Le Burkina Faso plaide en faveur d’une « coalition internationale » antiterroriste pour le Sahel
Avec seulement 4.500 militaires et des moyens aériens relativement limités, la force française Barkhane doit lutter contre les organisations jihadistes dans une région aussi vaste que l’Europe. Certes, elle n’est pas seule. La Mission des Nations unies pour la stabilisation du Mali, avec 13.000 Casques bleus, est aussi présente… Mais son mandat ne l’autorise pas de mener des opérations anti-terroristes.
En outre, il faut aussi compter sur les armées locales, appelées à contribuer à la Force coinjoint du G5 Sahel [Mali, Tchad, Niger, Mauritanie, Burkina Faso] . Mais leurs capacités demeurent limitées. Et l’embuscade de Baley Beri, au cours de laquelle 28 soldats nigériens ont perdu la vie, en est une illustration dramatique.
La situation paraît compliquée. Si Barkhane obtient des résultats dans certaines parties du Mali, les groupes armés terroristes profitent de la moindre faille, comme par exemple les tensions interethniques [qu’ils cherchent à provoquer ou à encourager] ou encore la porosité des frontières et la faiblesse des États. Le Burkina Faso se trouve ainsi en grande difficulté, avec le danger de voir d’autres pays touchés par le phénomène jihadiste alors qu’ils en étaient jusqu’alors prémunis.
« Je suis profondément préoccupé par la détérioration des conditions de sécurité au Mali et dans la région du Sahel » qui « fait face à de graves problèmes transnationaux, tels que les changements climatiques et la sécheresse, l’accroissement démographique et l’aggravation du chômage des jeunes, le trafic illicite d’êtres humains, la migration clandestine, le trafic d’armes et de drogues, ainsi que l’extrémisme violent et le terrorisme », a indiqué Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, dans le dernier rapport qu’il a remis au Conseil de sécurité au sujet de la Force conjointe du G5 Sahel.
« La violence au Sahel, qui a longtemps semblé épargner le Burkina Faso, touche désormais le pays et pourrait s’étendre au Bénin, à la Côte d’Ivoire, au Ghana et au Togo », a continué M. Guterres. Et, selon lui, si elle « reste un élément essentiel d’un ensemble d’entités et de dispositifs de sécurité régionaux et internationaux visant à faire face aux groupes armés extrémistes au Sahel et à d’autres problèmes transfrontaliers », la Force conjointe du G5 Sahel, avec ses 5.000 hommes répartis selon trois fuseaux [ouest, centre, est], « ne peut, à elle seule, sécuriser le Sahel. »
Aussi, a-t-il insisté, « il faut faire davantage pour prévenir une nouvelle détérioration de la situation dans la région du Sahel. Pour ce faire, nous devons tous renforcer la coopération régionale et les efforts de lutte contre les menaces terroristes et la traite des êtres humains. »
Qui plus est, souligne le rapport de M. Guterres, cette Force conjointe du G5 Sahel « continue de se heurter à un manque important de formation, de moyens et de matériel ». Et d’ajouter : « Le manque d’équipements de protection individuelle, de véhicules blindés et de moyens de transport, ainsi que l’absence de chaînes d’approvisionnement logistique permettant de transporter du carburant et des vivres des bases de la MINUSMA aux postes de commandement de la Force conjointe, à laquelle s’ajoute la menace que représentent les engins explosifs improvisés, constituent des problèmes majeur. »
Autre éléments inquiétant mis en lumière par ce rapport : la multiplication des liens entre le groupe jihadiste nigérian Boko Haram, affilié à l’État islamique [EI], et d’autres groupes armés « présents dans la zone d’opérations de la Force conjointe. » Ainsi, rapporte M. Guterres, « plusieurs combattants étrangers de nationalité inconnue ont été repérés lors d’opérations récentes et que les véhicules piégés étaient de plus en plus utilisés. »
Le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Alpha Barry, n’est pas loin de faire le même constat que M. Guterres. « Les États membres du G5 Sahel [au nom desquels il s’exprimait, ndlr] n’y arriveront pas tout seuls » alors que leur survie est en jeu, a-t-il dit, devant le Conseil de sécurité des Nations unies.
La lutte contre le terrorisme et la criminalité est « une responsabilité collective » et « il est temps que la communauté internationale envisage la création d’une coalition internationale » car ces « fléaux doivent être traités avec la même détermination que celle qui a prévalu en Irak et en Afghanistan », a plaidé M. Barry.
Par ailleurs, le ministre burkinabè a demandé à la communauté internationale de se mettre d’accord sur une « position claire quant à la résolution de la crise en Libye », pays qui « reste un sanctuaire d’incubation » pour des « terroristes et criminels de tous ordres. »