cette zone de sécurité se fait trop lentement, en raison des « réticences » américaines.

« Ce que nous avons fait [pour la zone de sécurité] est là. Ils [les États-Unis] agissent contre leur gré. Le processus est lent mais va de l’avant. Les patrouilles terrestres se poursuivront phase par phase et de manière à couvrir l’ensemble de la bande frontalière longue de 440 km », a en effet expliqué le ministre turc de la Défense, qui a également dit espérer l’installatoon de bases turco-américaines « permanentes » dans cette zone tampon.

La veille, le président Erdogan s’était montré beaucoup plus impatient. « Si aucun progrès n’est noté d’ici deux semaines, nous allons mettre en vigueur notre propre plan d’action. Les mois à venir seront décisifs quant à l’évolution de la crise syrienne, soit elle prendra fin soit elle s’approfondira davantage. En sécurisant l’Est de l’Euphrate et en fonction de la profondeur de la zone de sécurité, nous pourrons assurer le retour de 2 à 3 millions de migrants syriens qui vivent actuellement dans notre pays et en Europe », a-t-il affirmé.

Sur ce point, M.Maier a rappelé que les États-Unis n’accepteraient pas le retour « forcé » de réfugiés dans zone tampon.

« La position américaine reste que notre objectif est un retour des réfugiés sûr, volontaire, digne et informé. Et cela ne pourra se faire qu’avec « le soutien de l’ONU et d’autres ONG » et « en conjonction avec la Turquie et nos partenaires en Syrie », a expliqué le responsable du Pentagone.

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