Les Philippines envisagent d’acquérir au moins un sous-marin auprès de la France

Après l’élection de Rodrigo Duterte, en juin 2016, les Philippines se rapprochèrent de la Chine et de la Russie, quitte à mettre en sourdine les différends territoriaux [récif de Scarborough, notamment] en sourdine avec la première en échange d’un soutien économique et à envisager des accords militaires et des livraisons d’armes avec la seconde.

Ainsi, en 2018, il fut avancé que Manille cherchait à acquérir deux sous-marins à propulsion classique de la classe « Kilo » auprès de Moscou. Évidemment, y voyant une opportunité supplémentaire de contrer l’influence américaine en Asie du Sud-Est, les autorités russes étaient prêtes à accorder des facilités de paiement et un prêt à taux réduit à leurs homologues philippines.

Mais, a priori, la piste russe ne serait pas la seule à être envisagée par Manille. D’autant plus que, désormais, les questions relatives aux différends territoriaux avec Pékin sont revenus au premier plan, la présence signalée, en avril dernier, de 200 bateaux chinois dans les environs du récif de Pag-asa ayant fait vivement réagir M. Duterte.

« Je ne vous l’ordonne pas et je ne vous le demande pas non plus à genoux, je vous dis simplement de ne pas toucher à Pag-asa, car j’y ai des soldats. Si vous y touchez, ce ne sera plus la même chose. Je demanderai aux soldats de ‘préparer une mission-suicide’ », a même déclaré le président philippin, le 9 avril.

Et, désormais, alors qu’il avait déclaré ne plus vouloir de militaires américains aux Philippines, M. Duterte a changé son fusil d’épaule. Fin juin, il a ainsi reproché aux États-Unis, au Royaume-Uni et à la France de ne pas en faire assez pour défendre les droits de son pays en mer de Chine méridionale.

Quelques jours plus tard, lors d’une visite à Manille, le secrétaire d’État auprès du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne, n’a pas directement répondu aux propos du président philippin. Cependant, il a assuré que la « France [était] très attachée à la promotion et à la défense du droit international » et que c’était pour cette « raison » que la Marine nationale naviguait « très souvent en mer de Chine méridionale » et qu’elle continuerait de le faire. Et d’ajouter : « C’est la preuve de notre engagement à nous assurer que la liberté de navigation est un fait (réel) en mer. »

Le compte-rendu du Quai d’Orsay au sujet du déplacement aux Philippines de M. Lemoyne ne donne pas de précisions sur les échanges que ce dernier a pu avoir le ministre philippin des Affaires étrangères en matière de défense. Si ce n’est que les deux responsables ont « abordé les enjeux de sécurité, notamment dans le domaine maritime et en matière de lutte contre le terrorisme, ainsi que les projets de coopération de la France avec l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), y compris dans le domaine de la protection de l’environnement. »

Toutefois, selon la presse philippine, M. Lemoyne aurait affirmé, à l’issue de la 8ème réunion du Conseil économique et social conjoint Philippines-France à Makati, que des « discussions étaient en cours sur l’éventuelle acquisition par les Philippines d’équipements militaire de fabrication française ».

« Ces discussions vont se poursuivre. […] Nous avons une grande expertise en matière de sous-marins. Dans la région, nous avons établi un partenariat stratégique avec l’Australie et c’est la preuve de la qualité de notre industrie. […] Les Philippines doivent dire quel est leur besoin, ce qu’elles veulent », aurait déclaré M. Lemoyne.

Cet intérêt des Philippines pour des sous-marins français – qui ne peuvent être que des Scorpène de Naval Group – a une nouvelle fois été confirmé par le ministre de la Défense, Delfin Lorenzana, qui se rendra d’ailleurs à Paris en septembre prochain.

« La marine [des Philippines] considère que la France doit être le fournisseur de nos sous-marins. Et les Français sont aussi bons pour fabriquer aussi des avions », a en effet déclaré M. Lorenzana, selon le Manilla Bulletin.

Pour le moment, aucune décision définitive n’a été prise. « Des discussions sont en cours pour rédiger un accord formel avec la France », a précisé le ministre philippin.

Cela étant, une telle vente, si elle se concrétise, supposera un partenariat étroit entre Manille et Paris dans la mesure où, en matière de sous-marins, la marine philippine part de zéro. Seulement, et malgré les enjeux stratégiques et sécuritaires [notamment ceux liés au terrorisme], ce n’est sans doute pas gagné d’avance, au regard des critiques suscitées par les actions et les propos de M. Duterte .

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