Encore insuffisante, l’évolution de la disponibilité des hélicoptères des forces françaises est contrastée
« ll faut que ça vole! », avait lancé Florence Parly, la ministre des Armées, en décembre 2017, au moment de préciser la réforme du maintien en condition opérationnelle aéronautique [MCO-Aéro], qui a depuis abouti à la création de la Direction de la maintenance aéronautique [DMAé].
Il y a deux ans, pratiquement tous les voyants étaient au rouge s’agissant de la disponibilité des 13 flottes d’hélicoptères en service au sein des forces françaises. Et cela, malgré une enveloppe conséquente de 571,57 millions d’euros dédiée à l’Entretien programmé du matériel [EPM]. À l’époque, trois types d’appareils, seulement, avaient vu leur taux de disponibilité progresser légèrement.
Selon les derniers chiffres communiqués au député François Cornut-Gentille par le ministère des Armées, la situation s’est améliorée, en 2018, pour 7 flottes d’hélicoptères, avec un budget dédié à l’EPM en baisse de 9,4 millions d’euros par rapport à l’année précédente.
Toutefois, aucun type d’hélicoptères n’a affiché un taux de disponibilité supérieur à 50% l’an passé. Et la situation tend à s’aggraver pour certains modèles tandis qu’elle s’améliore, parfois significativement, pour d’autres [il faut dire que l’on partait de très bas…].
Pour rappel, un aéronef est dit « disponible » quand il est « apte à moins de 6 heures à effectuer au moins une mission correspondant à celles indiquées dans sa fiche de caractéristique militaire, sur tous sites d’emploi. » Aussi, les chiffres donnés par le ministère des Armées sont des moyennes. En outre, la disponibilité est toujours plus élevée pour hélicoptères utilisés en opération extérieure que pour ceux restés sur le territoire national.
Cela étant, on constate que le taux de disponibilité continue de se dégrader pour les hélicoptères Fennec [38,65%], Tigre HAD [appui et destruction – 30,2%], Puma/Super Puma [31,6%], Dauphin [43,5, soit -18 points par rapport à 2016!], Lynx [15,5%, soit le taux le plus bas] et NH-90 TTH de l’Aviation légère de l’armée de Terre [30,4%].
Ensuite, deux types d’hélicoptères ont vu leur taux de disponibilité progresser légèrement en 2018. Tel est le cas du NH-90 NFH de la Marine nationale [35,5% contre 34,80% en 2017 mais 41,10% en 2016] et du Panther [39,9% contre 39,60%].
Lentement mais sûrement, le taux de disponibilité des Tigre HAP [appui et protection] et des Cougar s’est amélioré constamment depuis 2016, passant de 20% à 28,1% pour les premiers et de 20,30% à 27% pour les seconds.
S’agissant des appareils figurant parmi les plus anciens, les Alouette III [44,7%] et les Gazelle [46,2%] ont affiché, en 2018, des taux des disponibilités similaires à ceux qui étaient les leurs en 2016. Et cela, alors que les crédits d’Entretien programmé du matériel qui leur ont été alloués ont baissé d’environ 45% par rapport à 2017, pour atteindre les 51,2 millions d’euros.
D’ailleurs, s’agissant des budgets dédiés à l’EPM, on constate de fortes variations d’une année sur l’autre, selon les flottes d’hélicoptères. Si les crédits affectés à l’entretien des Gazelle et des Alouette III ont été fortement réduits, ceux destinés aux Fennec et aux Caracal ont augmenté significativement : ils sont passés de 7,13 à 24,1 millions pour les premiers et de 31,79 à 72,8 millions pour les seconds. Et cela, avec des fortunes diverses.
En effet, si le taux de disponibilité des Fennec ne s’est pas amélioré [sans doute faut-il voir la conséquence de la faiblesse des crédits d’EPM qui leur furent alloués en 2017…], celui des 18 Caracal en service a en revanche bondi, passant de 26,50 à 40%.
Les crédits d’EPM ont aussi augmenté significativement pour les NH-90 TTH et NH-90 NFH. Cette hausse s’explique en partie par le fait que 11 nouveaux appareils ont été livrés en 2018. Reste que le taux de disponibilité de ces hélicoptères très récents est décevant. Comme, d’ailleurs, celui de leurs « contemporains », c’est à dire les Tigre HAP et HAD.
Les soucis des NH-90 NFH utilisés par l’aéronautique navale sont récurrents. Le chef d’état-major de la Marine nationale, l’amiral Christophe Prazuck, avait montré son irritation lors d’une audition parlementaire. « Je ne suis pas pas satisfait de la disponibilité ni du coût d’entretien du NH90, sans parler du nombre colossal d’heures de maintenance qui doit lui être consacré [30 heures pour 1 heure de vol…]. Cet appareil présente des problèmes de maturité technique, de corrosion et de maintenance que l’on n’arrivera pas à résoudre du jour au lendemain », avait-il expliqué.
En outre, étant donné que les premiers NH-90 NFH ont été livrés à la Marine nationale dans un standard provisoire [Step A et Step B], ils devront être « rétrofités » pour disposer de l’ensemble des capacités qu’ils sont censés avoir. Ce qui jouera sur leur disponibilité.
Quant aux NH-90 TTH de l’ALAT, le général Jean-Pierre Bosser, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], a récemment évoqué, devant les députés de la commission de la Défense, un « problème de boîte de transmission ».
« Ce problème est connu et commun à toutes les flottes qu’elles soient française, espagnole ou autre. Je demeure persuadé qu’une des solutions est de n’avoir qu’un seul industriel. En effet, changer une boîte de transmission de NH90 en opérations demeure, encore aujourd’hui, compliqué. Si cet hélicoptère est très fiable, ce problème engendre des indisponibilités pouvant aller jusqu’à trois semaines », avait affirmé le CEMAT.
S’agissant des hélicoptères d’attaque Tigre, le souci concerne leur « pare-brise ».
« Au sujet des pare brises de l’hélicoptère Tigre, je considère que c’est l’exemple type du problème des pièces détachées. […] Il ne me semble pas envisageable d’annoncer qu’un Tigre est indisponible pendant 15 jours en raison de l’absence d’un pare-brise. […] J’estime que la gestion des pièces détachées des hélicoptères doit se rapprocher au maximum de celle des pièces détachées des automobiles. Sur ce point, les progrès sont encore trop lents », avait expliqué le général Bosser.
« Il faudra probablement, un jour, taper du poing sur la table pour rappeler que nos hélicoptères sont engagés en opérations et qu’au vu des sommes déjà investies et de celles qui seront investies en 2019 dans le MCO aéronautique, l’armée de Terre est en droit d’obtenir rapidement un joint qui coûte 15 euros et dont l’absence immobilise un hélicoptère pendant 15 jours », avait-il insisté.