La Mission des Nations unies au Mali veut plus d’hélicoptères pour gagner en mobilité et en efficacité

« Le moment est venu de voir si une opération de maintien de la paix est bien le meilleur moyen de régler la situation au nord du Mali », avait affirmé David Hale, le sous-secrétaire d’État américain aux Affaires politiques, alors que le Conseil de sécurité des Nations unies venait de se pencher sur l’évolution de la situation au Sahel, le 30 mars.

À quelques semaines de l’expiration de l’actuel mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali [MINUSMA], une telle déclaration traduit une impatience certaine des États-Unis face à une situation politique et sécuritaire qui peine à s’améliorer, quand elle ne se dégrade pas. Et leur tentation pourrait être de revoir à la baisse le budget et les moyens des Casques bleus déployés au Mali.

Justement, pour l’exercice allant du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020, le montant brut du budget de la MINUSMA, sous réserve que son mandat soit prolongé, est évalué à 1.149,8 millions de dollars. Et cela, pour financer le maintien de 12.935 Casques bleus.

Dans son second rapport en deux mois [et on peut ajouter celui concernant la Force du G5 Sahel] concernant le Mali qu’il a remis au Conseil de sécurité, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, n’a pas minimisé les difficultés relative à l’application des accords de paix signés par les autorités maliennes et certains groupes armés en 2015. De même qu’il a décrit une situation sécuritaire « trés complexe », évoluant « très rapidement ».

« Les conditions de sécurité sont restées précaires dans le nord du Mali et ont continué de se détériorer dans le centre ainsi que dans la région de Koulikoro », écrit ainsi M. Guterres.

« Au cours de la période considérée, c’est dans le nord du Mali [notamment dans les secteurs de Gao, Tombouctou, Ménaka, Kidal] qu’a été enregistré le plus grand nombre d’attaques asymétriques commises par des groupes terroristes [34 sur un total de 59], mais c’est dans le centre du pays que se sont produites les attaques les plus meurtrières », reléve le secrétaire général des Nations unies.

Plus précisément, il a été constaté une « recrudescence des actes de banditismes et d’assassinats ciblés de membres de groupes armés, signataires ou non de l’Accord, et des attaques contre les Forces de défense et de sécurité maliennes et la MINUSMA. » Mais la situation est encore plus préoccupante encore dans le centre du Mali, comme l’a montré la récente attaque meutrière commise contre un village dogon de Sobane-Kou.

« Le centre du pays connaît une escalade de la violence intercommunautaire et les affrontements entre les Dogons et les Peuls, exacerbés par la présence de groupes extrémistes », souligne M. Guterres, avant d’évoquer une autre attaque d’un village qui fit 157 tués parmi les Peuls, en mars dernier.

Pour rappel, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM], une alliance de plusieurs organisations jihadistes, s’était ensuite présenté comme un « rempart » pour les Peuls et avait appelé ces derniers au « jihad ».

« La région centrale du Mali – où, selon les estimations, vivent 30 % des 20 millions d’habitants du pays – est restée celle où l’on a enregistré le plus grand nombre d’attaques contre des civils et de victimes civiles, en raison d’une nouvelle intensification des affrontements et de la violence intercommunautaires, ainsi que des attaques par des groupes terroristes et des milices d’autodéfense. Les violences intercommunautaires ont été les plus marquées essentiellement dans les cercles de Koro et de Bankass, dans la région de Mopti, entre Dogons et Peuls, et dans le cercle de Djenné, toujours dans la région de Mopti, entre Peuls et Bambara », lit-on dans le rapport.

Alors que faire? Diminuer les moyens de la MINUSMA n’est, en tout cas, pas la meilleure idée. « Toute réduction importante » de ses « capacités actuelles » aurait une « incidence » sur sa capacité de « continuer à jouer le rôle essentiel qui est le sien s’agissant d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord dans un contexte très complexe et lourd de menaces », prévient M. Guterres. Et d’insister : « Une réduction significative de sa présence ou le retrait de la Mission non seulement mettrait en péril le processus de paix, mais aurait également de graves conséquences pour la situation de sécurité générale au Mali et dans la sous-région. »

Pour autant, il n’est pas question non plus de se contenter d’un statu quo. D’où des options présentées par le secrétaire général de l’ONU pour rendre la MINUSMA plus efficace en étant davantage réactive, même si elle a réalisé des progrès allant dans ce sens au cours de ces derniers mois.

« D’importantes lacunes en matière d’équipement et de capacités, notamment en ce qui concerne les véhicules blindés de transport de troupes, ont été comblées. En axant davantage son approche et son dispositif sur la mobilité, la MINUSMA a pu accroître sa capacité d’empêcher les groupes armés de se rassembler en grand nombre et de lancer des attaques ciblées, de déployer des hommes et d’assurer la sécurité dans des zones reculées, et d’instaurer un climat propice à la restauration de l’autorité de l’État », explique en effet M. Guterres.

Il s’agit donc d’aller plus loin. « Il est est recommandé que la force augmente encore son efficacité et son efficience en assurant une protection accrue lors des déplacements, en étant plus souple et plus agile, et en adoptant une attitude proactive dans toutes ses zones de déploiement », préconise le secrétaire général de l’ONU.

Et cela passera par la « reconfiguration de certaines de ses unités existantes et le déploiement de capacités supplémentaires. »

« L’amélioration de sa mobilité sera un facteur essentiel qui permettra à la Mission d’accroître sa capacité à faire face à la dynamique de l’environnement opérationnel, en particulier dans le centre du Mali, et de réduire son temps de réaction », assure M. Guterres. Et d’ajouter : cela « permettra d’améliorer la capacité de la MINUSMA en matière d’opérations mobiles grâce à la création d’une force d’intervention rapide, qui sera composée d’unités d’infanterie utilisées comme principaux éléments de manœuvre associées à des capacités facilitatrices et à d’autres composantes de la mission, si nécessaire. »

Le souci est que cette approche va exiger une capacité accrue en matière d’aéromobilité. Or, la MINUSMA peine toujours à disposer de suffisamment d’hélicoptères de manoeuvre et d’attaque pour assurer ses missions. Actuellement, elle s’appuie sur 3 CH-47 Chinook et 5 CH-146 Griffon qui, fournis par le Canada, seront relevés d’ici quelques mois par des appareils roumains [des Puma].

Il manque « encore » à la Mission « certaines capacités facilitatrices essentielles comme des unités d’hélicoptères », est-il admis dans le rapport. Toutefois, y est-il ajouté, « on s’efforce actuellement de combler ces lacune. »

« Les bataillons d’infanterie conserveraient les mêmes besoins en véhicules mécanisés et motorisés, mais utiliseraient en outre des hélicoptères pour le déploiement rapide de petits éléments du dispositif pour mener des opérations d’envergure limitée ou entamer des opérations de plus longue durée. La force d’intervention rapide serait également épaulée au moyen des capacités de surveillance et de renseignement existantes », décrit encore M. Guterres.

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